« […]
- C’est bien naturel, allez. J’ai mes opinions à moi, mais j’estime qu’un prêtre est un homme comme un autre et qu’il a droit à se loger convenablement. Je vous dirai quand même qu’une maison comme la voilà telle, vous y êtes comme une puce dans un tas de foin. Ou alors, il vous faudrait femme et une pleine voiturée d’enfants. »
Voiturier se mit à rire. […]
« Je plaisante, dit Voiturier, mais c’est pour plaisanter. Nous autres gens avancés, on se figure qu’on en a contre la religion, mais c’est bien pas vrai. On en prend et on en laisse, voilà tout. Le coup de Jonas et de la baleine, j’aime autant vous le dire, on ne me le fera jamais avaler. A côté de ça, je vous prends par exemple Jésus-Christ. Moi, Jésus, j’ai rien contre lui. La raison du fait, si vous voulez savoir, c’est que Jésus-Christ, c’était l’homme avancé. Celui qui veut bien voir, Jésus-Christ, c’était le vrai socialiste.
- Vous me l’avez déjà dit, riposta le curé agacé, mais vous vous trompez. Rien n’est plus faux que ce prétendu socialisme. En réalité, Notre-Seigneur était partisan de l’esclavage. Pour vous en convaincre, vous n’avez qu’à lire les Evangiles. Vous n’y découvrirez pas une parole pitoyable, pas une virgule de compassion à l’égard des esclaves qui se comptaient pourtant par millions à son époque. Pour lui, la forme de la société n’avait aucune espèce d’importance et il n’a jamais prêché que la fraternité en Dieu, celle qui n’empêche pas les maîtres de rosser leurs serviteurs. »
Craignant d’en avoir trop dit, le curé se tut. Humblot était choqué et peiné par l’évocation d’un Jésus esclavagiste que de bonnes lectures lui avaient représenté comme un philosophe anarchisant.
« Je l’aurais quand même cru un peu plus avancé, dit Voiturier, mais vous le connaissez mieux que moi. Un de ces dimanches, vous devriez le dire en chaire, que Jésus-Christ était pour l’esclavage. Ca ferait réfléchir bien du monde. […] »
- C’est bien naturel, allez. J’ai mes opinions à moi, mais j’estime qu’un prêtre est un homme comme un autre et qu’il a droit à se loger convenablement. Je vous dirai quand même qu’une maison comme la voilà telle, vous y êtes comme une puce dans un tas de foin. Ou alors, il vous faudrait femme et une pleine voiturée d’enfants. »
Voiturier se mit à rire. […]
« Je plaisante, dit Voiturier, mais c’est pour plaisanter. Nous autres gens avancés, on se figure qu’on en a contre la religion, mais c’est bien pas vrai. On en prend et on en laisse, voilà tout. Le coup de Jonas et de la baleine, j’aime autant vous le dire, on ne me le fera jamais avaler. A côté de ça, je vous prends par exemple Jésus-Christ. Moi, Jésus, j’ai rien contre lui. La raison du fait, si vous voulez savoir, c’est que Jésus-Christ, c’était l’homme avancé. Celui qui veut bien voir, Jésus-Christ, c’était le vrai socialiste.
- Vous me l’avez déjà dit, riposta le curé agacé, mais vous vous trompez. Rien n’est plus faux que ce prétendu socialisme. En réalité, Notre-Seigneur était partisan de l’esclavage. Pour vous en convaincre, vous n’avez qu’à lire les Evangiles. Vous n’y découvrirez pas une parole pitoyable, pas une virgule de compassion à l’égard des esclaves qui se comptaient pourtant par millions à son époque. Pour lui, la forme de la société n’avait aucune espèce d’importance et il n’a jamais prêché que la fraternité en Dieu, celle qui n’empêche pas les maîtres de rosser leurs serviteurs. »
Craignant d’en avoir trop dit, le curé se tut. Humblot était choqué et peiné par l’évocation d’un Jésus esclavagiste que de bonnes lectures lui avaient représenté comme un philosophe anarchisant.
« Je l’aurais quand même cru un peu plus avancé, dit Voiturier, mais vous le connaissez mieux que moi. Un de ces dimanches, vous devriez le dire en chaire, que Jésus-Christ était pour l’esclavage. Ca ferait réfléchir bien du monde. […] »
Marcel Aymé.- La Vouivre.