vendredi 29 mars 2019

Vengeance, fuite, compassion et apartheid

  - Kurosawa Akira.- Les salauds dorment en paix (悪い奴ほどよく眠る, Warui yatsu hodo yoku nemuru), 1960.

  Vengeance dans le monde de la corruption. Une exposition sans complaisance de la connivence des élites technocratiques et managériales, ou de la corruption de la bureaucratie par les capitalistes, le tout virant franchement au maffieux. J'aime les histoires de vengeance, comme le Comte de Monte Cristo, ou Il était une fois dans l'ouest... A votre avis, ici, qui c'est qui gagne à la fin ?
  Le film m'a fait penser à un des thrillers politiques de Mocky, même si évidemment, si influence il y a, elle va du japonais au français. Mais ici, pas de nanar de série B (j'aime bien Mocky), mais une œuvre magistrale, une fois de plus. Avec Mifune Toshiro, encore ! Et Takashi Shimura, pour changer.



Mots clés : vengeance, capitalisme, mafia.


  - John Frankenheimer.- Seconds : L'opération diabolique, 1966.

  Un film bien glauque. Votre réussite sociale vous emmerde, une start-up vous propose un nouveau corps et une nouvelle jeunesse, mais faut mettre la main à la poche. Et attention, satisfait ou liquidé ! Dame, pour faire tourner la boutique, il faut bien des cadavres.


Mots clés : capitalisme, mafia, renaissance, chirurgie.


  - Verhoeven Paul.- Robocop, 1988.

"La guerre est belle, car elle inaugure le rêve d'un homme au corps métallique."
Filippo Tommaso Marinetti

  J'en avais marre des vieilleries culturelles. J'avais envie d'un film récent, d'action, grand public. Voilà, je l'ai eu. Cette dystopie ressemble aux USA post-11 septembre et surtout à l'occupation de l'Irak. L'action s'y déroule à Detroit, même si le film a été tourné à Dallas. La police et l'armée y sont quasiment privatisées. Une méga firme se gavant des fonds publics invente des armes de guerre, peu importe qu'elles soient ou non efficaces pour une politique de sécurité prétextée, du moment qu'elles sont très lucratives, et prétend nettoyer un quartier pauvre avec des vrais gros méchants dedans pour y construire un giga projet immobilier. Évidemment cette firme est liée à la mafia et au narcotrafic. Le film est aussi une satire des médias de masse, infos intox et pubs débilitantes, style BFM. Même l'agent immobilier est sur écran. Rajoutons à cela une touche de transhumanisme et constatons que nous sommes les deux pieds dedans.


Mots clés : vengeance, capitalisme, mafia, renaissance, Jésus, chirurgie.


  - Kurosawa Akira.- Barberousse (赤ひげ, Akahige), 1965.

"Il est intelligent... Il peut tout ; il sait tout... Il guérit les gens [...]. [...] Il n'est pas question [...] de médecine... [...] c'est un talent. Et un talent, sais-tu ce que c'est ? C'est la hardiesse, une tête saine, une large envolée... [...] De tels gens sont rares ; il faut les aimer... [...] il est quelquefois un peu grossier ; la belle affaire ! Un homme de talent [...] ne peut être un damoiseau. Songe quelle vie a ce docteur [...] ; un peuple grossier, sauvage ; tout autour, la pauvreté, les maladies ; et dans un tel cadre [...]...".
Anton Tchekhov.- Oncle Vania.

  Ce médecin, ici, c'est Barberousse (Mifune Toshiro, toujours !), qui non content de se consacrer à soigner les miséreux dans son dispensaire, est tout à fait apte à envoyer au tapis, seul, avec chacun sa fracture ouverte, une bande d'une quinzaine de sicaires et de maquereaux. On biche. Mais son éthique médicale et sa grande compassion lui feront demander à son apprenti d'apporter des planches pour faire des attelles à tout ce joli monde (pour celui qui a la mâchoire démise, il la lui remet en place immédiatement avec un jeu de poignet d'une rare élégance).

  Un film magnifique, terrible, émouvant, de plus de trois heures.


Mots clés : renaissance, chirurgie.


  - Annemarie Jacir.- Wajib : l'invitation au mariage.
  Une comédie à l'italienne dans la ville choisie également comme lieu de vie du jeune héros dans le conte de Jésus.
  

  Mots clés : Jésus.


  - Kurosawa Akira.- L'Ange ivre (醉いどれ天使, Yoidore tenshi), 1948.
  Dernière minute : je m'aperçois que je n'avais pas rendu compte de mon visionnage de l'Ange ivre. Un film noir, dont la fiction se déroule dans les ruines à peine reconstruites de Tokyo. Un médecin gros buveur va tenter de sauver un pégriot tuberculeux. Avec Mifune Toshiro et Takashi Shimura, de vieilles connaissances.

  Mots clés : Mafia, chirurgie.



  Ma dernière actu ciné.

lundi 25 mars 2019

No border

"[...] il vole son pain aux travailleurs qui se trouvent sur place".
Jean-Luc Mélenchon.


  Autant vous le dire tout de suite, mais vous avez sans doute pu le constater si vous suivez un peu ce blog, le Vladimir Ilitch, cette girouette dictatoriale qui s'est servi des anars et des soviets pour mieux les faire liquider, et qui a contribué à transformer l'espoir révolutionnaire international en bruits de bottes et camps de travail, on peut pas trop le blairer ici. Mais comme son statut d'homme providentiel lui venait aussi de son aptitude à dire tout et son contraire, il a parfois pu exprimer des propos qui pourraient figurer en exergue de La Plèbe. Par exemple ceux-ci, découverts par hasard dans un journal de gauche (faut bien s'informer un petit peu de temps en temps).


  A propos des frontières et des progressistes qui les préconisent :
  "Nous pensons que l'on ne peut pas être internationaliste et en même temps favorable à de telles restrictions... De tels socialistes sont en réalité des chauvins."
1915.

  Et :
  "Il ne fait aucun doute que seule la pauvreté extrême peut contraindre les gens à abandonner leur terre natale, et que les capitalistes exploitent les travailleurs immigrés de la plus honteuse des manières. Mais seuls les réactionnaires peuvent refuser de voir la signification progressiste de cette migration moderne des nations. Le capitalisme attire les masses de travailleurs du monde entier. Il brise les barrières et les préjugés nationaux, et il unit les travailleurs de tous les pays."
1913.

  Mélenchon, qui a peut-être au demeurant le mérite de la franchise, n'a qu'à aller se faire cuire un œuf, à condition que la poule vive en plein air libre de ses mouvements, avec sa xénophobie et son nationalisme de gauche.

vendredi 22 mars 2019

La dose de Wrobly : ventôse 2019 EC


  - Anton Tchekhov.- La Cerisaie / Oncle Vania.
  On se souvient de ma dose de prairial 2018, pour laquelle j'avais boudé un bouquin de Tchekhov de la bibliothèque de ma compagne, faute de désir (pour le bouquin, je vous reparlerai de ma vie sexuelle une autre fois). Finalement, deux évènements m'ont fait revenir en arrière, éveillant un début d'érection littéraire à l'idée de prendre connaissance de l’œuvre dramatique de celui auquel je ne nie nullement la qualité de grand écrivain, mais que je n'ai jamais rencontré, voilà tout. C'est maintenant chose faite.
  Les évènements sont : 
  1- ma mère s'est offerte ses œuvres complètes pour ne pas mourir idiote, et 
  2- j'ai aperçu le personnage de Tchekhov himself dans un divertissement cinématographique auquel j'ai bien voulu accompagner ma petite famille, Monsieur Edmond. Pour ajouter au caractère incitatif de ces simples correspondances, il y eut la situation à la fois cocasse et hautement morale de son personnage dans la diégèse du film : 
  1- il est au bordel, c'est censé être rigolo ;
  2- mais il ne consomme pas, donc pas d'apologie de la prostitution ! On reste dans l'éthique libertaire.
  La pièce Oncle Vania commence bien, avec un humour de caractère rafraichissant, se poursuit un peu lourdement avec le personnage atrabilaire de Vania et des histoires d'amour (à mon âge, vous savez, pourtant je n'ai que trois ans de plus que Vania, ah ! misère !)... Je poursuis tranquillou...


  - Walter Benjamin.- L’Œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique (Das Kunstwerk im Zeitalter seiner technischen Reproduzierbarkeit).
  Walter Benjamin fait partie de mes légendes, c'est à dire des auteurs ou humains en général dont j'ai beaucoup entendu causer, et que j'aime déjà avant même de les avoir lus, vus, connus, en tous les cas pour lesquels j'ai un grand désir, inassouvi mais plein d'espoir de l'être un jour, on a tellement tendance à se croire éternels. C'est déjà un ami, par ce que j'en connais par la bande, en qui je pense pouvoir faire une totale confiance (quand en plus les noms qui papillonnent autour du sien dans les gloses diverses sont Adorno, Brecht, Horkheimer, et qu'on est vaguement conscient du tragique de sa fin, l'attirance en devient difficilement supportable). Et bien ça y est, je le rencontre enfin directement. Et je peux dire que, enfant de la reproductibilité technique des œuvres d'arts comme nous le sommes tous (et il y a eu internet plus tard), qui n'ai que rarement pu me confronter aux originaux mais ai fait mon miel de livres, de poches pour la plupart, de disques, de films et de photos, et de photos de peintures ou de sculptures, etc. - je peux dire que quand je finis par rencontrer via une reproduction une de mes légendes, cette reproduction (ici un livre de poche emprunté en bibliothèque), possède l'aura dont parle Benjamin à propos des œuvres d'art du passé, les originaux, authentiques, uniques ici et maintenant, et possédant dans leur matérialité toute l'histoire et toute la tradition de ce qui les a créés. Alors, cette aura, ce halo, cette énergie, cette vibration, ce magnétisme que semble posséder l'objet comme s'il était à cheval entre plusieurs dimensions spatio-temporelles, et cette émotion qui me prend quand je le saisis ne correspond peut-être pas au concept d'aura de Benjamin, ici c'est mon propre désir et son assouvissement après tant de temps, et le sentiment de toucher à quelque chose de grand, à une expérience unique, qui auréole l'objet imprimé (j'ai pu ressentir la même énergie en voyage, quand j'ai pour la première fois posé le pied hors d'Europe à 37 ans par exemple - dans ma famille on avait plutôt intégré le fait que l'avion était pour les riches - ou bien, et là ça rejoint Benjamin, en contemplant quelque œuvre originale ou arpentant quelque ville mythique (Berlin, Venise, Rome, Arleuf-en-Morvan), le fameux syndrome de Stendhal. Cette aura, je la ressens aussi à la vision de certains films, le cinéma étant pourtant pour Benjamin le type même de l’œuvre reproductible non seulement dans sa diffusion, mais dans sa définition même, dans l'essence même de sa production et de sa finalité, ou de certains disques. Alors, même si l'industrie de la culture fait de nous des consommateurs compulsifs, endoctrinés, aliénés et boulimiques (j'ai pensé à la Société du spectacle, qui paraitra 28 ans plus tard), parfois, de mon être, surgit une dimension surréelle (au sens des surréalistes, donc pas surnaturel, cultuel, magique ou religieux - comme les élans de Lascaux, les statues de Vénus de la cella des temples ou les toiles des madones des cathédrales [la cooccurrence ici d'un cervidé avec deux personnages féminins humanoïdes ne procédant absolument pas d'un lien de causalité ou de similitude mais étant purement fortuit ] - pas plus qu'au sens d'une théologie esthétique genre l'art pour l'art), un monde qui vient me bouleverser doucement mais profondément, et me donner envie que la vie entière prenne cette dimension, donc de la changer passionnément.
  Voyez comme un simple petit livre peut me rendre grandiloquent. "Pure mystique !" fulminerait Brecht "Malgré la posture antimystique. C'est donc ainsi qu'on adapte la conception matérialiste de l'histoire ! Il y a plutôt de quoi s'effrayer." Et il est certainement probable que de telles consolations sentant le romantisme faisandé ont plutôt comme résultat de m'éloigner du front, au contraire.
  Quant à Benjamin, il jugerait certainement que je n'ai rien compris à son livre, mais ça ce n'est pas grave, je me suis fait plaisir en attendant le collapse.

lundi 18 mars 2019

Retour aux fondamentaux

 J'ai peu évoqué Brassens sur ce blog, alors que cet immense poète, compositeur et chanteur fait partie de mon panthéon esthétique et éthique depuis mon enfance, voir avant. Mais précisément à cause de cette ancienneté, quand je me suis pris à ce nouveau passe temps numérique perruqé qu'est la rédaction d'un blog, je l'avais écouté déjà des milliards de fois, connaissant quasiment toutes ses chansons par cœur, y compris les reprises et inédits. Comme je parle ici plutôt de mon actualité, et que j'avais déjà tout pressé de ce fruit délicieux, je n'ai pas eu l'occasion de me resservir ici. Toutes proportions gardées, c'est comme pour Renaud Séchan ou le métal, à la nuance prêt que j'ai plus ou moins rompu avec ces deux amours d'adolescence, alors que Brassens est resté immortel pour moi comme il le restera pour la postérité.

 En général, je crois même que ça ne souffre pas d'exception si je suis honnêtes, je n'aime pas les interprétations de Brassens par d'autres. Ca ne colle pas, toute la magie de l'original disparait, l'aura n'est plus là pour parler comme Walter Benjamin, à propos d'un "original" que je n'ai finalement connu que par copies interposées : les disques et leur reproduction technique illimitée mais c'est un autres sujet qui sera peut-être effleuré ici plus tard. En ce qui concerne les reprises, celles de Ferré par exemple, immense interprète lui aussi, peuvent fonctionner du tonnerre de Dieu (à l'esprit me vient dans l'immédiat une version de Des armes par Noir Désir, le meilleur groupe bordelais après Camera Silens selon un ami qui se reconnaitra peut-être. Mais Brassens, même si les chanteurs sont plutôt sympas et bien intentionnés (Sam Alpha par exemple), pour moi en tout cas, ça fait flop. Je crois que la formule si simple en apparence mais si profonde contrebasse/guitare/voix y est pour beaucoup également. Ainsi, Brassens chantant avec une instrumentalisation différente, plus touffue, je n'aime pas trop non plus. 



 On sent malgré tout bien la patte de l'auteur compositeur anar dans ces deux chansons que l'ami Georges n'a jamais chantées lui-même, interprétés ici par Thomas Fersen et Bertrand Belin ! Mais... Il y aurait quand même une remarque à faire sur ces opus du sétois, et pas la moindre...

  Laquelle à votre avis ?

mardi 12 mars 2019

Emile Hœrrault est un sale type

 Comme par hasard !

 J'en avais ma claque de vivre dans la marginalité, d'être un paria. Désireux de rentrer au bercail de notre communauté nationale, et pour cela empruntant la voie la plus sûre, la Culture, je décidai d'envoyer des questions au jeu soixantenaire de notre radio nationale, le jeu d'Emile Hœrrault. Las ! c'était sans compter sur la coalition des comploteurs que l'on sait...
 Comme par hasard...
 Pas une seule, vous me lisez ? Pas une seule de mes questions n'est passée à l'antenne.
 C'est pourquoi je vous les propose ici, à vous à qui on ne la fait pas, vous qui savez...
 Les voici, amusez-vous bien. En restant vigilants toutefois car Ils ont tout prévu...

Question 1 :

La ville de New York, plus grande ville des Etats-Unis, est située dans le Nord-Est de ceux-ci, sur la côte Atlantique, à l'extrémité sud-est de l’État de New York. Elle se compose de cinq arrondissements : Manhattan, Brooklyn, Queens, Staten Island, le Bronx.

Mais quelle est la particularité géographique du Bronx par rapport aux quatre autres arrondissements ?

Question 2 :

La commune de Fleury-Mérogis, dans l’Essonne, en région Ile-de-France, est célèbre pour posséder la plus grosse prison de France avec 3000 prisonniers. Mais comment appelle-t-on ses habitants ?

Osons l'attractivité ! Fleury, agglo d'avenir, Mérogis, avenir fleuri !

Question 3 :
Johann Christoph Friedrich Bach est un compositeur et claveciniste allemand, 16ème enfant de Jean-Sébastien Bach, né à Leipzig le 21 juin 1732 et mort à Bückeburg le 26 janvier 1795.

Mais comment le surnomme-t-on ?

So long Jacques (1934-2019) !

Jacques M., Jacques L.... Deux destins, un même collier.

Question 4 :
Le 4 février 2003, le parlement fédéral de Yougoslavie dissout le pays et accepte la création d'une fédération limitée des deux États restants.

Quels sont ces deux Etats ?


Question 5 :
Les guitaristes Django Reinhardt et Wes Montgomery, le pianiste Erroll Garner, sont trois célèbres et magnifiques jazzmen. Mais ils ont un autre point commun, plus particulier.

Lequel ?


Question 6 :
Le guitariste mythique Jimi Hendrix a fait sa première tournée française en 1966 (casino d’Evreux, Olympia, Nancy…) en première partie d’une personne jouissant également d’une certaine notoriété.

De qui s’agit-il ?


Question 7 :
Ce terme apparu au XVIe siècle, employé pour la première fois par le maréchal Blaise de Monluc qui commandait les armées royales combattant des rebelles dans le sud-ouest de la France, est réapparu notamment en 1588 lors d'une fameuse "Journée" pendant le soulèvement des parisiens contre Henri III lors des guerres de Religion. Victor Hugo le popularise en l'employant 400 fois dans les Misérables.

Quel est ce terme ?


Question 8 :
Dans le film Rashômon d'Akira Kurosawa (1950), le réalisateur utilise une technique lui permettant de filmer pour la première fois ce qui n'avait jamais été filmé au cinéma. Cela, entre autre, lui valu d'être salué par la critique occidentale pour sa maîtrise technique.

Qu'a donc bien pu filmer Kurosawa ?


Question 9 :
En 1281 les Mongols attaquent le Japon à bord de nombreuses embarcations chinoises et coréennes. Alors qu'ils rencontrent quelques difficultés liées à la résistance japonaise, un typhon détruit une grande partie de leur flotte, forçant les troupes d'invasion au retrait.

Comment s'appelle ce typhon ?


Question 10 :
On sait que le poète Charles Baudelaire (1921-1967) traduisit admirablement les nouvelles d'Edgar Allan Poe. Il caressa le rêve de traduire également les poésies de Poe mais ne le fit que pour cinq d'entre elles, jugeant ce "rêve" irréalisable. Cependant un autre poète a fini par le réaliser.

Lequel ?