mercredi 26 octobre 2016

Sirat Al-Bunduqiyyah


Bon, ben devinez où Wroblewski va se mettre les pieds dans l'eau trois jours. Fastoche.



Allez, arrivée d'air chaud les amis !

Bravo à notre lecteur anonyme.


Je suis retourné chercher le temps perdu, le beau temps des yoyos lumineux, à Venise. La Piazza San Marco m'a paru avoir rapetissé...


Je n'ai pas croisé Corto, c'est pas comme si je l'avais pas cherché...


Stravinski est enterré ici :


Et le rapport avec Mahler ? Allez voir ce film génialissime, où il ne se passe rien :

lundi 24 octobre 2016

La dose de Wrobly, vendémiaire 2016 ère commune


     - Regain de Jean Giono.

    Un petit hameau isolé, à moitié en ruine, grillé par le soleil de plomb du midi de la France. Magnifique. Un hymne à la décroissance, paradoxalement par la recroissance d'un hameau désertifié (deux habitants, dont une vieille femme). Jean Giono fait partie de ces grands écrivains auxquels nous sommes attachés par certaines de ses aspirations éthiques (anti-militaristes, d'amour de la nature...) qui ont malheureusement eu des ennuis à la libération. Notre auteur avait un peu hâtivement cru voir dans la révolution nationale et l'Etat français de papy Pétain une forme de communalisme libertaire dirions nous aujourd'hui* (je connais mal le dossier). Sa deuxième période, moins de terroir, plus stendhalienne, est très belle aussi (le fameux Hussard dont on a dit qu'il l'avait pompé à la Chartreuse), une des pierres angulaires de l'univers mythologique littéraire de mon paternel.

*Cette version est calomnieuse, comme nous l'indique gracieusement un lecteur dans les commentaires. Je le cite : "ses ennuis à la Libération venaient, certes d'une imprudente publication dans Signal, mais aussi et surtout de règlements de compte entre le lui et le Parti Communiste". Moi, ça me va tout à fait. Merci donc au Promeneur et mille excuses aux mânes du cher Jean !

Attention ! des signes ostentatoires risquent de heurter la sensibilité des jeunes publics.

L'intégrale du film.


    - Laissez bronzer les cadavres de Jean-Patrick Manchette et Jean-Pierre Bastid.

    Un petit hameau isolé, à moitié en ruine, grillé par le soleil de plomb du midi de la France. Une bonne vingtaine d'années après Ô dingos, ô chateaux !, mon deuxième Manchette, auteur controversé et prometteur. Saignant.


     - La vie de ma mère de Thierry Jonquet.

    Mises à part deux ou trois nouvelles mineures, je peux dire que ça y est, j'ai tout lu Jonquet ! Incroyable écrivain, véritable illusionniste. Il y a l'atmosphère, il y a la souffrance et la violence, il y a l'horreur, mais aussi et surtout, il y a les chutes ! Et on tombe de haut sauf exception. Ah ! Je n'ai pas lu son roman posthume, mais là, comme ça, ça sent trop le coup éditorial lucratif... Et puis je sature un peu, j'ai pas trop envie. Dites-moi si je me trompe.


     - De Jean Amila : Motus !

    Il existe près des écluses... des barbouzes, des militaires, des règlements de compte, des haines familiales et de classe, des morts qui ressuscitent, des passions noires, de la pourriture et d'étranges insectes luisants et charognards... Incroyable, en achetant ce vieux poche à un bouquiniste au marché de Paramé, j'ai confondu Jean Amila, et André Héléna, jusqu'à hier ! Une bonne vingtaine d'années après avoir lu Le Demi-sel, je croyais voir là mon deuxième Héléna. Quel rapport entre eux ? Je ne sais, peut-être sont-ils tous les deux un peu prolétariens... Motus n'est pas mal, mais il manque quelque chose pour que l'ambiance soit vraiment angoissante... et l'intrigue addictive... Un côté désuet aussi, que je ne ressens pas chez Simenon, peut-être chez Malet, intégralement lu mais ça date...


    - Lettres à Doubenka de Bohumil Hrabal.


    J'aime piocher parmi mes six ou sept étagères de livres à lire, et tomber sur un improbable, dont je ne connais pas l'auteur (un des plus grands écrivains tchèques du XXème siècle, mais je suis autodidacte...), dont je ne sais ni quand, ni par qui il est arrivé là, peut-être offert par mon père, pourtant en général il les dédicaçait... Mais comme nous étions allés ensemble à Prague dans les 90's, j'avais la vingtaine, juste après les évènements de 89 narrés ici, je m'étais dit... Un voyage mémorable, j'étais tellement bourré dans le train que j'ai pissé dans le compartiment, une fois n'est pas coutume, mais mon père, pourtant spécialiste de l'imbibation (il en est mort d'ailleurs) n'avait jamais vu ça. Je me permets d'en parler car Hrabal semble un genre de Bukowski tchèque, et la biture et la bière semblent être des favoris parmi ses thèmes récurrents. Je me souviens aussi de jeunes espagnols dans le couloir longeant le compartiment, j'allais les voir bouteille d'alcool blanc dans une main et le bouquin d'Abel Paz sur Durrutti dans l'autre, heureux de fraterniser. Ils ont semblé n'avoir jamais entendu parler d'aucun des deux hommes. A Prague même, déssoûlé, en bon gogo de touriste, je me suis fait piquer mon portefeuille dans mon sac à dos. On est allé chez les flics, et ben c'était quelques années après la chute du rideau, mais dans les commissariats, ça sentait encore fort l'ancien régime, pas rassurés, qu'on était. Finalement mon père m'a prêté un peu pour continuer à picoler en visitant. J'ai un très beau souvenir de la ville, la place Venceslas, avec toutes ses tavernes, ses orchestres de jazz New-Orleans, le pont dont j'ai oublié le nom, tout cela et le reste évoquant vraiment le nom "bohême", même si, adjectivé aujourd'hui, il est ad nauseam accolé à celui de "bourgeois". Le bouquin de Hrabal est passionnant, ivrogne d'une grande culture, il nous fait partager ses tribulation aux States, invité par une "bohêmiste" (Doubenka) pour des conférences, alors que simultanément à l'est et plus précisément chez lui, c'est le grand dégel des pays du pacte. Il en profite pour raconter moultes anecdotes sur ses auteurs chéris (Kafka, Hasek en Tchéquoslovaquie, les hooligans déjà évoqués ici en Russie, et bien d'autres, notamment américains, comme Kerouac). J'ai parfois quelques réserves morales face à ce qu'écrit Hrabal. Par exemple, je trouve qu'il emploie un peu trop souvent le mot "nègre", avec toujours des appréciations ambigües sur les personnes qu'il désigne ainsi. Et il met sur le même plan la répression "communiste" à Prague, le 21 août ou le 17 novembre, et les émeutes en feu de joie de Detroit (qui, je le concèdent ont été particulièrement meurtrières) : répression = insurrection = gross malheur ! De même quand il qualifie Valérie Solanas de "traînée" en évoquant le carton qu'elle a fait sur son idole (à Hrabal) Andy Wharol. Il y a peut-être une histoire de traduction, peut-être dans son esprit "trainée" est il moins péjoratif qu'en français... Pour finir, Hrabal le dit lui même et on ne lui fera pas la morale sur ce point, en tout cas pas tant qu'on n'aura pas au moins fait cinq ans de cabane comme Vaclav Havel, notre écrivain a beaucoup résisté à l'envie de résister. En 45, il arrive en retard à la fac, juste à temps pour voir tous ses copains étudiants ramassés par les nazis dans des camions pour aller se faire fusiller ou déporter. En 68, il est au bistro. En 89, devant sa télé, sauf quand la révolution de velours semble gagner la partie, là il daigne retourner au bistro en ville. Et avant cela, il a plutôt été adepte du statu quo, préférant aller de temps en temps au ministère de l'intérieur en réunion plutôt que de voir son oeuvre littéraire réduite au silence. Ni exilé, ni prisonnier, il a passé toutes ces années sous les bottes, nazies et staliniennes, à picoler et à écrire sans faire de vagues. A sa décharge, au moins n'a-t-il pas fini président à genou dans une cathédrale... Quant à moi, ça me fait tout drôle parce que, cette tranche d'Histoire qu'il raconte, celle de 89, la fin du bloc, eh bien, contrairement à 45 ou à 68, c'était de mon vivant, j'avais 20 ans, j'étais comme Bohumil déjà bien imbibé aussi, même si pour moi ça n'aurait pas pu durer aussi longtemps que pour lui, c'est si proche, et en même temps si loin déjà...



    - L'Honneur perdu de Katharina Blum d'Heinrich Böll.

    Je l'avais lu dans le texte une première fois, pour dire que je n'en avais pas compris la moitié.

      "D'entrée de jeu, donc, l'essentiel est connu. En apparence, tout suspense est écarté. On sait que Katharina a tué Tötges. Mais même si on imagine quelles bassesses celui-ci a pu écrire, sa mort demeure peu compréhensible. Tous les jours la presse à sensation déverse sa boue. Ses victimes s'en indignent mais ne vont pas jusqu'à assassiner - ni même corriger - les auteurs des articles. Alors pourquoi Katharina Blum a-t-elle réagi aussi violemment ? Telle est la question que pose le livre.
     Question relativement facile [...] et qui en recouvre une autre, capitale, celle-là : comment le mensonge, la haine, la violence verbale peuvent-ils engendrer la violence physique ? Comment la violence naît-elle de la violence ? [...] Baignant dans la fange, propagandiste de la violence, la presse à sensation - et ce n'est pas seulement vrai dans l'Allemagne de l'Ouest des années 70 - se pare hypocritement du masque de la morale, se pose en gardienne de la vertu et de l'ordre.(Présentation de Claude Bonnefoy).
   Dès qu'il eut connaissance de ces deux meurtres, LE JOURNAL se comporta d'assez étrange façon : agitation démentielle, manchettes, placards, éditions spéciales, avis de décès d'un format démesuré. Comme si en ce bas monde où tuer n'a rien d'exceptionnel, le meurtre d'un journaliste avait quelque chose de particulier, de plus important par exemple que celui d'un directeur, employé ou pilleur de banque.
   L'importance excessive accordée par la presse à ces faits divers doit être d'autant plus soulignée que LE JOURNAL ne fut pas seul à leur donner une telle publicité. D'autres journaux qualifièrent aussi le meurtre des journalistes de particulièrement vil, épouvantable, dramatique, au point d'en faire presque, pourrait-on dire, un meurtre rituel. Ils allèrent même jusqu'à parler de "victimes du devoir professionnel".


    - La Valeur d'usage de Sade de Georges Bataille.

    Saignant, aussi. "Sade, c'est formidâââble, n'est pas ? Dans les salons révolutionnaire littéraires, c'est d'un cachet ma chère ! Foi d'André Breton, j'adôôôre ce type !" Et puis c'est tout ? Bataille, quant à lui, trouve ça pitoyable, de se la jouer sadien tant qu'on a pas commencé à le mettre réellement en pratique, et pas que sur le papier !

"[...] Le processus d'appropriation simple est donné d'une façon normale à l'intérieur du processus d'excrétion composé, en tant qu'il est nécessaire à la production d'un rythme alternatif, par exemple dans le passage suivant de Sade :
   Verneuil fait chier, il mange l'étron et veut qu'on mange le sien. Celle à qui il fait manger sa merde vomit, il avale ce qu'elle rend."

Un petit livre, du grand Bataille.


    - Bienvenue : 34 auteurs pour les réfugiés.



    Il y a des noms qui nous ont fait plaisir dans ce recueil de soutien à l'UNHCR pour les réfugiés : Sorj Chalandon, Lola Lafon, Lydie Salvaire. Des qu'on apprécie moins, comme le dessinateur du Journal Officiel, ou une star de la BD (dont on a pu cependant apprécier certains albums). Des connus, des inconnus. Et de belles découvertes (Gauz, dont l'esprit acéré et l'humour nous ont déjà fait jubiler ici). Mais on aimerait pouvoir faire plus que de lire un Seuil et de filer trois balles à une ONG pour aider nos frères réfugiés, et plus généralement pour abolir les lignes tracées par terre... Pour tout dire, cet en-cas littéraire ne nous a pas Calais. On essaye de rester prêt à toute occasion de participer avec nos modestes moyens à la solidarité.


mardi 18 octobre 2016

Le 19 à Amiens

      Samedi dans le vestiaire, un dentiste et un ostéopathe larmoyaient suite à l'augmentation de la taxe foncière. Le dentiste déplorait qu'il n'y avait plus d'intérêt à acquérir un bien immobilier. L'ostéopathe répliquant que nous autres, professions libérales, ma bonne dame, sommes bien malheureux, le premier concéda que l'impôt, d'accord, mais quand il devient confiscatoire alors non alors ! Je me demandais ce qu'on lui avait confisqué, connaissant sa grande maison sur les hauteurs d'une petite ville voisins vigilants, son châlet à la montagne, et ses bagnoles qui, même si je n'y connais rien, ne semblent pas être de marque Dacia Logan ou Lada Kalina. Ces deux copains sont, au-delà de ça, des types sympas. On trouve de (presque) tout sur un tatami, c'est ça qu'est bien.

 Nous sommes pris à la gorge !

     Alors hier soir, quand un autre pote, CGT Air France, me demande, devant le dentiste, si je vais à Amiens, je réfléchis une seconde, je réponds "ah ! ouais ! les Goodyear", et je regrette un peu de ne pas avoir prévu, de ne pas m'être organisé. Le dentiste, lui, ne comprend pas de quoi il est question, même quand le syndicaliste parle de neuf mois fermes pour une nuit en pension nourrie logée, et protégée du lynchage, quand il rappelle que les cadres ainsi hébergés ont retiré leur plainte et que seul le procureur de la République s'acharne, et que je lui réponds, dans un ping-pong un peu convenu, "vengeance d'Etat". Et puis ça a bifurqué sur les balcons qui s'écroulent, plus fédérateur.


     Alors pour me racheter, même si la CGT n'est pas ma tasse de thé, et que je n'ai pas plus que ça une passion pour les pneus - il me semble quand même que la métaphysique à laquelle je suis le plus souvent revenu dans ma vie m'invite à soutenir des prolos en lutte pour leur survie réprimés avec morgue et cruauté par le Talon de fer -, pour me racheter, donc, je donne ici quelques informations sur ces deux jours de soutien, avec un tract CNT, qui pourrait être le le texte que j'ai trouvé sur le sujet dans la précipitation de l'actualité le moins éloigné de cette mienne métaphysique évoquée plus haut.

Allégorie : les masses poussant pour excréter le vieux monde.

Soutien aux syndicalistes de Goodyear !
Non à la criminalisation du mouvement social !

Le 12 janvier dernier, 8 anciens salariés syndicalistes à la CGT de l'usine Goodyear ont été condamnés à 9 mois de prison ferme dans le cadre de leur lutte contre la fermeture de leur usine. Ayant fait appel de cette décision antisociale, ils sont donc convoqués devant la cour d'appel d'Amiens les 19 et 20 octobre prochain.

À travers ces condamnations des 8 camarades, ce sont l'ensemble des travailleurs et des travailleuses qui sont concerné-es, puisqu'elles s'inscrivent dans un climat où l'État et le patronat usent de tous les moyens pour faire taire toutes formes de contestations et de luttes.

En témoignent les nombreuses répressions et violences policières de ces dernières années :

Le cas de notre camarade Fouad Harjane, condamné à 40 000 euros d'amende pour sa participation à un mouvement anti-CPE, en est un exemple frappant [http://www.cnt-f.org/appel-a-souscription.html]. Des poursuites ont également été engagées à plusieurs reprises contre des personnes venant en aide aux migrant.es, sans parler de la violente répression dont sont victimes les Zadistes partout en France, à commencer par ceux et celles de Notre-Dame-des-Landes mais aussi les condamnations des syndicalistes d'Air France tout comme celles des opposant-es à la loi Travail.

N'en déplaisent aux autorités, collectivement nous réaffirmerons notre solidarité de classe envers l'ensemble des condamné-es du mouvement social et nous continuerons à nous mobiliser contre l'ensemble des lois patronales.

Pour la CNT, la seule condamnation qui tienne c'est celle de la violence des licenciements que subissent les salarié-es, celle de la violence sociale que nous subissons chaque jour.

Les 19 et 20 octobre prochains, la CNT invite l'ensemble des salarié-es à multiplier les initiatives de soutien aux Goodyear, et notamment à user de la grève pour rejoindre massivement la manifestation de soutien qui aura lieu devant le tribunal d'Amiens dès 8h.

La CNT réaffirme sa détermination à combattre la répression à l'encontre du mouvement social, les attaques faites au syndicalisme, et à lutter pour les droits de tou-te-s les travailleur-se-s contre la justice bourgeoise, l'État et le Capital.

LA CNT

Plus d'infos ici
Allégorie : le Prolétariat révolutionnaire terrassant le Capital.

La Plèbe écoute tout le temps :
Jeudi 20 octobre : Jazzlib' (jazz). Thème de la bi-mensualité : hommage à Jean-Baptiste Frédéric Isidore, baron Thielemans dit Toots Thielemans, mort dernièrement. Avec lui c'est un pan entier de l'histoire du jazz qui sera revisité.
When, where, how ?
Jazzlib' sur radio libertaire 89,4 FM en RP. Tous les 1er et 3e jeudis de 20:30 à 22:00.
Podcast ou téléchargement MP3, pendant un mois, sur la grille des programmes.
Cliquer sur le lien correspondant à la bonne date (Jazzlib'/Entre chiens et loups). Attention de bien vérifier que vous êtes sur le 1er ou/et 3e jeudi, vous avez, en haut à gauche, les semaines disponibles.

lundi 17 octobre 2016

Chair de poule

     On m'a prêté le dernier album de Dhafer Youssef. Je ne connaissais pas, bien que le nom ne me fut pas totalement étranger. Dès le premier titre dites-donc, les poils de mon épiderme se sont dressés. Quand il passe du grave aux aigus et qu'il reste là-haut, on dirait la plainte désespérée d'un animal légendaire, je ne sais pas, une licorne par exemple.

La chasse à la licorne : la licorne se défend, ateliers de Bruxelles ou de Liège, 1495-1505. Visible aujourd'hui au musée des cloîtres à New-York.

Et il reste perché un bon bout de temps. Un peu comme du Nusrat Fateh Ali Khan, mais en plus lent, plus posé, même si c'est dans les airs. Plus électriquement amplifié aussi. Le tout étant agrémenté de son oud, et d'un petit orchestre jazz bien chaleureux.



Avec le trompettiste Paolo Fresu, que j'aime bien.

vendredi 14 octobre 2016

A history of violence

La « violence » est une nouveauté historique ; nous autres, décadents, sommes les premiers à découvrir cette chose curieuse : la violence. Les sociétés traditionnelles connaissaient le vol, le blasphème, le parricide, le rapt, le sacrifice, l’affront et la vengeance ; les Etats modernes déjà, derrière le dilemme de la qualification des faits, tendaient à ne plus reconnaître que l’infraction à la Loi et la peine qui venait la corriger. Mais ils n’ignoraient pas les guerres extérieures et, à l’intérieur, la disciplinarisation autoritaire des corps. Seuls les Bloom, en fait, seuls les atomes frileux de la société impériale connaissent « la violence » comme mal radical et unique se présentant sous une infinité de masques derrière lesquels il importe si vitalement de la reconnaître, pour mieux l’éradiquer. En réalité, la violence existe pour nous comme ce dont nous avons été dépossédés, et qu’il nous faut à présent nous réapproprier.
Tiqqun.- Introduction à la guerre civile.
      Essorée par de multiples adaptations à l’opéra, au cinéma, cantonnée dans sa réputation de drame romantique, elle est pourtant faite de vengeances, de déliquescence politique et de haines familiales paroxysmiques. Mais non ! je ne vous parle pas de la primaire de la droite.


Le contraste est brutal entre la naïveté d’adolescents éperdus et la violence programmée des Montaigu et des Capulet qui ensanglantent Vérone, mus par une rancœur ancestrale dont le sens même leur échappe. « À l’opposé de la fade légende qui l’entoure, la pièce de Shakespeare nous suggère une dimension cachée de l’âme humaine : l’idéologie de la virilité meurtrit les femmes, perd les hommes et dresse des tombeaux là où devraient s’ouvrir les lits du vrai bonheur. »


     « Il y a un soleil noir dans cette pièce, c’est cela qu’il faut travailler », déclare Éric Ruf qui en assure la mise en scène et la scénographie. Car cette tragédie qui recèle quelques savoureux moments de comédie est une pièce fantôme qui n’a pas été aussi souvent montée qu’on pourrait le penser. Entrée au répertoire de la Comédie-Française en 1920, elle n’a pas été donnée Salle Richelieu depuis 1952.
Repris et réagencé d'un texte de Marc-Henri Arfeux, sauf les caractères gras.


      C'est un comble, pour une fois que je vais au théatre, c'est au cinéma ; et moi qui ne vais plus jamais au cinéma (depuis qu'ils ont supprimé le ciné-club et les jeudis du patrimoine dans mon établissement de banlieue), quand j'y retourne, c'est pour du théatre ! Mais je ne regrette pas : déjà pour l'ami de ce blog William Shakespeare, dont je n'avais jamais lu ni vu cette pièce illustre et à l'origine d'un mythe ; ensuite parce que, avec les acteurs (magnifique Suliane Brahim dans le rôle de Juju), les décors, la mise en scène, et le prestige de la grande maison, pour le dire comme Mercutio après qu'il s'est fait tailler une boutonnière au foie par Tybalt : j'ai eu mon compte !


mercredi 12 octobre 2016

Hooligans !

   Pareillement, Doubenka, cette année en janvier, ce qui s’est passé pour Palach, […] il s’était fait brûler ne trouvant que ce seul moyen de protester contre les armées amies qui en ce mois d’août étaient venues occuper sa République ; moi aussi j’ai eu droit à ma ration de gaz lacrymogène, là-bas, au bout de la rue Mustek et de plus, comme les reporters de la radio passaient en demandant aux gens : Que dites-vous des provocations de ces hooligans sur la place Venceslas et ailleurs ? moi j’ai eu l’honneur de dire aux reporters, […] Là vous tombez bien, car à la base de ma poétique et de ma vie, il y a trois hooligans… Serge Essenine, Vassili Choukchine, et Vladimir Vissotski ! Des Hooligans ! vous dites n’importe quoi… […]

Vidéo empruntée ici.

   Chère Doubenka, lorsque tombera la neige, nous irons ensemble à Moscou, elle est belle Moscou dans la neige jusqu’aux seins ! Une fois encore la laure de Drevykov sera suspendue au ciel, ces tonnes de pierres auront l’air d’être en papier crépon ! Nous en ferons le tour puis nous reviendrons sur nos pas, une ronde tout autour du Kremlin ! […]

Chanson piquée .

Mais nous irons à la laure de Drevykov, nous achèterons quatre petits bouquets, dès la grille du cimetière on voit des jeunes qui se mettent en rang, dès la grille ils arborent leur masque de douleur, à peine franchie la porte, nous y voilà ! Près de la porte gît Vladimir Vissotski avec sa guitare et des chevaux cabrés au-dessus de lui, à ses pieds des milliers de fleurs si belles dans la neige épaisse ! Et sa progéniture endeuillée ! Ses enfants, […] ceux qui l’aimaient et qui lui sont reconnaissants ainsi qu’ils l’ont écrit avec des cailloux sur la neige… Merci d’avoir vécu, tu resteras avec nous à jamais… Moi, Doubenka, j’ai pleuré… Doubenka, j’ai pleuré derechef en voyant le monument de marbre de M. Serge Essenine… ces brassées de fleurs et un énorme matou bleu gardien de la Russie bleue… et ma petite tête bouclée, ces soirs de lune, ces soirs bleus, autrefois j’étais jeune et tout était différent… C’est là, Doubenka, que nous irons et je vous réciterai ses poèmes sur la lune, sur tous ses merisiers et bouleaux et sur la malheureuse koulak Anna Sneguina…

Poème mis en musique carotté dans ces parages

Puis nous irons nous incliner, offrir un bouquet à un autre gisant, mais M. Chouchkine est couché sous un couvercle de plastique, pour que les fleurs ne prennent pas froid, on soulèvera le couvercle, et hop, au chaud le bouquet, nous regarderons la photo de ce soulographe aussi génial que les deux autres, nous nous inclinerons devant les restes d’une viorne rouge qui monte la garde à la tête du tombeau… on raconte que lorsque le malheur est arrivé, lorsqu’il est mort, les viornes étaient en fleur à Moscou et que son cercueil était tout couvert de fleurs rouges… car pour les Russes un poète est un prophète, un barde… […] Donc, Doubenka, nous irons à la laure de Drevykov, nous incliner devant M. Vissotski qui, lorsque sa femme l’a emmené à Hollywood, fut présenté ainsi au club des cinéastes : Mme Vlady accompagnée de son mari ; mais lorsqu’ils sont repartis, il faut dire que deux heures auparavant, Vysocki avait emprunté une guitare et s’était mis à chanter, alors c’était Vladimir Vissotski qui quittait le restaurant hollywoodien, en compagnie de sa femme… Nous ferons la révérence à Essenine, à l’hôtel d’Angleterre, il s’est tiré une balle dans la tête puis s’est pendu pour plus de sûreté… je vous répéterai, Doubenka, ce qu’on m’a raconté : pendant la Seconde Guerre mondiale, sous la canonnade allemande, lorsque l’hôtel d’Angleterre a pris feu, c’est ce lieu sacré que les pompiers sont allés sauver en premier, avant les bâtiments officiels… Doubenka, les Russes aiment leurs bardes, leurs poètes à ce point…

Complainte fauchée parmi ces herbes tendres.

Texte extrait des Lettres à Doubenka de Bohumil Hrabal.

lundi 10 octobre 2016

On ne nous dit pas tout !

      Une fois de plus, on nous ressort le remake d'un remake. Horkheimer et Adorno nous l'avaient bien dit (pardonnez-moi de simplifier outrageusement), la Kulturindustrie capitaliste, c'est faire du neuf avec du vieux pour vendre du vieux qui semble neuf, sans cesse. Je ne veux pas savoir ce que valent ces Sept mercenaires, certainement de la daube, en tout cas dans ma mythologie personnelle, cela ne vaudra jamais les fabuleuses scènes de mon enfance, les mouches, le pouce derrière l'index devant, les mains qui tremblent, Coburn, Mac Queen, Brynner, le mec de la série là..., etc., etc.

     Mais le plus grand scandale, est qu'on nous ressert ce scénario sans avoir fait toute la lumière sur le mystère Yul Brynner. La vie de Yul Brynner aurait d'ailleurs mérité un film à elle toute seule. Cependant la question posée ici est : est-il, oui ou non, le frère de Tupolev. Et si oui, d'Andreï (dans ce cas ils auraient eu 32 ans de différence) ou d'Alexeï . Rien, sur le net, ne permet de nous éclairer sur le sujet. Voici pourtant ce que j'ai lu à ce propos sur du papier :

"Enfin, nous irons déposer notre dernier bouquet au pied d'un monument, monument immense, de marbre noir, convexe comme la surface d'un miroir de dix mètres de rayon... et sauriez-vous Doubenka, de quoi il s'agit... Là-bas, sur la gauche, la chute d'Icare en or, à droite un visage en or, ne croiriez-vous pas que c'est Lénine ? Mais non... c'est le monument de M. Tupolev, celui qui a dessiné et construit les avions à réaction... mais il n'aura que la moitié du bouquet, l'autre ira à son frangin qui n'était autre que Yul Brynner, l'un des Sept Mercenaires, son frère, tous deux natifs de la Kamchatka... losrqu'ils se sont revus à Moscou, ils ont fait un festin dont on parle encore..."
Bohumil Hrabal.- Lettres à Doubenka.


Andreï


Yul

Alexeï
     Vous me direz trois choses :

     - D'abord, le mot "frangin" ou "frère" est peut-être ici pris dans le sens figuré de "camarade", ou "compatriote", même si la naissance dans la Kamchatka n'est pas non plus corroborée tant que ça sur la toile, mais je m'y connais mal en géographie russe.

     - Ensuite, le père Hrabal n'était pas particulièrement connu pour sucer uniquement de la glace. Alors peut-être qu'il a rêvé tout ça un soir d'abus de mélange bière - eau de vie...

     - Vous me direz enfin : qu'est-ce ça peut foutre ? Et là je serai une fois de plus de votre avis.

     Mais faut bien s'occuper.

     Si vous avez des infos, contactez-moi.

vendredi 7 octobre 2016

Sortie des doigts

      Hier, on s'est sorti les doigts des poches, une fois n'est pas coutume. On fait ce qu'on peut pour aider à la grande oeuvre commune, malgré nos petits moyens.

Rappel des faits (inspiré d'un tract CGT) :

      Le 28 avril dernier, l’assemblée générale interprofessionnelle de Saint-Denis organisait une action au port de Gennevilliers dans le cadre du mouvement contre la loi Travaille ! Après cette action, alors que le cortège se rendait à la Bourse du travail de Saint-Denis pour tenir une assemblée générale, les policiers l'en ont empêché en « nassant » et en arrêtant environ 150 manifestant-e-s. Les policiers ont également frappé et placé en garde à vue Nicolas P., cheminot militant à SUD rail, et Nicolas Jounin, ancien enseignant en sociologie de l'université Paris 8 de St-Denis, militant notamment en soutien aux travailleurs sans-papiers.
     Au premier, il est reproché le port d’un Opinel, qu’il utilise quotidiennement au travail, et le refus de donner son empreinte ADN. Le second est accusé de violences sur policier (ce qu’il conteste), sur la base de l'unique témoignage d’un commissaire. Pour faire bonne mesure, le policier qui aurait été battu a eu un jour d’interruption temporaire de travail, autant que notre camarade frappé à la tête et à la hanche.
     Le lendemain de leur interpellation, les deux Nicolas ont refusé la comparution immédiate, cette justice expéditive qui a déjà envoyé de nombreux/ses militant-e-s contre la loi Travaille ! en prison. Ils étaient soutenus par une manifestation de 300 personnes, qui a contribué à leur remise en liberté rapide, alors que la procureure réclamait la détention provisoire contre Nicolas Jounin au nom du « contexte actuel » et du « risque de récidive » !
     Hier 6 octobre a eu lieu leur procès.
     Durant tout le mouvement contre la loi Travaille !, les violences policières, les interdictions de manifester, les cortèges encagés et les interpellations de militant-e-s se sont multipliés. Le but : nous intimider et nous dissuader de protester contre la régression inédite que représente la loi Travaille ! Les procès de manifestant-e-s nous concernent donc toutes et tous, car ils attaquent notre droit d’expression et de manifestation. C’est pourquoi La Plèbe a délégué l'un des siens au rassemblement devant le tribunal de Bobigny d'hier à 12h30 pour soutenir Nicolas P. et Nicolas J. et montrer sa solidarité face à la répression.

     Nous rappelons que Nicolas Jounin était passé le 29 avril dernier sur BFM TV, où il avait été confronté à la servilité agressive d'un larbin médiatique, tout en essayant de faire passer le message d'un refus radical (mais posé) de cette loi, et accessoirement de son monde.

Reportage photo de notre compagnon Walery W. :

Aujourd'hui c'était la fête à Neuneu officielle au bureau. Même si c'est la direction qui décide de tout ce pognon dépensé plutôt que de nous faire des chiottes potables à l'étage, on peut pas dire que c'était pas sympa, les collègues étaient contents, et puis j'ai pu écouter un peu avant de partir la fanfare Tarace Boulba, et vu que je viens de me mettre au trombone, ça m'intéressait doublement. Fanfare que connais depuis bien 25 ans, j'avais même un pote qui jouait de la trompette dedans, apparemment les membres se renouvellent, mais ils jouent toujours un morceau qu'ils jouaient déjà à l'époque, je dois l'avoir en CD quelque part d'ailleurs... 

Cependant, laissant là mon désir de prolétaire (rester au chaud au bureau devant mon terminal, il faisait frisquet, faire un repas complet à la cantine, aller bouquiner un peu à la bibliothèque, ou zoner au milieu des stands de cette foire), je décide de m'adonner au stade suprême de l'aliénation : le militantisme.

Hop ! Après avoir poireauté un peu à la sortie du chagrin pour rejoindre le départ collectif prévu, je pars seul, n'ai vu personne, de toute façon je connais peu de monde. Je prends le métro, sans même resquiller (pas aliéné le type !).

J'étais quand même inquiet de trouver mon chemin  jusqu'au tribunal de Bobigny, je suis d'un naturel anxieux. Et puis paf ! à la sortie de St-Denis Basilique, là, devant moi, un gus avec un fin bâton entouré de tissu rouge ! Pas de doute, c'est un militant. Je le suis. Ils seront finalement quatre, deux hommes, deux femmes, de jeunes profs, que je suivrai discrètement dans le tram. Une demie heure quand même, pas si proche Bobigny. J'aurais voulu faire un reportage sur les contrées traversées, La Courneuve, puis Drancy, mais le tram' était bondé, et je suis encore timide avec mon appareil photo, je n'ose pas prendre quand il y a des gens qui pourraient être gênés ou me prendre pour un zarbi, ou un flic.

Arrivé à Bobigny, j'ai lâché mes guides pour aller faire pipi au Mac Do, pas trouvé de café, en méditant sur le symbole dialectique que constitue le fait que c'est dans une enseigne les plus représentatives du capitalisme mondialisé victorieux que l'on retrouve la gratuité de fonctions élémentaires de la vie. Enfin, faut surveiller quand même le vigile, mais ma couleur de peau me donne plutôt un atout pour accéder à l'urne libératrice. Puis j'ai cherché dans un sens.

Dans l'autre.

Ah ! ça se précise !

Salut les copains ! J'ai rencontré un collègue, discuté un peu le bout de gras. Des têtes connues qu'on croise dans les mouvements. Même Sylvie Tissot, que je connaissais de nom mais pas de vue. On a applaudi Nicolas Jounin qui rentrait se faire juger. On a attendu. J'ai commencé à avoir mal aux pieds. A crever de chaud sous ma triple couche, vu que le soleil avait un peu réchauffé l'atmosphère. Et puis je ne sais pas pourquoi, dès que je vois un drapeau syndical, je commence à m'ennuyer, c'est physique. Ceci dit sans aucun mépris, ce sont eux qui se bougent, dans le cadre du monde du travail en tout cas, mais c'est comme ça, une fragilité, une bizarrerie. J'ai cherché dans mes boîtes, par ci par là, l'autonomie ouvrière, mais je ne l'ai pas trouvée.

Après 45 mn de rassemblement, je rebrousse chemin, il n'y a pas grève aujourd'hui, je suis sensé être à mon poste, malgré les tolérances relatives de la fête au village, laissant les militants les plus patients et/ou engagés dans cette action, sous l'oeil bienveillant des bleus, même s'ils sont moins nombreux qu'en manif.

Direction la gare routière.

Prendre mon petit tram'. De retour au bureau des jeunes collègues apolitiques m'ont permis de griller la queue pour la barbe à papa.

Résultat partiel de la lutte (inspiré du compte rendu d'une militante SUD) :

     Il y avait sûrement près de 200 personnes en tout au rassemblement d'horizon très divers. La salle était pleine avec une bonne vingtaine de personnes debout. Les deux affaires ont malheureusement été séparées par la justice.

     Le procès de Nico de SUD Rail a été reporté au 5 janvier, mais son contrôle judiciaire est levé et il a de nouveau le droit de porter un opinel. Nouveau rassemblement à prévoir donc.

     Le procès de Nicolas Jounin a bien eu lieu durant près d'une heure. La procureure a requis huit mois avec sursis. Le délibéré aura lieu le 3 novembre.

     Nous vous laissons aller sur de vrais sites ou des blogs moins amateurs que celui-ci pour obtenir des infos plus qualitatives, qui vous permettront d'apprendre qu'un opinel est une arme, que le sérum physiologique est une potion magique vous permettant de vaincre les gaz lacrymogènes ou que la présence d'un tract de defcol dans votre sac indique votre volonté d'agresser des forces de l'ordre.





Verdict rajouté le 8 novembre : 6 mois avec sursis pour Nicolas. Une fois de plus un véritable déni de justice, une provocation en même temps qu'une tentative d'intimidation de toute révolte contre la violence croissante des dominants. Et toujours plus d'impunité et de pouvoir pour leurs exécuteurs de basses oeuvres de la police. Tout est faux dans ce procès.

mercredi 5 octobre 2016

Folie vs abjection



      Ivry, le 10 novembre 1947.

           Monsieur,

      Monsieur Jean Denoël vient de me donner connaissance de la lettre que vous lui avez écrite et où vous lui dites que vous renoncez définitivement et pour toujours à écrire dans une revue qui a publié les "élucubrations d’un aliéné". Eh oui petit cloclo, ayant passé 9 ans dans cinq asiles d’aliénés de France, je suis par définition grammaticalement parlant et par principe le type même de l’aliéné. Mais, sais-tu cloclo dans quelles circonstances de basse police, et que c’est pour avoir eu sur moi la canne-matraque dite de Saint Patrick, et qui était en réalité la canne même du réputé Jésus-Christ, que j’ai été assommé et massacré par derrière à Dublin, et dans cet état traîné en France dans cinq asiles d’aliénés. Il est facile dans cet état de faire passer pour fou un homme qui a la colonne vertébrale brisée en deux, et qui met neuf ans à se retrouver et à se survivre. Mais l'auteur de Partage de Midi, livre volé à tous les vieux livres de littérature chinoise, est mal venu de traiter d'aliéné le supplicié authentique du Golgotha à qui les hommes de ce temps n'ont rien trouvé de mieux que d'imposer le supplice moderne des foudroiements répétés et traumatiques de l'électrochoc.

Antonin Artaud.

Encore Franju, encore Bazin

Frères cuistres ! Qui d'entre vous pourra me dire, si possible sans utiliser le premier GAFA, à qui est adressée la lettre du Mômo ?

La Plèbe écoute tout le temps :
Demain soir jeudi 6 octobre : Jazzlib' (jazz). Thème de la bi-mensualité : le retour annuel du Phantom Masqued, c'est à dire évidemment du fou soufflant Roland Kirk. Il y aura l'incontournable Alain Sève, le savant de la clarinette et autres instruments à anches.
When, where, how ?
Jazzlib' sur radio libertaire 89,4 FM en RP. Tous les 1er et 3e jeudis de 20:30 à 22:00.
Podcast ou téléchargement MP3, pendant un mois, sur la grille des programmes.
Cliquer sur le lien correspondant à la bonne date (Jazzlib'/Entre chiens et loups). Attention de bien vérifier que vous êtes sur le 1er ou/et 3e jeudi, vous avez, en haut à gauche, les semaines disponibles.

"Bravo les aminches ! Votre Camille"

lundi 3 octobre 2016

Eisler par Goebbels

   Parmi ce que notre soeur blafarde l'Allemagne a créé de mieux, de mythique même, il y a évidemment Bertold Brecht et le musicien Kurt Weill, qui lui est souvent inséparablement lié. Toute cette mouvance artistique et politique est bien rendue dans le roman Comedia de Thierry Jonquet, qui, à défaut d'une fin décoiffante (une fois n'est pas coutume), a su y créer une atmosphère faisant écho à mes rêves et fantasmes d'Allemagne.

   En revanche je ne connaissais pas, et la vie est chouette pour ça, c'est que tant qu'on est pas définitivement devenu un légume, à cause d'Alzheimer ou de la télévision..., on n'a jamais fini d'apprendre avec passion ; je ne connaissais pas, donc, un autre musicien ayant beaucoup composé pour Brecht, et dont, comme celui-ci, la vie fut mouvementée, digne d'un roman de John Le Carré : Hanns Eisler, qui, en fait d'allemand était autrichien et élève de Schönberg. Le premier morceau que j'ai entendu d'Eisler est d'une tristesse infinie, et d'une grande beauté : Und ich werde nicht mehr sehen. Sur Ioutube je n'ai trouvé que ces versions :




   Mais quand j'ai découvert le morceau, c'était par Heiner Goebbels (et non ! c'est pas le même, vous avez eu peur, hein ? moi aussi au début), compositeur allemand né en 1952, qui a consacré un disque à la musique d'Eisner.  Cette version est magique. Il y a notamment un cor qui vous colle un noir ! Malheureusement je ne l'ai pas trouvée sur le site de vidéo susnommé. En remplacement, un autre morceau, extrait de ce disque, et d'autres sur le site :