lundi 24 juin 2019

Nihon yôkoso ! VII

Seul en mégapole
Ueno, Yanaka, îlots.
Je perds mon métro.
Mardi 23 avril 2019

   6h30, Doshu. 8h, Yasuno sensei. J'ai déjà évoqué ce grand sensei. C'est le seul que j'avais déjà rencontré parmi tous ceux dont j'ai suivi les cours pendant mon séjour. Et pour cause, je le connais bien depuis 20 ans. Pourquoi ? Parce qu'il fait des stages en France, tous les ans. Mon premier était à Wasquehal, près de Lille. Je suis allé à celui de Paris quelques semaines avant mon départ. Avec un trac dingue j'ai demandé à un organisateur si je pouvais le saluer (c'est ma copine qui m'a poussé, je crois que seul je n'aurais pas osé, tonton Wrobly est un garçon timide), y a pas eu de souci. Apprenant que j'allais partir au Japon et que je souhaitais pratiquer avec lui, il m'a dit de voir avec Ludo, son élève et uke privilégié, un français vivant dans la capitale nippone, que je ne saurais trop remercier de m'avoir piloté dans le grand Tokyo jusqu'aux dojos du maître, pour ses conseils, son service d'interprète, sa pratique... Nous nous échangeâmes donc nos méls et Ludo me donna rendez-vous à l'Aïkikaï, à l'occasion du cours de son mentor. C'est donc pour aujourd'hui. Nous allons voir le professeur après la séance. C'est entendu pour que je suive son enseignement jeudi soir dans l'un de ses dojos privé.

   Yasuno a un style très particulier, c'est un peu l'anti Kanazawa sensei (voir Nihôn Yôkoso précédent). Il donne une grande importance aux projections basées sur le principe de rebond, de rencontre de centre à centre, de taiatari. L'aspect est explosif, mais en fait c'est très doux : quand on se retrouve en vol plané, soufflé par le kokyu, la respiration de la rencontre, on a une impression de ralenti. Le placement du sensei, à l'endroit juste, à l'instant juste, avec le geste juste, la posture juste, et le juste engagement fait qu'uke, l'attaquant, se retrouve complètement déséquilibré, sans qu'aucune contrainte articulaire n'intervienne. Finalement un léger ou plus profond engagement des hanches de tori (celui qui réalise la technique, en l'occurrence Yasuno) expulse le partenaire du point de rencontre de manière impressionnante.

Ludo, c'est le premier partenaire, qui revient ensuite, notamment pour le boken (sabre en bois).

   Aujourd'hui, je suis légèrement inquiet : la tirette ne veut plus me filer de billets. Tout de suite j'imagine le pire, il me reste 15 jours à tirer, si je n'ai plus un rond je vais être mal. La suite me révèlera juste que j'avais épuisé mon quota en arrivant, et dès le lendemain les compteurs se sont remis heureusement à zéro.

   Je décide d'aller dans le quartier d'Ueno, puis dans celui de Yanaka. Je me dirige donc vers le métro en passant par le Golden gai, quatre ou cinq rues minuscules, lovées au creux des tours de Shinjuku et de son intense foisonnement, parsemées de bars lilliputiens dans lesquels on ne tiendrait pas à six. Ce quartier nain planqué aux pieds des titans ne se met évidemment à vivre et à prendre sa réelle dimension que le soir et la nuit, comme sont gigantesque hôte.




   Ueno (comme Asakusa que j'arpenterai un jour suivant), je l'avais gardé en mémoire suite à la lecture d'un manga dont la fiction se déroulait sous l'ère Tokugawa (XVIIème, XVIIIème et une bonne partie du XIXème siècle), Furari, de Jirô Taniguchi. C'était resté un peu mythique dans mon esprit. Malheureusement, tout est si grand, et je n'ai ni fil directeur, ni le temps d'aller partout. Je zappe donc temples, sanctuaires et musées et me contente de traverser le parc, adoré des Tokyoïtes. Auparavant, en arrivant, au sud du parc, j'ai pris le temps de faire le tour du lac Shinobazu couvert de lotus et de nénuphars géants. En se baladant sur ses berges, s'il n'y avait ces quelques immeubles incongrus griffant l'horizon, on pourrait se croire à mille lieues de Tokyo.


Etais-je au même endroit ?

Un parc adoré des Tokyoïtes.

Le Musée national de Tokyo, Ueno.

   Au nord-ouest du parc, c'est le quartier Yanaka, remarquable vestige du Tokyo de jadis, rescapé du séisme de 1923 et des bombardements de 1945, une oasis urbaine en bordure de la métropole. Quartier horizontal, beaucoup de maisons en bois, entrecoupées de temples, de sanctuaires et de mini cimetières de voisinage. J'y fais une bonne promenade, en me sentant du coin, les habitants ne me font vraiment pas sentir que je suis un touriste. Je termine dans un resto de ramen, enfin ! A la fin du repas, je décide de tester mon japonais. Dans ce quartier, on se croirait en province, et puis j'avais pas mal marché depuis le parc d'Ueno, autant dire que j'ignorais absolument où se trouvait le métro. Les soupes du resto étaient servies sur un comptoir, les clients étant assis les uns à côtés des autres. M'étant bien régalé je demande au jeune restaurateur (il y avait un jeune et un aîné), je lui demande après avoir bien vérifié mes mots et poli mon accent : "Chikatetsu wa doko desu ka onegaishimasu". Le jeune ne semble pas m'avoir compris. J'ajoute : "subway...". Il me fait comprendre d'attendre quelques instants ("chotto mate kudasai"), que le vieux va me répondre à son retour. Celui-ci arrive : même incompréhension, en nippon comme en anglais. Et puis tout à coup j'entends à côté de moi : "Vous cherchez le métro ?". Je me tourne sur ma droite, et un client, français apparemment, était tout disposé à me renseigner, ce qu'il fit le plus aimablement du monde. A mon départ le patron, tout en me saluant, s'excusait gentiment ("sumimasen", pardon, désolé !) de ne pas m'avoir compris... J'ai encore quelques progrès à faire, mais je constate tout de même qu'un Français est tout à fait à même de comprendre mon japonais... ou mon anglais...  Je trouve finalement le métro facilement.












Mon premier jour solitaire s'est bien passé. Si ce n'est peut-être un besoin de sucre. Je me sens faiblard limite hypoglycémie. Là-bas l'alimentation est délicieuse, mais très peu grasse et encore moins sucrée. Le petit dessert ne fait pas partie de la culture. Je fais donc un crochet dans un 7/11 pour prendre bananes, pêches en gelée et biscuits. Par la suite je m'autoriserai une petite glace à l'occasion, après les repas notamment.

Bon, allez, retour vers les folles nuits de Shinjuku, dodo, je me lève tôt demain.


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