mercredi 16 décembre 2020

Les vers pour les nuls

      Bientôt les fêtes de fin d'année. Peut-être l'occasion pour chacun de nous de trousser un compliment en vers au coeur du réveillon familial, entre la polémique sur l'hydroxichloroquine et la voies de faits au sujet de Greta Turnberg...

     Pour vous y aider la Plèbe vous a concoté la fiche de procédure qui va bien.


     Les bouts rimés, même deux à deux, ne sont pas des vers. Il faut que les lignes aient un nombre déterminé de syllabes (ou pieds), si l'on souhaite prendre le nôtre à leur écoute, telles que 6, 8, 10 ou 12, en observant que la syllabe muette qui termine les vers féminins ne compte pas dans le nombre, ainsi que les syllabes qui s'élisent ou se mangent comme dans homme aimable, où les deux syllabes me et ai ne comptent que pour une, et où la syllabe ble,censée à la fin du vers, ne serait pas comptée ; en sorte que, dans le cas supposé, homme aimable, les 5 syllabes ne compteraient en poésie que pour 3.
     Il faut, de plus, pour les vers de 10 ou de 12 syllabes, un hémistiche ou un repos savoir : dans les vers de 12 syllabes, entre la 6ème et 7ème syllabe poétique, et, pour les vers de 10, entre la 4ème et 5ème syllabe aussi poétique.
      Imaginons 4 lignes et cherchons ce qu'elles ont de trop et ce qui leur manque :

En cette magique nuit d'espérance
1     2  3    4  5  6     7      8  9 10
Tontons tâchons, avec tolérance
   1   2     3    4     5  6   7  8   9
Ne point nous foutre au nez le rata
  1      2      3      4       5    6   7  8 9
Pour ou contre Raoult ou Greta
   1     2    3    4 5   6     7      8 9

     Le premier vers a bien dix syllabes poétiques, puisque le ce d'éspérance, syllabe féminine à la fin du vers, ne doit pas être comptée, mais le repos doit être entre la 4e et la 5e syllabe, mais on ne peut pas se reposer sur ma, où le son exige qu'on aille tout de suite, ainsi point d'hémistiche.
     Le deuxième vers a bien un repos suffisant, sur la syllabe chons, mais il n'y a que 9 syllabes.
     Le 3e vers a de même 9 syllabes poétiques (ainsi que le 4e), puisque tre au se mangent ou s'élisent, et par là ne forment qu'une syllabe à elles deux.
     Pour faire de cela, non pas de la poésie, mais des vers, il faudrait dire à peu près :

En ce réveillon d'espérance
Chassons la polémique rance
Ne gâchons pas ce bon rata
Oublions Raoult et Greta

     Ce serait peut-être le cas de dire :

Bon, excellent, quoique mauvais,
Car c'est le coeur qui les a faits.

Pour terminer la Plèbe vous propose un grand concours qui clôturera et couronnera cette belle année en beauté : composez-vous même et envoyez-nous un quatrain en sexto, octo, nono, déca ou dodécasyllabe, sur le thème des réjouissantes fêtes de fin d'année 2020. Le meilleur sera publié ici même !


     Et puisque nous associons poésie, enfance et solstice d'hiver, voici la grande Anne Sylvestre (1934-2020), dans une chanson issue d'un disque qui illumina mon enfance dont chaque piste reste profondément ancrée dans ma mémoire et dans mon cœur, comme des madeleines miraculeuses (comme il peut m'arriver de mélanger les tons et vues mes élucubrations ultérieures, je précise que cette phrase n'est absolument pas ironique et est à prendre littéralement au pied de la lettre). Cette chanson évoque un conte qui fut longtemps raconté aux enfants en cette période d'installation parmi nous de sieur Hiver. En voici l'argument : les deux amants palestiniens Marie et Joseph, ayant beaucoup fait l'amour au début du printemps, se retrouvent fort émus par l'arrivée d'un bébé prévu pour les débuts des temps de bise. C'est la loi de la vie, tragique ou merveilleuse selon les points de vue et les circonstances, mais c'est la loi. Marie perdit les eaux à Bethléem, en Cisjordanie. Le couple était descendu dans le sud pour les vacances depuis Nazareth, en Galilée, où Joseph bossait dans la charpente. Quant à Marie, tout juste sortie de l'école, elle était demandeuse d'emploi. Arrivés au village de vacances, catastrophe, la famille apprend que le roi de Cisjordanie, Hérode, le despote du coin à la botte de l'Empire colonisateur du Proche-Orient, Rome ; qu'Hérode, donc, ayant appris par un de ses devins (pas plus superstitieux qu'un tyran), qu'un leader nationaliste allait naître pendant cette période, avait ordonné le meurtre de tous les bambins de moins de deux ans. Un genre de Pétain, l'Hérode, pour vous situer, collabo et assassin d'enfants. Heureusement, Jésus (le bébé, qui finalement deviendra un galvanisant compagnon internationaliste quelques années après) et ses parents furent sauvés par l'intervention de trois sous-prolétaires cosmiques : Croquignole, le roi de la cambriole, Ribouldingue, le seigneur des pick-pockets, et Filochard, empereur de l'escroquerie. Il ne m'appartient pas de vous révéler par quels subterfuges la fine équipe échappa aux soldats d'Hérode, ni comment ils rentrèrent sains et saufs en Galilée afin d'y laisser mûrir le fabuleux destin révolutionnaire de l'enfant. L'histoire du compagnon Jésus, du début à la fin, n'est-elle pas écrite dans les chroniques anarchistes ?

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