mercredi 29 novembre 2017

Les chansons dont vous n'aviez jamais compris les paroles III


Soleil cherche futur

L'infirmier de minuit distribue le cyanure
Et demande à Noé si le charter est prêt.
"Oh mec il manque encore les ours et les clônures
Mais les poux sont en rut, faut décoller pas vrai ?"
Et les voila partis vers d'autres aventures,
Vers les flèches où les fleurs flashent avec la folie
Et moi je reste assis les poumons dans la sciure
A filer mes temps morts à la mélancolie.

Soleil, soleil,
N'est ce pas merveilleux de se sentir piégé ?

Paraît que mon sorcier m'attend à Chihuaha
Ou bien dans un clandé brumeux de Singapour
Mais je traîne les PMU avec ma gueule de bois
En rêvant que la barmaid viendra me causer d'amour
Et je tombe sur l'autre chinetoque dans cette soute à proxos
Qui me dit "Viens prendre un verre. Tu m'as l'air fatigué."
Laisse tomber ta cuti, deviens ton mécano.
C'est depuis le début du monde que l'homme s'est déchiré.

Soleil, soleil,
N'est ce pas merveilleux de se sentir piégé ?

Adieu Gary Cooper, adieu Che Guevara.
On se fait des idoles pour planquer nos moignons.
Maintenant le vent s'engouffre dans les nirvanas
Et nous sommes prisonniers de nos regards bidon.
Les monstres galactiques projettent nos bégaiements
Sur les murs de la sphère où nous rêvons d'amour
Mais dans les souterrains, les rêveurs sont perdants.
Serions-nous condamnés à nous sentir trop lourds ?

Soleil, soleil, soleil, soleil
Soleil, soleil,
N'est ce pas merveilleux de se sentir piégé ?
Soleil, soleil,
N'est ce pas merveilleux de se sentir piégé ?
Soleil, soleil,
N'est ce pas merveilleux de se sentir piégé ?

Paroliers : Hubert-Félix THIEFAINE / Claude MAIRET

Version studio, celle de mon enfance


Étonnante et réjouissante version reggae, découverte récemment


Les autres chansons dont vous n'aviez jamais compris les paroles :

- Bombez !
- Mon sissoyen

lundi 27 novembre 2017

Sacqueboute XXVII : Melba et sa pêche

   Allez, encore une femme tromboniste, c'est si rare que ça fait du bien.


   Un petit jeu (je parle évidemment pour nous, pas d'elle), mais si vous êtes attentif la réponse est dans le post : de quel jazzman mondialement connu, pas forcément pour son jazz par le plus grand nombre d'ailleurs, Melba a-t-elle été sidewoman ?




   Un hommage.



Priviouslillonne Sacqueboute :

La Flûte aux trombones
Gunhild Carling
Nils Wogram et Root 70
Carl Fontana
Animaux
Trombone Shorty
Cinéma
Feu
Le Canadian Brass
Local Brass Quintet
Buddy Morrow
Bones Apart
J.J. Johnson
Lawrence Brown
Vinko Globokar
Les funérailles de Beethoven
Treme
Craig Harris
Mona Lisa Klaxon
Juan Tizol
Bob Brookmeyer
Daniel Zimmerman
Frank Rosolino
Rico Rodriguez
Kid Ory

vendredi 24 novembre 2017

De galères


Marie-Eugène Dellébeuse [...] serait donc né le 17 mai 1924 à Ambarès le Rotrou. Son père était un petit imprimeur de rien du tout qui avait ses presses dans le quartier de Grenelle, à Paris, et qui imprimait entre autres choses une feuille anarchiste appelée primitivement "A bas le sac d'écus", puis abréviativement "A bas le sac". [...] Des épreuves d'A bas le sac traînaient sur le marbre [...] : "Prolo, il est pour la subversion totale, et les sucreries social-mou et le garde-à-vous moscoutaire, comment il se les met au derche". [...]


En arrivant à Paris, la nouvelle Clara trouva l'imprimeur Dellébeuse en proie à une vive contrariété. A bas le sac ayant publié en première page une photo de M. Poincaré riant dans un cimetière militaire, il y avait eu interpellation à la chambre bleue horizon.
   - Les poulets vont sûrement faire une descente au siège d'A bas le sac, disait Dellébeuse.
[...]
   Obligé de repartir pour Paris le soir même, il tenait beaucoup à ne pas quitter la commune sans avoir dit au maire qu'il était une ordure légale et au gendarme qu'il compissait la maréchaussée. Il les trouva justement au café en train d'échanger des injures. Le maire, un petit gros rougeaud dans la trente-cinquaine, gueulait dans la figure du gendarme : "Où que t'étais, grande saucisse, dis-le donc où que t'étais pendant que je me faisais débiter la viande aux Eparges, à Verdun, à Soissons ? A l'arrière des lignes que t'étais, charogne, pour me tirer dessus si j'avais renâclé au coup dur. Mais j'ai une bonne chose à te dire, Maloupiat, c'est que je crache à la gueule de toute la gendarmerie et, en plus de ça, je te rappelle que je suis le premier magistrat de ma commune et que tu me dois le respect et l'obéissance !

Marcel Aymé.- Antoine Blondin


Mes deux dernières actus ciné.

mercredi 22 novembre 2017

De l'impossibilité d'hiberner

   Je rêve que je reste au lit toute la journée et que j'abandonne à la Confédération nationale du Patronat français le soin de faire tourner les affaires pour son plaisir personnel et moi, la couette bien tirée jusqu'aux oreilles, je mijote bien au chaud dans cette atmosphère à la Marcel Proust [...].
   Et puis voilà qu'un petit besoin inattendu soudain vient me tourmenter l'entrejambe, irrésistiblement m'extirpe du dodo et m'entraîne clopin-clopant jusqu'aux toilettes et alors adieu rêve merveilleux, c'est l'inévitable réalité quotidienne qui reprend le dessus avec ce flic flac dans la cuvette ! [...]
   J'ai juste le temps d'enfiler un froc et de godiller jusqu'à la cuisine pour me faire frire deux oeufs et réchauffer un quart de café que déjà sur les ondes [...] c'est un type (j'imagine un zèbre en cravate à rayures et costume trois-pièces) qui, comme avec des piles toutes neuves dans la voix, me communique le dernier bulletin de santé du CAC 40, du Dow Jones et aussi celui de l'indice Nikkei ! Vrai, [...] soudain je les revois, ces trois-là, casques à visières plexiglas, matraque en main et brodequins militaires, monter à l'assaut de nos barricades cependant qu'on braille l'Internationale et qu'on n'a peur de rien parce qu'on est Rimbaud et Verlaine et que la vie est à nous bien sûr ! Merde, je me dis, Wall Street & Co n'ont pas pris une ride, mes oeufs attachent au fond du poêlon, café bouillu café foutu et tout est à recommencer.
Autin-Grenier Pierre.- Toute une vie bien ratée.


Et moi qui depuis ce matin ne suis pas fichu de mettre la main sur mes lunettes sans doute quelque part égarées dans le désordre de mon gourbi. [...]
   Vous comprenez, je me dis comme ça, tout au long de la journée : handicapé par la perte de ces lunettes, voilà pourquoi je n'ai pas lu l’œuvre complète de Mikhaïl Aleksandrovitch Bakounine, ce qui maintenant m'éclairerait certainement le cœur que j'ai toujours eu emmitouflé de noir. Faute d'avoir pu déchiffrer en gros caractères les lettres de Gérard, je lui ai répondu tout de travers et depuis, entre nous, c'est vogue la galère ! Avec mes lunettes, sans doute aurais-je bien vite percé à jour les jeux de prince de ce jeune frisé avec qui ma femme est partie pour Dieu sait où et sans justes raisons. Il aurait suffit de peu de chose, en somme, pour faire aujourd'hui de moi un être différent et drôlement plus fréquentable que je ne le suis à présent.
   Et puis tombe le soir et, ne le croyez pas si vous voulez : je m'aperçois que depuis l'aube je trimballe ces lunettes soit disant perdues sur le bout de mon nez ! En fait, c'est à faire changer les verres pour des plus appropriés à ma mauvaise vue qu'il aurait fallu. Mais c'est trop tard maintenant et terriblement [...]. Finalement, tant de choses essentielles pour notre propre vie si longtemps nous échappent que c'en est, après tout, et sans pour autant désespérer, tant pis.
Autin-Grenier Pierre.- Toute une vie bien ratée.


lundi 20 novembre 2017

La dose de Wrobly : brumaire 2017 EC


   - Pierre Autin-Grenier.- Toute une vie bien ratée.

   Impardonnable je suis ! J'ai oublié Pierre Autin-Grenier dans la photo de groupe ! C'est pourtant le seul original. Les autres c'est un peu du réchauffé. Lui je le découvre. Il faut dire que le livre est tout petit, mais ça n'excuse rien. Ce sont des tranches de vie quotidienne désespérée mais pleines d'humour. J'ai pensé à Pierre Desproges dans le pointage de l'absurdité des petites et des vertigineuses choses de l'existence, en plus poétique, plus surréaliste, moins rythmé dans l'humour. Et en beaucoup plus alcoolisé. Plus littéraire. Un peu à Woody Allen aussi, en plus provincial. Bref, un petit livre amusant qui me donne envie d'aller plus loin...


   - Gaston Leroux.- Le Château noir.

   Après l'Essonne et sa chambre close, Menton et son château fort surprise, Saint-Pétersbourg et ses nihilistes, nous voici en 1912 entre Bulgarie et Turquie avec le petit reporter, à l'âge d'or des fantasmes liés à son métier. Là on n'est plus dans le polar, mais dans l'aventure, on se croirait dans un des premiers Tintin. Je poursuis l'intégrale.


   - Arthur Rimbaud.- Poésies.

Une tache de populace
Les brunit comme un sein d'hier ;
Le dos de ces Mains est la place
Qu'en baisa tout Révolté fier !

Elles ont pâli, merveilleuses,
Au grand soleil d'amour chargé,
Sur le bronze des mitrailleuses
A travers Paris insurgé !


   - Marcel Aymé.- Antoine Blondin.

   Entre Alphonse Allais et François Rabelais, je trouve, Marcel nous parle de la vie d'Antoine Blondin de manière loufoque, voir fumiste, si ce n'est farfelue, sans rien nous apprendre de sérieux de la biographie de l'auteur de l'Europe buissonnière. Savoureux comme d'hab', mais là ça se lit très vite, il s'agit d'un petit recueil de quelques articles.



vendredi 17 novembre 2017

Un charme discret qui fouette sacrément

   Bunuel a beau être un de mes cinéastes préférés, je n'avais encore jamais vu celui-ci. C'est chouette de pouvoir encore découvrir, par hasard, des œuvres d'un artiste qu'on aime. C'est l'intérêt d'être passé à côté d'une "intégrale", pour moi qui, assez maniaque et toqué, ai tendance à une inclination certaine pour ces totalisantes séries.


   Ici, voyeurs coquins que nous sommes, nous assistons avec ravissement à la séance de torture qu'inflige Bunuel a une brochette de bourgeois, fantastiquement coincés dans une pièce d'un château en tenues de soirée. Et ça dure. 


   Comme on aimerait voir Macron, son ministère et un panel choisi de membres de l'oligarchie qu'il sert si bien, ce frais mais déjà rance boy-scout du Capital, avec bien sûr conjointes et conjoints, se retrouver dans la même situation et subir le même châtiment, comme disait Hugo à propos d'un autre mégalo. 


   Ça les ferait peut-être réfléchir à la promiscuité mortelle et dégradante que leur malfaisance impose aux personnes confinées sur un radeau de migrants, dans le cul de basse-fosse d'une prison, un centre d'hébergement pour miséreux, un centre de rétention, un hôpital vétuste, une maison de pauvres vieux, etc., etc....

   Ma dernière actu ciné.

mercredi 15 novembre 2017

Lutter contre la réforme du travail oui mais comment lutter ?

Allez, je me lance. C'est vrai que c'est un peu le stade suprême d'être militant, c'est mieux d'être radical, mais comme je ne sais pas faire (ni assez libre ni assez dynamique ni assez jeune ni assez courageux), je me suis dit que plutôt que de critiquer sans rien faire, je pouvais, à mon petit niveau, participer quand même. J'ai donc participé à l'écriture de ce tract collectif avec des potes encore prisonniers du boulot, comme moi. Merci à Ludwig, qui m'a tendu la perche. On se voit demain les aminches ?



Pas d’appels locaux unitaires dans les entreprises

Depuis de longs mois, de nombreuses mobilisations sont organisées, avec des manifestations nationales ou locales, mais malgré ces initiatives il est nécessaire de constater que le rapport de force demeure favorable au patronat et au pouvoir et il est donc nécessaire de s’interroger sur la stratégie suivie. Pas d’appels locaux unitaires dans les entreprises

Contrairement au mouvement de 2016 contre la loi travail où une large intersyndicale avait permis une forte mobilisation, aujourd’hui, les centrales jouent de nouveau la division. FO a rejoint la CFDT dans le camp de la conciliation, ce qui déstabilise la base qui n’avait pas besoin de ça. Dans les boîtes par ailleurs, les rares AG convoquées ne rassemblent qu’une poignée de militants, laissant la majorité des collègues indifférents. Même les syndicats se définissant comme offensifs (CGT) donnent les informations au compte-goutte et la propagande reste largement insuffisante. Chacun fait cavalier seul.

Pas de volonté de construire à la base un véritable mouvement

Quelques opposants CFDT à Berger qui manifestent, des corporations (routiers) qui bloquent et négocient dans leur coin, Mailly qui rencontre Macron et Pénicaud en cachette, à Renault les jours d’action la CGT appelle... à 2 heures de grève en fin de journée, des manifestations saute-mouton incapables de rassembler tous les acteurs du mouvement social, les souvenirs des répressions policières des journées d’action contre la loi El Khomri. Difficile dans ce contexte de construire les fondations d’un véritable mouvement social. Et pourtant les raisons de se mobiliser ne manquent pas :

- les ordonnances vont faciliter les licenciements et dégrader les conditions de travail ;
- baisse des APL jusqu’à 60 euros par mois ;
- état d’urgence inscrit dans le droit commun qui met gravement en danger nos droits, nos libertés ;
- 150 000 contrats aidés supprimés ;
- retour au service militaire.

Il s’agit d’un recul de 70 ans de conquêtes sociales. Imposons le dialogue sur notre lieu de travail, dans la rue, dans les AG, comité, créons des sections syndicales dans nos entreprises, participons aux manifestations afin de construire une contestation permanente pour que naisse un véritable rapport de force.

Appels répétitifs à des journées de 24 heures qui démobilisent. Il s’agit d’appels en fait à perdre une journée de salaire car chacun a conscience que 24 heures ne fera pas plier le pouvoir.

Des manifs éparses sous les sonos pour étouffer la colère, des SO qui renforcent les escadrons des cognes, une bureaucratie syndicale qui n’écoute pas la base... mais cela ne nous surprend pas. On manifeste pour retrouver les copains ou copines, rompre pour 24 heures notre aliénation quotidienne. Beaucoup d’entre nous sont conscients que ça ne fera pas plier le pouvoir et les mobilisations se réduisent lorsque les moyens ne nous le permettent plus. Construisons la désobéissance dès le 16 novembre dans la lutte prolongée pour faire reculer le gouvernement.

Constat d’une inertie de nombreux salariés indifférence, manque d’informations ?

Le réactionnaire Macron poursuit sa casse sociale soutenu par toute la clique merdiatique qui appartient aux milliardaires en martelant leur propagande (croissance, chômage, sécu, casseurs, terrorisme, Ceta, pollution...). Maintenus dans la peur, la soumission, l’idéologie consumériste et l’illusion du chacun pour soi, nombreux sont ceux et celles qui se désintéressent, qui abandonnent, voire ne sentent pas concernés par la contestation sociale. Proposons aux gens de reprendre la parole et la main sur nos luttes et nos activités autogestionnaires. Sortons du « ghetto » militant, ouvrons au maximum le dialogue (tel Nuit debout), créons des espaces de dialogue et d’actions.

Seule une grève reconductible pourra bloquer l’économie

Les rares blocages ont vite été évacués par les CRS. On comprend qu’il ne faut pas que ça fasse tâche d’huile. En effet le blocage et la grève reconduite permettraient la paralysie économique obligerait le gouvernement à reculer. Faisons leur revivre 1995, multiplions les blocages, piquets de grève sur nos lieux d’entreprises pour déborder leurs chiens de garde.

Il ne s’agit pas de compter les manifestants mais bien d’agir pour enraciner la lutte dans les entreprises ce qui implique la construction d’intersyndicales ouvertes aux non syndiqués et réalisées localement. L’alternative ne surgira pas de tentatives pour constituer des états-majors avant-gardistes mais bien du travail qui doit être fait dans les quartiers comme dans les établissements. Même si la situation y est difficile, même si nous sommes à contre-courant, il n’y aura pas de raccourci. Le jour où l’on recensera le nombre d’entreprises en grève et non plus le nombre de manifestants un grand pas aura été fait.

Faire la jonction avec le mouvement dans les facs/lycées

Les lycéens et étudiants sont les futurs salariés. Ils sont donc également concernés par cette réforme. Leurs mobilisations ont souvent prouvé leur efficacité (68, CPE, volonté d’exprimer une radicalité en tête de cortège). Ils sont forces de liberté et de créativité. Les banlieues, dont les habitants représentent la frange la plus pauvre du salariat (du chômage ou des minima sociaux), seront elles aussi durement touchées par ces reculs sociaux, et pourraient, en rejoignant le mouvement, donner un poids supplémentaire à celui-ci.

Nous luttons donc nous sommes ! 

lundi 13 novembre 2017

Enfance, printemps de la vie

   L'Enfance a ses répits que l'homme ne connaît plus. Les fauves sont en nous. Il faut dormir debout une hache à la main.
René Fregni

                                                             L'été
Surtout, vaincu, stupide, il était entêté
A se renfermer dans la fraîcheur des latrines :
Il pensait là, tranquille et livrant ses narines.
Arthur Rimbaud




   Les enfants sont hautains, dédaigneux, colères, envieux, curieux, intéressés, paresseux, volages, timides, intempérants, menteurs, dissimulés ; ils rient et pleurent facilement ; ils ont des joies immodérées et des afflictions amères sur de très petits sujets ; ils ne veulent point souffrir de mal, et aiment à en faire : ils sont déjà des hommes.

Jean de La Bruyère.- Les Caractères.


Elle a pas mal de succès, en général c'est pour moi plutôt un passif, mais à chaque écoute de Youn Sun Nah mes canaux émotionnels se mettent en crue malgré que j'en aie. Ici sur une chanson de Lou Reed que je ne connaissais pas, ayant encore beaucoup à apprendre de Lou Reed.

vendredi 10 novembre 2017

Les chansons dont vous n'aviez jamais compris les paroles II

   J'ai réentendu cette chanson sur mon petit transistor de salle de bain la semaine dernière. Une version publique. Je ne l'avais jamais autant appréciée : ce rythme de caisse claire un peu militaire du début me faisant battre la mesure en exultant malgré moi (qui suis censé abhorrer la musique militaire), et puis les arrangements musicaux et la voix rocassée, s'envolant parfois, portée par l'enthousiasme du swing (mot d'ancien français inusité aujourd'hui, signifiant "groove" en français moderne), d'Arno. J'étais tout chose en enjambant la baignoire. Un peu d'effet madeleine aussi, certainement.

   Non seulement je ne comprends rien aux paroles (le début pourrait faire penser à un Salut à toi belge, cette hypothèse est cependant vite invalidée), mais en plus j'avais mal compris certaines d'entre elles : j'entendais "pour les bons citoyens" pour "pour mon sissoyen". D'ailleurs j'en suis encore à me demander comment cela est possible, puisque la version erronée a six pieds quand le syntagme correct n'en a que cinq. Ô ! Merveilles enchanteresses de la poésie !

   Je vais encore avoir du mal à me faire à cet ébranlement de mes habitudes auditives et verbales. Cela dit quand je ne comprends rien, je trouve souvent cela encore plus beau, s'ajoute à toutes les qualités tant musicales que poétiques del'oeuvre, le mystère qui, tout bien pesé, reste encore la vacance la plus apte à s'emplir de chatoyances imaginaires, comme la boîte du mouton.



Mon sissoyen

En silence
Je danse ma dernière danse
Je l'embrasse partout
Peuvent choisir où où
On parle avec les mêmes
On baise avec les autres
On danse avec les mêmes
On baise avec les autres

Je chante et je danse pour les iraniens
Je chante et je danse pour les vietnamiens
Je chante et je danse pour mon sissoyen
Il est dressé vers le ciel
Comme la Tour Eiffel

Merci pour tout
Merci pour rien
Merci pour m'avoir vu
Merci pour être ton chien
Merci pour tes fausses illusions
Merci pour l'amour
Qui ne rime malheureusement pas
Avec toujours

Je chante et je danse pour les iraniens
Je chante et je danse pour les vietnamiens
Je chante et je danse pour mon sissoyen
Il est dressé vers le ciel
Comme la Tour Eiffel

Allez allez
Circulez
Here we go

Adieu les lois martiales
Adieu mes rêves
Adieu mes soeurs
Adieu mes frères
Goodbye au revoir I've been a nice boy
Goodbye au revoir I've been a good boy

Je chante et je danse pour les iraniens
Je chante et je danse pour les vietnamiens
Je chante et je danse pour mon sissoyen
Il est dressé vers le ciel
Comme la Tour Eiffel

Je chante et je danse pour les iraniens
Je chante et je danse pour les vietnamiens
Je chante et je danse pour mon sissoyen
Il est dressé vers le ciel
Comme la Tour Eiffel

mercredi 8 novembre 2017

Un bibliopathe


   Enfin, [...] j'entrai dans la bibliothèque. Cet évènement considérable arriva un jour de pluie. En m'introduisant dans le sanctuaire redoutable, mon oncle me tint ce discours :
   - Tu vois !... Ce sont des livres !... Et ces livres contiennent tout le génie humain... Les philosophies, les systèmes, les religions, les sciences, les arts sont là... Eh bien ! mon garçon, tout ça ce sont des mensonges, des sottises, ou des crimes... Et rappelle-toi bien ceci... l'émotion naïve qu'une toute petite fleur inspire au coeur des simples vaut mieux que la lourde ivresse et le sot orgueil qu'on puise à ces sources empoisonnées... Et sais-tu pourquoi ?… Parce que le cœur simple comprend ce que dit la toute petite fleur, et que tous les savants, avec tous les philosophes, avec tous les poètes, en ignoreront toujours le premier mot… Les savants… les philosophes… les poètes !… Peuh !… Ils ne servent qu’à salir la nature de leurs découvertes et de leurs mots, absolument comme si, toi, tu allais barbouiller un lys ou une églantine avec ton caca !… Attends, attends, mon garçon, je vais te dégoûter de la lecture… Et ça ne sera pas long !


   Il monta sur un escabeau appliqué contre les bas rayons de la bibliothèque, et prit un livre, au hasard.
   - L’Éthique, de Spinoza. Voilà ton affaire.
   Étant redescendu, il me remit le volume, non sans avoir tapé sur les plats, à plusieurs reprises, de la paume de sa main.
   - Assieds-toi, près de la petite table, là-bas… et lis, à haute voix, à la page que tu voudras.
   Mon oncle s’enfonça dans son fauteuil, croisa ses longues jambes l’une sur l’autre, ses longues jambes maigres et pointues, dont les genoux atteignaient l’axe du menton. Et la tête renversée en arrière, le bras droit posé sur l’accoudoir, le gauche pendant, il ordonna :
   - Commence !
   D’une voix incertaine, ânonnante, je commençai la lecture de L’Éthique. Ne comprenant rien à ce que je lisais, je bredouillais, commettais à chaque ligne des fautes grossières… Mon oncle ricana d’abord ; peu à peu, il s’impatienta :
   - Fais donc attention, animal… Tu n’as donc jamais appris à lire… Reprends cette phrase…
   Et le voilà qui se passionnait. Il m’interrompait, tout à coup, pour émettre une réflexion, jeter un cri de colère. Le corps en avant, les deux poings crispés sur les bras du fauteuil, les yeux brillants et farouches, tels que je les avais vus, à son arrivée à Coulanges, il semblait menacer le livre, la table, et moi-même. Et il se levait, tapant du pied, vociférant :
   - Il trouve que nous n’avons pas assez d’un Dieu !… Il faut qu’il en fourre partout… T’z’imbéé… cile !

Octave Mirbeau.- L'Abbé Jules.

lundi 6 novembre 2017

Un martien

   Cette fois je ne me ferai pas avoir, c'est bien ici que j'ai entendu pour la première fois cet OVNI, dans un de mes opus préféré de cette émission que vous connaissez bien si vous suivez un peu ce blog. Surprenant, rigolo. Et puis un jour, j'ai entendu quatre autres créations de cet excentrique artiste : Gontran, Une bonne guerre, Un bourgeois qui pète à table et Alexandre. De plus en plus bizarre, parfois plus si amusant, un peu plombant même... Mais intéressant. Je ne l'ai pas mis dans la rubrique "Les chansons dont vous n'avez jamais compris les paroles", parce que celle-ci est attribuée à des titres connus, entendus et réentendus, sans que l'a réécoute n'amène plus de compréhension. Ici, c'est découverte absolue. Je ne sais d'ailleurs pas ce qu'est devenu cet original inventeur. Bonne écoute.

Le tubercule par quoi tout à commencé