mercredi 31 janvier 2018

Lutte anti-patriarcale : un nouveau truc malin

   Comme vous devez le savoir si vous êtes attentifs à ce blog, j'épouse la cause féministe. Tout en restant fondamentalement un dominant, bien sûr, on n'efface pas 5 000 ans d'histoire, auxquels je peux aisément rajouter sans trop de risque de me tromper 7 000 piges de néolithique, et une éducation de garçon par des bons sentiments et des intentions généreuses. Mais, malgré cela, je pose certains actes (je ne me contente pas de vœux pieux, ah ça non !), certains ont d'ailleurs fait l'objet d'articulets de ce blog et je vous invite à vous y reporter.

   Ce que vous ne savez pas, en revanche, c'est que pour donner une cohérence à ma lutte, j'ai arrêté le sexe avec une autre personne. Notamment ma compagne. Je suis depuis plusieurs années abstème en ce domaine. La relation hétéro-sexuelle est aussi par trop ambiguë, et toujours, malgré qu'on en aie, elle reste empreinte de traces de sperme patriarcales. Ainsi, quand au milieu des transports les plus haletants je déclarais à ma moitié (rien que ce terme pue la phallocratie) : "Oh ! t'es bonne ma poulette" : il ne faut pas être sorti des Femen pour comprendre que cette comparaison est fort humiliante. De même, dans une intériorisation de sa condition subalterne mon amie, au plus fort de l'échauffourée, me scandait "Fais moi mal ! Wrobly ! Wrobly ! Wrobly ! Chuis pas une mouche !!!". Il n'y avait donc pas photo, un grand stop ! s'imposait pour mettre en adéquation mon éthique et mes tocs.

   Cependant, l'homme a des besoins, même s'ils ne sont point si impérieux qu'ils puissent justifier la moindre indélicatesse faite aux femmes, comme le dit bien Claude Guillon, que je suis sur ce point. Mais, il est quand même travaillé à l'occasion de quelques pulsions taquines, l'homme. C'est pourquoi, taillant bien mal une certaine cote, je décidai de conserver malgré tout une sexualité onaniste. Mais comment stimuler mon imagination hétérosexuelle normée sans retomber dans la machisme pornographique, qu'il soit commercial ou purement imaginatif ? Simple : non contente d'être solitaire, mon érotomanie serait solidaire, bio, vegan et de surcroit, équitable !

   A défaut désormais de m'autoriser à goûter les fruits de l'amour, je découvris l'amour des fruits, grâce à l'artiste américaine Stéphanie Sarley, et depuis, je puis dire, et je le disais encore à ma concubine qui lessivait la cuisine l'autre jour pendant que je surfais sur des sites féministes, mais elle n'entendait rien, elle venait de lancer une lessive et le bruit de la machine c'est infernal, c'est un peu pénible de ne pas pouvoir bénéficier de toute l'attention qu'on pourrait penser mériter, avec tous les efforts que je fais... ; je puis dire, donc, que je vis désormais une sexualité épanouie et sans la moindre cruauté !

   Et en plus je partage mes bons plans ! Merci qui ?





lundi 29 janvier 2018

Quand José Bové chantait

    On sait que le preux activiste de la Confédération paysanne, faucheur d'OGM et déboulonneur de Maquedeaux s'est englué dans la politique politicienne. Ce que l'on sait moins, c'est que l'illustre et héroïque moustachu a commencé dans la chanson. Séquence nostalgie insolite.

vendredi 26 janvier 2018

Etat de droit

La première bataille : loger tout le monde dignement. Je veux partout des hébergements d'urgence. Je ne veux plus de femmes et d'hommes dans les rues, dans les bois.
Emmanuel Macron



LE RACCOMMODEUR DE FONTAINES

                                          A l'heure où le cœur se délabre,
                                          Où l'estomac est mal rempli,
                                          Le gaz meurt dans le candélabre ;
                                          Paris d'ombre est enseveli ;

                                          Sur le pavé sec et poli
                                          Passe un long cheval qui se cabre,
                                          Portant sur son dos assoupi
                                          Un spectre grimaçant et glabre.

                                          Dans un vieux clairon tout cassé,
                                          Sous son suaire de futaine,
                                          Il pousse une note incertaine.

                                          C'est le squelette encore glacé
                                          Du raccommodeur de fontaine
                                          Qui mourut de froid l'an passé.


LE PAUVRE DIABLE

Père
Las !
Mère
Pas.

Erre
Sur
Terre...
Dur !...

Maigre
Flanc,
Nègre
Blanc,

Blême !
Pas
Même
Gras.

Songe
Vain...
Ronge
Frein.

Couche
Froid,
Mouche
Doigt ;

Chaque
Vent
Claque
Dent.

Rude
Jeu...
Plus de
Feu !

Rêve
Pain
Crève
Faim...

Cherche
Rôt,
Perche
Haut,

Trotte
Loin,
Botte
Point.

Traîne
Sa
Gêne,
Va,

Pâle
Fou,
Pas le
Sou !

Couve
Port
Trouve
Mort !

Bière...
Trou...
Pierre


Sale
Chien
Pâle
Vient,

Sur le
Bord,
Hurle
Fort

Clame
Geint
Brame...
Fin !

mardi 23 janvier 2018

Gna plus d'rigolade

   C'est ce qu'on se disait sous la douche hier soir avec un pote dentiste dans une petite ville prospère de banlieue. Lui parlait de la télé, qu'il ne regarde pas beaucoup mais assez pour le constater. Et sa nostalgie allait vers Louis de Funès, quand sa voiture se retourne et se transforme en bateau, me contait-il en se savonnant la brioche, ou alors les Bronzés, surtout quand l'autre est sur le télésiège (pour être honnête je dois avouer que quand j'étais môme j'ai aussi rigolé de telles farces). J'opinai, sur un pied, en me récurant la plante de l'autre. Et même si je ne suis pas usager de cette technologie de diffusion utilisée pour transmettre des images à distance par voies hertziennes captées par une antenne ou un câble, je concédais que j'avais moi aussi l'impression, mon bon monsieur, qu'on ne riait plus guère de nos jours, en tout cas je ne connais aucun humoriste qui ne soit déjà décédé. Élucider sur quel compte mettre ce constat sociologique nécessiterait un long développement, et je n'en ai malheureusement ni le temps ni le talent.

   Pourtant déjà, il y a 11 jours, des collègues me faisaient découvrir Samia Orosemane, et ça m'avait bien fait convulser les zygomatiques. Et là, ce matin même, à la radio, en me lavant les crochets, j'entends un sketch d'un autre inconnu, Wally Dia, et là aussi, j'ai été la proie de gais hoquets. Comme ça fait du bien, j'invite. Je pense que ces comiques sont très connus des téléspectateurs et hors les trois sketchs écoutés, je ne sais rien d'autre d'eux, mais c'est pas grave, on complètera peut-être plus tard.

   Quand te reverrai-je, pays merveilleux où ceux qui s'aiment vivent à deux ?


vendredi 19 janvier 2018

La dose de Wrobly : nivôse 2017 - 2018 EC

Wroblewski fut d'une grande sobriété ce mois-ci.


   - Charles Baudelaire.- Œuvres complètes.
   C'est parti pour la totale, crénom !


   - Gaston Leroux.- Rouletabille à la guerre II : les étranges noces de Rouletabille.
   C'est parti pour la suite ! Une sacrée boucherie que cette guerre des Balkans en 1913, les noces de Rouletabille sont rien plus sanglantes que celles de Figaro ! Ces bulgares, ces slaves, ces turcs, ces orientaux quoi, quels barbares ! Heureusement que l'année suivante, la civilisation occidentale a su montrer ce que c'est qu'une guerre propre.


mercredi 17 janvier 2018

Morts tôt : "killant" 9 !

Je reproduis ici le contenu d'un mail que m'a envoyé l'Orchestre national de Paris.



Il existe en théâtre ou en musique toutes sortes de superstitions. Connaissez-vous celle de la Symphonie n° 9 ?


Alors que Mozart ou Haydn écrivent respectivement environ 40 et 100 symphonies, Beethoven va révolutionner le genre : il chamboule les quatre mouvements traditionnels, ajoute un chœur, intensifie les possibilités de l'orchestre… La neuvième symphonie qu'il écrit est un triomphe, mais elle sera sa dernière. C'est le début de la "malédiction de la neuvième" !

Qui sont les victimes ?

La première est le jeune Franz Schubert. Admiratif de Beethoven considéré comme le plus grand musicien du temps, il porte le flambeau lors de ses obsèques publiques mais meurt brutalement l'année d'après, au moment où il achève sa Grande Symphonie en ut majeur, la n° 9 justement ! Ce numéro porterait-il malheur ? Quelques années plus tard, la malédiction continue avec Antonín Dvořák qui n'a pas le temps d'aller plus loin que sa Symphonie n° 9 "Du nouveau monde" !


Comment contrer la malédiction ?

Très superstitieux et sentant que le chiffre 9 peut lui être fatal, Gustav Mahler recourt à un subterfuge lorsqu'il achève sa Symphonie n° 8. Il compose Le Chant de la Terre, véritable symphonie, mais il ne la comptabilise pas comme telle ! Croyant avoir déjoué le mauvais sort, il se met donc à écrire une nouvelle symphonie, la n° 9. Mais il meurt au moment où il commence la suivante. Il semble impossible d'échapper à ce destin, la figure de Beethoven plane…

Ne lisez pas ce livre : il est issu de la boutique du M.I.T., où les esprits créatifs s'adonnent aux joies de la littérature de demain.

Le cas Anton Bruckner

Le compositeur autrichien vit dans l'admiration de Beethoven et Wagner. Alors qu'il essuie de nombreuses critiques durant l'élaboration de sa Symphonie n° 8, il est quelque peu découragé avant de se remettre à la tâche. Il va finalement mourir pendant l'écriture du 3ème mouvement de sa symphonie suivante, la neuvième… Des musicologues ont tenté de reconstruire la suite, mais il est de coutume de s'arrêter sur ce troisième mouvement, un Adagio poignant qui est en train d'annoncer les audaces harmoniques et stylistiques du nouveau siècle.


Incapables de dépasser Beethoven, personne n'ose aller au-delà du chiffre 9. Chostakovitch le fera en 1953 avec sa Symphonie n° 10, il en composera 15 au total !

Vous pouvez écouter... à vos risques et périls. La maison décline toute responsabilité etc.


ACTU :

Attention, c'est le 10...

lundi 15 janvier 2018

Le parvis de la gare de Denis

9 janvier 2018



   Vous me direz, c'est désert, c'est mort. Eh bien habituellement ça grouille de monde, il faut zigzaguer pour atteindre la gare. Mais là, non seulement il pleut, mais c'est truffé de bleu marine et de vert de gris, forcément. Tous les petits vendeurs, qui de brochettes (dans ce cas-ci j'annule toutes mes préoccupations végétariennes), qui de maïs grillé (dans ce cas-là je suspends mes réserves anti-OGM), qui des cartes pour appeler le bled, qui des Marlboro (qui doivent bien faire saigner les poumons au bout de quelques paquets, mais dans ce cas précis...)... et puis des clients, des passantes, des tchatchant, des voyageurs... La police fait le ménage : harcèlement de tous ces petits travailleurs, interdiction de leur laborieuse présence, le libéralisme économique, c'est bon pour les Mulliez (30 milliards en 2017, reprenez-moi si je me trompe de quelques centaines de milliers d'euros, ou d'année), mais là non, il y a des règles Monsieur ! Alors, retour aux minimas sociaux, au deal de produits prohibés et dangereux, à la rue et à la manche (tu sais, disait une administrative de la gendarmerie à mon fils qui est toujours très choqué de voir les damnés du métro demander quelques centimes, ils n'en ont pas tous besoin : ah ! bon, ils font ça pour le plaisir alors ! ou alors pour faire du profit et investir en bourse ou dans la résidence secondaire ? et moi qui ai encore filé un euro hier !). Bref, faut pas être assisté, faut pas travailler, faut pas vendre de la drogue, faut pas faire la manche, faut pas être en France, faut pas camper au bord du périf' ou sous le métro, pas s'allonger sur les bancs... Pas facile d'être pauvre ! Et bronzé.


   Cet appareil fonctionne vraiment mal, pourtant c'est pas un smartphone, c'est un vrai appareil numérique. La photo met un temps dingue à se déclencher. Du coup, comme je flippe vu l'insécurité de la place (les bleus et verts-de-gris cités plus haut, police, contrôleurs et autres miliciens si c'est pas assez clair), j'ai baissé mes mains pour regarder autour de moi. Voilà le résultat. S'il y a des photographes parmi nos lecteurs, nous sommes preneurs de tout conseil.


   Y a un rassemblement prévu mercredi soir je crois, l'affiche a été enlevée, contre la chasse, l'expulsion, la répression de tous ces marchands (quel paradoxe, v'là qu'on défend les marchands !). Les agents de nettoyage on remporté une victoire, pourquoi pas les animateurs de cette charmante place ?


   Dans ce canal (après la rambarde au fond, avant les immeubles), le canal Denis, de nombreux algériens furent jetés par les bleus marines (voir ci-dessus), non épurés après la Libération (l'ont-ils été depuis ?), et se noyèrent pour ceux qui n'étaient pas déjà morts, le 17 octobre 1961. A cette époque, c'est la nationalité qui était mise en avant pour motiver la chasse. En 40, c'était plutôt la race, l'ethnicité, les gènes. Quand j'étais minot, c'était la délinquance, les sauvages des cités, c'est à dire les arabes, noirs, voir roms qui eux logeaient plutôt près des décharges, étaient dangereux : qui est-ce qui fout la merde ? me demandait pour preuve une bonne conscience de gauche à l'époque (paix à sa mémoire), sans complexe et sûr de son fait. Remarquez ce critère on peut encore le retrouver, lisez Valeurs actuelles, entre autres.
   Je ne parlerai pas de ce qui déclenche le stigmate de nos jours, trop clivant.

   En revanche, si l'ami photographe qui nous lit peut me dire pourquoi il y a des fantômes sur cette photo, et plus généralement pourquoi toutes mes photos nocturnes sont mauvaises (celles de journée ne sont pas très bonnes non plus), je suis preneur une fois de plus ; peut-être un paramétrage à faire, je ne comprends rien à ce bidule, à part qu'il faut appuyer sur le bouton qui déclenche la photo. 


   Un peu plus de temps en ce moment, j'ai donc le loisir de vous annoncer la prochaine émission de jazz :

Jeudi prochain l'émission Jazzlib' recevra le saxophoniste alto Pierrick Pedron pour la sortie de son nouvel album en quartet intitulé "Unknown".
Quelle station ? : Radio libertaire 89,4 FM
1er & 3e jeudis 20:30-22:00
Podcast : en panne
Ecoute en direct sur le site : http://rl.federation-anarchiste.org/ (si pas en panne).

   Par ailleurs, mais pas si loin que cela, je suis allé écouter l'un des plus grands pianistes du moment samedi, et ses comparses Diego Imbert et André Ceccarelli ne sont pas à la traîne. 


   Et un petit coup de Satie, dont on est fan ici également :

vendredi 12 janvier 2018

Les bons plans de Tulipine et Yamina*

   Bof ! Je sais plus quoi fiche sur ce blog. Heureusement les deux jeunes mamans avec qui je passe le plus clair de mon temps enfermé, Tulipine, franco-ivoirienne catholique et Yamina kabyle franco-algérienne musulmane, m'ont fait connaître il y a peu les vidéos des humoristes ci-dessous. Ne pratiquant pas la contemplation de l'écran de diffusion idéologique familial, et n'ayant pas le temps de hanter les cafés-théâtres, la vie est faite de choix cornéliens, je ne connais aucun jeune humoriste. J'en suis resté à Coluche et Desproges. Le fait que je sois contraint d'user de l'écran interactif idéologique en réseau détournable pour mes activités professionnelles me permet aujourd'hui de partager avec les vieux ou les aigris hargneux critiques du monde spectaculaire-autoritaire-marchand-anéantisseur à terme de toute vie sur terre tel qu'il va comme moi ces aimables divertissements. On n'est pas toujours d'accord avec ces collègues, mais j'avoue que là, je n'ai pas été sans sourire, c'est fort. Merci à elles, d'autant que j'ai déjà partagé ici l'un des bons plans indispensables transmis par Yami.

* Les prénoms ont été changés.






Rien à voir, mais en hommage

Et de trois, l'As de pique est en deuil, le brelan qui l'a créé didn't live forever :

lundi 8 janvier 2018

Figures de Montmerte - banlieue

   Il entra dans un café, commanda une absinthe. C'était le rendez-vous de ces peintres qui à ce moment-là épouvantaient le public. Ils étaient plusieurs, dans le fond, à discuter paisiblement autour d'une table. Il y en avait un grand, imposant, avec une barbe de fleuve ; un autre, roux, le nez tordu, le regard bizarre et perçant ; un autre encore, la figure presque cachée par les poils, coiffé d'une étrange casquette à rabat et un quatrième, avec une petite barbiche en pointe. Ces peintres avaient nom :










Pissarro.









Van Gogh.









Sans sa casquette : c'est Cézanne.









Un peu avant la barbichette en pointe... Signac.


Pour agrémenter notre lecture, j'invite le lecteur joueur à deviner le nom de ces artistes. Pour l'aider, je situe l'année de la scène : 1888, en plein boulangisme. Les œuvres des rapins d'alors valent aujourd'hui des sommes vertigineuses, puisque les marchands donnent des prix à ce qui n'en a pas.

[...]

   Quelque temps plus tard, le quartier était en émoi... On démolissait la Reine Blanche ! La façade du vieux bal était maintenant dérobée aux regards des passants par des affiches vantant les pastilles Géraudel et la Saxoléïne, le meilleur pétrole pour les lampes.
   Le café d'en face était tout remué. Pour le garçon, c'était une distraction offerte à ses soixante-dix ans... Quant aux peintres, ils ne décoléraient pas. Le vieux Montmartre s'en allait car ils sentaient bien que cette transformation n'était que les prémices d'autres bouleversements et que les vieilles rues qu'ils aimaient longer et fixer sur leurs toiles, allaient disparaître, au profit d'immenses bâtisses impersonnelles.
[...]
Le seul bruit qu'avait fait le Moulin Rouge avait créé nombre d'imitateurs. La butte et ses approches devenaient le point de mire de tous ceux qui voulaient monter un spectacle.
   C'était le ruée sur le moindre emplacement. Le prix du terrain montait en flèche. Les boîtes de nuit faisaient leur apparition. Un original, Maxime Lisbonne, ancien général de la Commune, qui revenait du bagne de Nouméa, amnistié par la récente mesure de grâce dont Rochefort lui-même avait bénéficié, venait de monter une sorte de cabaret qu'il appelait "Les Frites Révolutionnaires". On pouvait s'y faire servir, suivant ses convictions, par un garçon costumé en Naopoléon III, en Louis-Philippe, en François Ier ou même en général Boulanger. Un groupe financier parlait même d'ouvrir rue de Clichy, un grand établissement qui aurait nom : Casino de Paris.
[...]

L'ancien communard Maxime Lisbonne

   Ils repartirent vers Montmartre où Bruant venait d'ouvrir le Mirliton. Au moment où ils entrèrent, Bruant qui chantait, suivant son habitude, les mains dans les poches, s'arrêta. Il était de tradition quand un client arrivait, de l'accueillir par la scie habituelle :
      Oh, là, là, c'te gueule
      C'te poire, c'te binette,
      Oh, là, là, c'te gueule qu'il a !...
   Toute la salle se retournait, faisant chorus et le client ou le couple gêné se faufilait à sa place, tandis que Bruant leur décochait quelque épigramme. Quelquefois, le nouvel arrivant répliquait, faisant assaut d'esprit avec le chansonnier qui finissait toujours par avoir le dernier mot.
    [...] Nini, confuse, s'assit sur son fauteuil et prit la main du prince qu'elle garda une seconde tandis que Bruant reprenait "Nini-peau-de-chien" :

      A la Bastille, on aime bien
      Nini-peau-de-chien,
     Elle est si bonne et si gentille,
     On aime bien...

    Et toute la salle demanda en coeur :
   - Qui ça ?
   Bruant termina :
   - Nini-peau-de-chien ! [...]

   Là-bas, à l'autre bout de la salle, deux musiciens avaient encadré Esther. Ils étaient revêtus de haillons voyants. La jeune fille portait une robe très simple. Ils personnifiaient un groupe de chanteurs des rues... La beauté et la jeunesse d'Esther ne souffraient aucunement ni de la lumière trop violente, ni de cette pauvreté voulue, bien au contraire.
    Elle commença sa chanson... C'était une complainte de la rue, à la fois navrante et ironique :

      En haut de la rue Saint-Vincent
      Un poète et une inconnue
      S'aimèrent l'espace d'un instant...

   L'emprise d'Esther sur le public était certaine, l'émotion gagnait la salle... [...]

      La lune trop blème
      Pose un diadème
      Sur ses cheveux roux...
[...]



Extraits de French Cancan d'André Sfer, d'après le film.