vendredi 22 avril 2016

Intertextualité

Vous vous souvenez peut-être de ces pauvres carmélites, s’en allant gaiement curer leur fosse à merde avec au cœur l’amour du Seigneur, et n’en ressortant finalement que les pieds devant, enfin c’est une métaphore (et une métonymie à la base, non ?), vu que pour retirer quelqu’un d’un trou, on est plutôt contraint à une certaine verticalité, et même dans l’hypothèse où on évacuerait le cadavre carmélite par les pieds (ce qui n’est pas forcément le cas, on pourrait le tirer par les aisselles), les pieds seraient en l’occurrence en haut, et non devant. C’était narré ici.

Fosse (cabinets) du couvent des Trappistines de Laval.

Eh bien, troublante magie des correspondances textuelles, nous avons très récemment découvert l’extrait suivant, dont l’anecdote finale n’a pas été sans faire naître en nous cette impression de déjà lu si étrange que nous connaissons tous. Elle ne fait néanmoins et a contrario que confirmer en nous la foi en cette maxime frappée au coin de la sagesse populaire, de la common decency la plus élémentaire eut dit Orwell qui l’illustra lui-même dans sa Ferme des animaux : qui n’aime pas les animaux n’aime pas les humains.

On nuancera cependant la thèse défendue ci-dessous, en rappelant que de sains recyclages sont encore possibles, même s'ils restent insuffisants face aux centaines de millions de tonnes annuelles de déjections de type fécal de l'industrie de l'élevage en France, par exemple.

   "Revenons donc à notre question de départ : qu’advient-il de cette masse de merde extrêmement dangereuse ?

Xavier Beulin, ministre de l’agriculture, patron du groupe producteur de pesticides (poisons) Avril, du MEDEF de l’industrie agro-alimentaire, la FNSEA, et de ses SA (sturmabteilungen) départementalisés casseurs de zadistes des FDSEA.

   Si tout se déroule conformément au plan, les déchets liquéfiés sont rejetés dans d’immenses « mares » creusées près des porcheries. Ces mares toxiques s’étendent parfois sur plus de 11 000 mètres carrés – autant que les plus grands casinos de Las Vegas – et atteignent jusqu’à dix mètres de profondeur. La création de ces latrines aussi grandes que des lacs est considérée comme normale et est parfaitement légale, en dépit de leur incapacité constante à effectivement absorber les déchets. On peut trouver jusqu'à une centaine de ces puisards géants dans les environs d'un seul abattoir (les élevages industriels ont tendance à s'entasser autour des abattoirs). Si vous tombiez dans l'un d'entre eux, vous mourriez. (Tout comme vous mourriez d'asphyxie en quelques minutes si le courant était coupé dans une porcherie industrielle où vous vous trouveriez.) Tietz rapporte une histoire terrifiante au sujet d'une de ces mares : "Etourdi par l'odeur, un ouvrier du Michigan qui travaillait à la réfection d'une mare est tombé dedans.

Stéphane Le Foll, son chef de cabinets.

Son neveu de quinze ans a plongé pour le sauver, mais il a perdu conscience, le cousin de l'ouvrier s'est jeté dans l'étang pour sauver l'adolescent, mais il s'est évanoui, le frère aîné de l'ouvrier a voulu y aller à son tour, et a lui aussi perdu conscience, puis le père de l'ouvrier a plongé. Ils sont tous morts dans de la merde de porc.""
Jonathan Safran Foer.- Faut-il manger les animaux ?

Bakounine, sympathique ardéchois, a de la chance : il connait la lumière du soleil et le parfum du vent.

 Espiègle, facétieux, joueur, comme tous ses congénères, il adore qu'on l'arrose au jet.

 Non manipulé génétiquement, il ne se nourrit pas d'antibiotiques, ni d'hormones, son caca sent bon.

Et celui-ci pourra, avec ceux de Louise et de Carlo, être absorbé par la nature environnante, et la fertiliser, car nos amis ne sont pas des milliers confinés dans un hangar, mais tous les trois. Y a de la marge.

"Autant que les plus grands casinos de Las Vegas": ils sont vraiment dingues ces américains. Heureusement, nous, nous avons le cochon bien de chez nous, le cochon breton ! Alors pour une extraction de minerai de viande de porc française (oui Monsieur !), et de qualité ; avec Xavier Beulin, la FNSEA, Stéphane Le Foll et tous les entrepreneurs du secteur, scandons avec conviction nos vrais valeurs contre les agents de l'étranger extrémistes, écologistes et/ou végétariens : Nation, Extraction, Eutrophisation !

lundi 18 avril 2016

Notion de dépense

  En tant que classe possédant la richesse, ayant reçu avec la richesse l’obligation de dépense fonctionnelle, la bourgeoisie moderne se caractérise par le refus de principe qu’elle oppose à cette obligation. Elle s’est distinguée de l’aristocratie en ce qu’elle n’a consenti à dépenser que pour soi, à l’intérieur d’elle-même, c’est-à-dire en dissimulant ses dépenses, autant que possible, aux yeux des autres classes. Cette forme particulière est due, à l’origine, au développement de sa richesse à l’ombre d’une classe noble plus puissante qu’elle.

La France décore en catimini le prince héritier d’Arabie saoudite de la Légion d’honneur.

A ces conceptions humiliantes de richesse restreinte ont répondu les conceptions rationalistes qu’elle a développées à partir du XVIIe siècle et qui n’ont pas d’autre sens qu’une représentation du monde strictement économique, au sens vulgaire, au sens bourgeois du mot.

Le PDG de PSA Carlos Tavares double son salaire : 5,24 millions d’euros : « Chut ! Go ahead, make my day ! »

La haine de la dépense est la raison d’être et la justification de la bourgeoisie : elle est en même temps le principe de son effroyable hypocrisie. Les bourgeois ont utilisé les prodigalités de la société féodale comme un grief fondamental et, après s’être emparés du pouvoir, ils se sont cru, du fait de leurs habitudes de dissimulation, en état de pratiquer une domination acceptable aux classes pauvres.

La socialiste serait pressentie pour être présidentiable. Elle pourra alors, si ce n'est déjà fait, profiter du magnifique yacht à propos duquel le petit prédécesseur de Pépère a tant injustement été critiqué.

Et il est juste de reconnaître que le peuple est incapable des les haïr autant que ses anciens maîtres : dans la mesure où précisément, il est incapable de les aimer, car il leur est impossible de dissimuler, du moins, un visage sordide, si rapace sans noblesse et si affreusement petit que toute vie humaine, à les voir, semble dégradée.
[…]
  Il faut ajouter que l’atténuation de la brutalité des maîtres – qui ne porte d’ailleurs pas tant sur la destruction elle-même que sur les tendances psychologiques à la destruction – correspond à l’atrophie générale des anciens processus somptuaires qui caractérise l’époque moderne.
  La lutte de classe devient au contraire la forme la plus grandiose de la dépense sociale lorsqu’elle est reprise et développée, cette fois au compte des ouvriers, avec une ampleur qui menace l’existence même des maîtres.


Georges Bataille.- La Notion de dépense.

vendredi 15 avril 2016

Jouons un peu avec l’inventaire de pré bleu

Quelle différence y a-t-il entre :

la raie manta, le diable de mer, la raie douce, le requin babosse, le requin cuivre, le requin des Galapagos, le requin gris, le requin de nuit, le requin taureau, le grand requin blanc, le requin-marteau,


l’aiguillat commun, l’aiguillat cubain, le requin renard à gros yeux, le requin taupe bleu, le requin peau bleue, le wahoo, le marlin voilier, la bonite, le thazard barré, le thazard atlantique, le makaire bécune,


le makaire blanc de l’Atlantique, l’espadon, la lanterne de Kroyer, le baliste cabri, l’aiguille, la castagnole, la carangue, le centrolophe noir, le coryphène, le Cubiceps pauciradiatus, le poisson porc-épic,


la comète saumon, l’anchois, le mérou, le poisson volant, la morue, l’hippocampe, la calicagère blanche, le poisson royal, l’escolier noir, la liche, le triple queue, la baudroie, le poisson-lune, la murène,


le poisson pilote, l’escolier à long nez, le cernier commun, le tassergal, l’otolithe, le tambour rouge, la sériole couronnée, la sériole, le pagre commun, le barracuda, le poisson globe, la tortue caouanne, la tortue verte,


la tortue luth, la tortue imbriquée, la tortue de Kemp, l’albatros à bec jaune, le goéland d’Audoin, le puffin des Baléares, l’albatros à sourcils noirs, le goéland marin, le puffin majeur, le pétrel noir, le puffin gris,


le goéland argenté, la mouette atricille, l’albatros royal, l’albatros à cape blanche, le puffin fulgineux, le fulmar antarctique, le puffin yelkouan, le goéland leucophée, le petit rorqual, le rorqual boréal, le rorqual commun, le dauphin commun, la baleine franche, le globicéphale, la baleine à bosse, la baleine à bec, l’orque, le marsouin commun, le grand cachalot, le dauphin bleu et blanc, le dauphin tacheté de l’Atlantique, le dauphin à long bec, le grand dauphin et la baleine à bec de Cuvier ?

SOLUTION

Eh ! ben dites-donc vous, vous n'êtes pas très joueurs... Enfin, on vous pardonne, on sait que vous passez vos nuits debout, bravo !

Donc je vous apporte la solution : aucune !


Les êtres cités ci-dessus font partie des 145 espèces tuées de façon routinière - et gratuite - lorsqu'on pêche le thon. Imaginez que l'on vous serve une assiette de sushis. Si l'on devait y présenter également tous les animaux qui ont été tués pour que vous puissiez les déguster, votre assiette devrait mesurer un peu plus d'un mètre cinquante de diamètre.


C'est ce qu'on appelle le bycatch (prise accessoire). Cela désigne les créatures marines capturées accidentellement - sauf que ça n'est pas vraiment un "accident", puisque le bycatch a été sciemment intégré aux méthodes de pêche modernes. La pêche actuelle a tendance à avoir recours à de plus en plus de technologie et à de moins en moins de pêcheurs. Cette combinaison entraîne des prises massives accompagnées de quantités énormes de prises accessoires. Prenons les crevettes par exemple. Une opération routinière de chalutage de crevettes rejette par-dessus bord, morts ou agonisants, entre 80 et 90 % des animaux marins ramenés à chaque remontée du chalut. (Une bonne partie de ce bycatch est composé d'espèces menacées.) Les crevettes ne représentent en poids que 2 % de la quantité d'aliments marins consommés dans le monde, mais 33 % du bycatch mondial. Nous n'y pensons guère car nous n'en savons rien. Que se passerait-il si l'étiquetage d'un produit indiquait combien d'animaux ont été tués pour que celui que nous voulons manger se retrouve dans notre assiette ? Eh bien, pour ce qui concerne les crevettes d'Indonésie, par exemple, on pourrait lire sur l'emballage : POUR 500 GRAMMES DE CREVETTES, 13 KILOS D'AUTRES ANIMAUX MARINS ONT ÉTÉ TUÉS ET REJETÉS A LA MER.

Bon, allez, je vous laisse, la DRH intérimaire nous a donné l'après-midi, je dois être le seul resté ici pour blogger. Demain je pars à St-Malo. Nous avons prévu de nous faire un plateau de fruits de mer.

Des extraits et des reformulations du livre de Jonathan Safran Foer : Faut-il manger les animaux ? ont été utilisés pour cet article.

lundi 11 avril 2016

Vive Aïssatou !


Trouvé sur ma boîte mèl :

La Coordination Nationale Étudiante vient d'adopter une motion de soutien à Aïssatou, étudiante de Paris 8 et porte-parole de la Coordination Nationale Étudiante qui est victime d'attaques racistes et sexistes depuis son passage sur iTélé hier, où elle a tout déchiré et nous a rendu-e-s fièr-e-s. [...]

Pour information nous avons décidé, avec son accord, de représenter Aïssatou comme candidate au porte-parolat pour Paris 8. Les porte-parole sont censés tourner toutes les semaines, mais nous ne voulons pas donner l'impression de la désavouer ou de la révoquer.

C'est tout ce qu'on leur apprend dans leurs écoles de chiens de garde ?  Pas lourd.

vendredi 8 avril 2016

Non au reductio ad flicum !

"Bac à ordures : chiens, porcs, orangs-outans, boeufs : aucune métaphore animalière ne devrait être employée pour désigner ces…" pouvait-on lire avec approbation et plaisir ici. Même si les poulets, les bourrins et les vaches peuvent sembler inintelligents et bornés à qui les connait mal, même si les cochons sont calomniés et jugés sales, alors que ce sont les conditions dégueulasses de l'élevage industriel qui les oblige à souffrir le martyr dans leur merde, merde qui finira par nous revenir dans la gueule sous des formes bien effrayantes soit dit en passant. Même si les chiens sont taxés de soumission et de servilité, tous ces animaux ne méritent pas qu'on file à leur charge une métaphore les assimilant à tout ce que la police produit de vice social. Nos frères et soeurs les bêtes domestiques n'ont rien à voir avec la bleusaille (CRS, mobiles, simples flics... ad nauseam) ou les cow-boys baqueux ou autres, rien. Alors a fortiori, les loups, ces être qui ont préféré échanger le risque de mourir de faim contre la certitude de rester libres (enfin, tant que le capitalisme n'avait pas complètement détruit leur - notre - environnement) ! Même leur férocité face aux moutons ne peut être comparée au sadisme policier.

C'est pourquoi nous nous insurgeons contre cette chanson qui, partant d'un bon sentiment (la critique de l'envahissement de Paris par CRS, baqueux, militaires, mouchards, gendarmes... ad gerbam) fait payer une fois de plus un tribut infamant à nos chers Isengrin !

Lors des 50 ans de musique de Patrice Caratini, contrebassiste, chef d'orchestre et arrangeur, la chanteuse Hildegarde Wanzlave. Du lourd !

lundi 4 avril 2016

Pour des statues sans commandeurs

Quelques jours après mon post sur Ferrer à Bruxelles, la violence fanatique s'est déchaînée dans cette ville plutôt bonne enfant. J'y ai donc réfléchi à deux fois avant de poster cet article sur la statuaire politiquement proche de la Plèbe, craignant, par un scrupule superstitieux, provoquer d'autres carnages. Et puis non ! Ne nous laissons pas gagner par l'irrationnel, c'est ce qu'"ils" veulent, et faisons preuve de courage en résistant, comme nos glorieux anciens. Je suis donc allé à un concert de jazz la semaine dernière et je publie aujourd'hui ce défi au mauvais sort. Il se présentera sous la forme de quelques sculptures ayant défrayé la chronique en leur temps :

Le grand Charles Fourier et ses fameuses tribulations, rappelées récemment par le site Lundi matin.


Le retour de Charles Fourier

"Le lundi 10 mars 1969, à 19 heures, au moment même donc où commençait une « grève générale » d’avertissement soigneusement limitée á 24 heures par l’ensemble des bureaucraties syndicales, la statue de Charles Fourier était remise, place Clichy, sur son socle, resté vide depuis que les nazis en avaient enlevé sa première version. Une plaque gravée à la base de la statue en disait l’origine : « En hommage à Charles Fourier, les barricadiers de la rue Guy-Lussac ». Jamais encore la technique du détournement n’avait touché un tel domaine.
La police s’avisa peu après de sa présence, et laissa une garde autour d’elle durant toute la journée du lendemain. Elle fut enlevée à l’aube du surlendemain par les services techniques de la Préfecture.
Un commando d’une vingtaine « d’inconnus », comme disait Le Monde du 13 mars, avait suffi à couvrir toute l’opération, qui dura un quart d’heure. D’après un témoin, cité par France-Soir du 13, « huit jeunes gens d’une vingtaine d’années sont venus le déposer à l’aide de madriers. Une jolie performance si l’on sait qu’il n’a pas fallu moins de 30 gardiens de la paix et d’une grue pour remettre, le lendemain, le socle à nu. »
Et L’Aurore, pour une fois véridique faisait remarquer que la chose était notable car « les enragés ne rendent pas tant d’hommages »."
L’Internationale situationniste #12

Le petit paysan de Gentioux, qui, non content d'être confisqué par des associations à la naphtaline et des élus autoritaires protégés des anti-militaristes conséquents par leur chère maréchaussée, ici, comme tant d'autres, voit son hommage photographique gâché par un de ces couillons de touristes venant accomplir ses mômeries entre mon objectif et l’œuvre immortelle.


"Voyons donc quels sont les principes de notre nouvelle association. Elle s’appelle Ligue de la paix et de la liberté. C’est déjà beaucoup ; par là nous nous distinguons de tous ceux qui veulent et qui cherchent la paix à tout prix, même au prix de la liberté et de l’humaine dignité. Nous nous distinguons aussi de la société anglaise de la paix qui, faisant abstraction de toute politique, s’imagine qu’avec l’organisation actuelle des Etats en Europe la paix est possible. Contrairement à ces tendances ultra-pacifiques des sociétés parisienne et anglaise, notre Ligue proclame qu’elle ne croit à la paix et qu’elle ne la désire que sous la condition suprême de la liberté. […]
Cette justice si universelle et qui pourtant, grâce aux envahissements de la force et aux influences religieuses, n’a jamais encore prévalu, ni dans le monde politique, ni dans le monde juridique, ni dans le monde économique, doit servir de base au monde nouveau. Sans elle point de liberté, point de république, point de prospérité, point de paix !"
Michel Bakounine.

Le Balzac de Rodin


Notre ami Balzac qui, bien que monarchiste, nous a bien fait rêver d’aventures, quand on arpentait sa Comédie et Paris, avec la croyance que, à un coin de rue, on pourrait rencontrer un Vautrin qui nous dévierait du droit chemin, un des Treize qui nous coopterait dans un rocambolesque complot, ou une fille aux yeux d’or... ! Malheureusement, sortie de la diégèse et des bitures, la vie sous la normalisation capitaliste et high-tech semble bien avoir réduit la possibilité d'aventure comme peau de chagrin, enfin pour ceux qui ne souffrent ou ne meurent pas en Méditerranée, sous les bombes, les verrous, de faim, sans soins, dans des hangars de "plein air" ou aux abattoirs… Il est vrai que la lutte pour la survie face au totalitarisme bureaucratique-marchand relève d'une forme, morbide mais néanmoins réelle d'aventure, ne serait-ce que par l'ingestion de la soupe fécale appelée poulet de chair, la fouille de poubelle pour trouver un croûton, ou la dégustation d'un yaourt périmé depuis trois semaine que monsieur Jean-Charles Naouri ou un autre de ces philanthropes réalistes à bien voulu nous vendre à prix réduit. Je ne pense pas non plus à l'aventure que le fric permet. Mais à l'aventure des rencontres, du partage, de la gratuité, de la création, des nobles combats... Vous me direz, il faudrait pouvoir se secouer un peu et les plus dynamiques d'entre nous font quand même de beaux vrais voyages (on m'a narré récemment un chouette bout de chemin avec les zapatistes mexicains, mais pas besoin d'aller si loin, le bocage nantais ou certaines récentes batailles lycéennes bergsoniennes sont finalement la preuve que l'aventure n'est pas morte), pas forcément au bout de la nuit. Il suffit parfois de ramasser un pavé pour que, d'un coup, l'aventure soit de nouveau au coin de la rue... Et puis, pour revenir à Balzac lui-même, il avait un côté bohème et un caractère cocasse avec ses dettes, son addiction au café, sa passion dévorante d’écrire et ses amours malheureuses, qui me le rendent finalement symapthique.
En ce qui concerne la sculpture, on se souvient, en tout cas on vous le rappelle, que le Balzac de Rodin a scindé la France en deux, déchaînant haines et passions, de la même manière que l’affaire Dreyfus au même moment, et sur la même ligne de front : les dreyfusards, la gauche et les libertaires étaient plutôt pour, les nationalistes, cléricaux et autres réactionnaires franchement contre. Ca a chauffé. Zola s’en est mêlé, défendant Rodin comme il défendait Dreyfus. Zola que nous vomissons quand, petit journaleux arriviste, il crache sur les vaincus de la Commune, verrue ! Mais qui malgré tout, à eu une évolution pour ainsi dire inverse de celle de Renaud Séchan, et qui s’est un peu rattrapé lors de cette sombre Affaire. Quand à Rodin, ce petit chef d’entreprise à l’idéologie de chef d’entreprise, il ne s’est pas mouillé, refusant de s’engager pour soutenir celui qui l’avait défendu, n’ayant pas d’opinion sur la culpabilité de Dreyfus, préférant continuer d’exploiter ses nombreux tâcherons et profiter de ses commandes d’Etat pour fignoler son plan de carrière. Cependant, comme nous l’avons constaté plusieurs fois ici, le génie, la grâce artistique dépassent souvent la mesquinerie des individus qu’ils traversent, et ce Balzac a une sacrée gueule, comme l’œuvre collective estampillée Rodin est souvent sublimissime.


A suivre, peut-être...

vendredi 1 avril 2016

Les Bourgeois, les Consommateurs et nous

« Ainsi, lorsqu’un Français consommateur croise le chemin d’un Français politisé, ce n’est pas tant un ami ou un ennemi qu’il rencontre mais une énigme.


Qui est cet humain qui s’entête à défiler une fois par semaine sous des pluies torrentielles d’eau ou de gaz, alors qu’il a parfois mal au pied (c’est là son talon d’Achille),


s’emmerde des heures durant en AG au lieu de surfer peinard ou de faire ses courses sur internet au chaud au bureau,


distribue des tracts tôt le matin au lieu de dragouiller en terrasse tard le soir


et cotise mois après mois, année après année pour la caisse de grève ou le soutien aux luttes sociales plutôt que d’économiser pour la belle voiture, la belle maison ou la belle tablette ?


Qui est cette créature insensée à qui on a offert l’Economie sur un plateau d’argent mais qui s’obstine à se tourner vers l’égalité sociale et la liberté tel un tournesol que seul le soleil peut subjuguer ?


Cette créature sait quelque chose qui échappe à la Raison travailleuse-consommatrice. »



Texte librement inspiré d'un extrait du dernier (premier ?) livre de Houria Bouteldja.