"[...] vous me demandez alors : "Maître Isogushi, comment dissiperons-nous ces troubles ?" Je vous réponds : "En faisant en sorte que l'on puisse dire de vous : regardez cet homme, à aucun moment il ne se repose ! Et si l'on va jusqu'à proclamer : "Voilà l'homme qui ne dort jamais", c'est mieux encore. Cela signifierait que vos troubles sont derrière vous. [...]""Patrice Franceschi.- Ethique du samouraï moderne.
"Vous êtes surtout paresseux."
Jean Rostand.
- Blaise Lesire.- Opuscule navrant.
Comme son illustre homonyme, Blaise Lesire a ressenti le vertige de l'absurdité de l'existence. Mais contrairement au mystique Auvergnat, il n'a pas fait le pari de la foi en un au-delà où il serait cajolé par 72 religieuses vierges de Port-Royal des Champs, mais de celle dans le salut en ce monde par la sieste, tempérée par de complices colloques, sentimentaux, sensibles, sensuels voir érotiques avec de charmantes quoique parfois vindicatives compagnes de différentes espèces.
Je me suis beaucoup identifié à Blaise Lesire, tout au moins au personnage qu'il campe dans ce tout à fait réjouissant recueil d'aphorismes. A telle enseigne que j'ose me considérer comme un houbiste, modéré certes en regard de la radicalité de l'auteur, disons un houbiste de basse intensité léthargique : il m'arrive encore d'émettre quelques casuistes réserves sur le dogme du fatalisme héroïque, ainsi que sur celui du non-agir critique, tout en les pratiquant maladroitement, mais en restant ataviquement prisonnier de ma nature d'animal façonnier, comme disait Proudhon. Compulsivement je ressens le besoin d'agir pour la révolution anarcho-communiste, on pourrait dire qu'il s'agit là de mon "grain", comme dirait Stirner. Cependant je ne fais rien ou pas grand chose, ce qui maintient ma vie dans une légère culpabilité insatisfaite. Par ailleurs, je sais que si je ne m'agite pas un peu, je vais mal dormir, et cela je ne le tolère pas. Ainsi donc mon houbisme se dilue dans une sobre activité, parfois intense, comme sur les tatamis d'avant COVID, par exemple, mais toujours stoppée nette au moindre besoin de repos. Je suis un houbiste hobbyiste. Je ne sais si cela conviendrait à l'intransigeance du Maître, mais je crois savoir après étude de son enseignement qu'il n'accepte aucun disciple, entendant jalousement rester le seul adepte de sa secte. Libre donc à chacun de s'en inspirer à sa manière.
Je m'identifie à l'auteur par de nombreux traits :
- Je suis né sous le signe du Loir. Adepte de la sieste, que je qualifie systématiquement de l'adjectif "délicieuse", des micro-siestes également quand une activité quelconque m'éloigne de mon lit, de la grasse matinée, et sur mon âge mûrissant, des extinctions des feux avant minuit (pas toujours). Au bagne salarial les chiottes m'ont souvent servis de lieu de sommeil, bien calé assis sur le trône. Aujourd'hui, ayant finalement trouvé un lieu de chagrin plus souple, je vais à la bibliothèque fermer les yeux dans un fauteuil (quand il en reste, les adeptes de notre maçonnerie sont légions !). Parfois il m'est arrivé aussi de prendre, à mon poste de travail, la position du penseur concentré sur son clavier, ou adossé au fauteuil le regard sur l'ouvrage, pour pratiquer cet art. Le tout étant d'éviter le ronflement.
- Je trouve une grande consolation, un moteur de désir et un plaisir sûr dans le jazz. A ce sujet, je voudrais remercies l'aphoriste pour m'avoir fait comprendre enfin, avec un moyen concret pour l'appréhender, après tant d'années de musique en amateur, ce qu'est un rythme ternaire. Le coup du "un et puis deux", relève du génie ! Reconnaissance éternelle !
- Si je n'ai pas démissionné, c'est un peu tout comme, je me suis reconverti. D'un emploi nécessitant de ma part énergie, créativité, initiative, responsabilité, et flicage, entre autres, je suis passé à un simple job d’exécution. Je n'ai cependant pas été jusqu'au robinsonnesque séparatisme de Blaise Lesire, manque de créativité, d'initiative, d'imagination et de force vitale. Comme quoi, c'est paradoxal, pour vivre heureux feignant, il faut abattre un sacré taf !
- J'ai haï l'école. Elle m'a traumatisé, terrorisé à 5 ans, à telle enseigne que mes laïcards de parents m'en ont changé pour me mettre chez des bonnes sœurs. J'y ai vécu une infinie tristesse et une insondable solitude, mais moins terrorisé qu'à la laïque (c'est un hasard, évidemment, j'avais dû tomber sur l'instit' sadique de service, je me souviens de son nom, 5 ans ! Madame Stéphanie). Puis, retour au public en CP j'ai eu mes premiers fantasmes de meurtre et désirs de mort, en la personne de l'instit' plutôt gentille a priori rétrospectivement, pauvre madame Pigaillem ! La peur ne m'a pas lâchée au collège, mais j'avais fait le deuil du pouvoir magique de faire mourir les gens par la pensée et admis que ce n'était finalement pas souhaitable. Jusqu'à ce qu'à 15 ans je découvre la potion magique anti trouille, la pillave. Qui répare sur le coup mais ne fait qu'amplifier l'angoisse qui eut tout loisir de me pétrir de nouveau ensuite dans la vie dite active...
- Je m'intéresse à quelques philosophies et arts martiaux orientaux, en pratiquant certains avec une assiduité variable.
Nous croisons de bien sympathique personnes dans cet opuscule, de Tchouang Tseu à Franquin, de Lichtenberg à Beckett, de Scutenaire à Brassens et bien d'autres.
Je ne prétends pas avoir de l'humour, ce serait présomptueux, mais en lisant l'Opuscule j'avais l'impression que mon esprit en pétillait. L'humour, cette forme supportable de l'angoisse, et cette rupture dans un chaîne logique, n'est-il pas aussi la définition du paradoxe ? En tout cas, Blaise Lesire est un virtuose de l'exercice !
Je ne m'identifie pas aux traits suivants de l'auteur :
- Il aime la moto (cela dit je ne juge pas, moi j'aime bien le heavy metal...) ;
- Les benzodiazépines me sont interdits, je dois négocier mes malaises par des voies naturelles, mais ce n'est pas par vertu, rassurez-vous, plutôt une forme d'allergie me poussant à ingurgiter Xanax, Lexomyl, Valium, Rohypnol et autres Lysanxia par pincées plutôt que par unité, moitié ou quart d'unité.
L'Opuscule m'a évoqué :
- Alexandre le bienheureux ;
- L'écrivain peu connu Pierre Autin-Grenier, qui n'a pas écrit d'aphorismes, mais des poèmes en prose à caractère autobiographique et humoristique. De mémoire, il me semble être un précurseur du houbisme.
- Le poème Les Hibous, de Baudelaire, un de mes préférés.
- Ernest Armand.
Ce qui m'a choqué dans l'ouvrage de Blaise Lesire :
Ce n'est pas son cynisme, son matérialisme, son épicurisme, son hédonisme simple et naturel entre l'ascétisme du macrobiote et le consumérisme des lou ravis de l'économie, son pessimisme (qui se relativise au fil du temps et des pages puisque vers la fin du recueil nous avons même le plaisir de lire quelques utopies en trois lignes), son inactivisme forcené, sa misanthropie (jamais aigre), non, en tout cela je peux aussi me retrouver. Ce qui m'a réellement déstabilisé et agacé (comme le dit l'auteur, quand nous décidons de prendre un livre, c'est par lassitude de s'agacer soi-même et afin d'être agacé par quelqu'un d'autre, l'écrivain), c'est que nous sommes une fois de plus en présence d'un homme à femme, d'un libertin heureux. Mais comment font-ils ? Moi dont la seule ambition depuis ma tendre adolescence a toujours été de "baiser des gonzesses", comme disait Coluche, ce domaine de ma vie a été lui aussi un immense fiasco, fait de frustration, de chaos, de gâchis, d'eau de boudin (sans mauvais jeu de mot sexiste), de soupe meilleure, toujours, dans l'assiette du voisin. Toutes ces grâces roturières, foisonnant dans les rues, le métro..., toutes ces passantes je les ai convoitées, jamais possédées. Mes rares relations n'étaient pas celles que je fantasmais. "Essayer encore. Rater encore. Rater mieux encore. Ou mieux plus mal. Rater plus mal encore. Encore plus mal encore. Jusqu’à être dégoûté pour de bon. Vomir pour de bon. Partir pour de bon. Là où ni l’un ni l’autre pour de bon. Une bonne fois pour toutes pour de bon." comme le cite notre artiste de l'édredon. Finalement, à 40 ans j'ai fait un enfant (alors que j'étais aussi néo-malthusien que l'aphoriste, mais j'ai finalement été curieux, et peut-être par dépit aussi de n'avoir pu être Casanova), ce qui me permet, vivant en couple depuis 13 ans, de ne pas avoir touché une femme depuis pas loin de 10 ans (je ne tiens pas le compte exact mais le temps passe si vite - ma compagne n'est pas comme moi, adepte de la sieste, et le soir, si on veut lire un peu... après on est quand même pris d'une douce mais insistante torpeur à laquelle il est difficile de résister...), et de ne plus m'emmerder avec toutes ces salades.
Donc échec total de ma vie, même dans ce domaine-ci des affaires.
Conclusion, un livre à lire et à relire, qui constitue dores et déjà un support pour mes méditations du matin.
- Georges Bataille / Eric Weil. A en-tête de Critique : correspondance 1946-1951.
Nous retrouvons l'ami de ce blog Georges Bataille dans ce passionnant recueil épistolaire. Bon, avouons tout de suite que nous rigolons moins que dans Madame Edwarda ou Histoire de l'oeil, mais c'est infiniment plus compréhensible aussi que La Valeur d'usage de D.A.F. de Sade ou La Notion de dépense. C'est même plus compréhensible immédiatement que l'ouvrage ci-dessus commenté. Bataille et Weil, respectivement directeur et rédacteur de la revue Critique, revue générale des publications françaises et étrangères, qui parait depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Les deux hommes y discutent de la réalisation de la revue, les livres à évoquer dans de longs articles ou dans des notes bibliographiques, les rédacteurs qu'ils pensent les plus compétents pour tel ou tel article, etc. Un grand nombre des livres d'envergure édités à l'époque concernant la philosophie, l'histoire, la science, l'actualité, la politique... y passent (un exemple parmi cent : L'Etrange défaite de Marc Bloch), ainsi qu'une flopée d'intellectuels pressentis défilant dans ces lettres. Avec parfois de petits couacs et de légères polémiques, en essayant de passer entre les gouttes gaullistes et staliniennes. Les deux hommes n'ont pas grand chose en commun : "Les pensées de Weil et de Bataille s'opposent en effet comme le système à la dispersion, l'affirmation du caractère systématique de la philosophie au mélange constant et délibéré des plans, à l'hybridation des connaissances et des modes d'intelligibilité. On peut aussi opposer les thèmes qui structurent la philosophie de Weil : raison, violence, discours, opposition de la violence et du discours, action, éducation, dialogue, ..., et ceux qui traversent sensiblement l'oeuvre de Bataille (en tout cas celle de l'après-guerre) : dépense, utilité, sacrifice, violence, érotisme, destruction, mort, souveraineté, communication..." (préface). Weil est un marxiste plutôt non stalinien, très à cheval sur la dialectique historique et le matérialisme scientifique de ses mentors Marx et Hegel. Quant à Bataille, révolutionnaire d'extrême gauche, je ne saurais trop définir précisément ce qu'il est politiquement...
Toutes ces discussions techniques autour de la constitution d'une revue m'intéressent. Je suis un journaliste raté, même si je n'ai rien fait pour le devenir professionnellement, ça me paraissait trop élevé pour moi. J'ai tâté un peu d'un journal anarchiste artisnal et ultra-confidentiel étant jeune, et puis plus rien jusqu'à cet ersatz individuel de journal appelé "blog". En revanche j'ai toujours lu des journaux, en papier. Surtout des hebdomadaires et des mensuels (les quotidiens, franchement, autant lire le Journal Officiel). Aujourd'hui je lis encore intégralement au moins trois mensuels par mois, et des bricoles.
Le livre me fait penser évidemment à la correspondance de Baudelaire que je lis par petits bouts depuis un an ou deux. Quand celui-ci dialogue par lettres avec son éditeur Poulet-Malassis (j'adore ce nom !) ou les directeurs des périodique auxquels il participe, on retrouve le même ton, les mêmes préoccupations, ces mêmes histoires d'épreuves à corriger, recorriger, ces mêmes fureurs contre les imprimeurs laissant passer les coquilles !
Sans y avoir jamais vraiment participé, je suis un peu dans mon univers...
- Michel Bakounine.- Michel Bakounine et l'Italie,1871-1872.
L'anti-houbiste par excellence : il n'a cessé de s'agiter sur toutes les barricades d'Europe, a fait le tour du monde en passant pendant 8 ans par la case "prison" et 4 ans par celle "Sibérie", pour se replonger finalement dans le militantisme européen tous azimuts. Pourtant c'est un de mes meilleurs copains. Peut-être parce que le monde dont il était plein avec tous ses compagnons internationalistes anti-autoritaires est un monde ou le droit à la paresse aurait certainement été élevé au rang des beaux arts, à côté d'activités passionnelles énergisantes, et de quelques corvées de subsistance librement et égalitairement partagées. Il est vrai aussi que, quand la passion et la foi m'habitent, je peux oublier la sieste... enfin... c'est quand même rare.
Citations en phase avec les commémorations actuelles :
Hier, sous nos yeux, où se sont trouvés les matérialistes, les athées ? Dans la Commune de Paris. Et les idéalistes, les croyeurs en Dieu ? Dans l’Assemblée nationale de Versailles. Qu’ont voulu les hommes de Paris ? Par l’émancipation du travail, l’émancipation définitive de l’humanité. Et que veut maintenant l’Assemblée triomphante de Versailles ? Sa dégradation finale sous le double joug du pouvoir spirituel et temporel. Les matérialistes, pleins de foi et méprisant les souffrances, les dangers et la mort, veulent marcher en avant, parce qu’ils voient briller devant eux le triomphe de l’humanité ; et les idéalistes, hors d’haleine, ne voyant plus rien que des spectres rouges, veulent à toute force la repousser dans la fange d’où elle a tant de peine à sortir. Qu’on compare et qu’on juge !
Conclusion, un livre à lire et à relire, qui constitue dores et déjà un support pour mes méditations du matin.
- Georges Bataille / Eric Weil. A en-tête de Critique : correspondance 1946-1951.
Nous retrouvons l'ami de ce blog Georges Bataille dans ce passionnant recueil épistolaire. Bon, avouons tout de suite que nous rigolons moins que dans Madame Edwarda ou Histoire de l'oeil, mais c'est infiniment plus compréhensible aussi que La Valeur d'usage de D.A.F. de Sade ou La Notion de dépense. C'est même plus compréhensible immédiatement que l'ouvrage ci-dessus commenté. Bataille et Weil, respectivement directeur et rédacteur de la revue Critique, revue générale des publications françaises et étrangères, qui parait depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Les deux hommes y discutent de la réalisation de la revue, les livres à évoquer dans de longs articles ou dans des notes bibliographiques, les rédacteurs qu'ils pensent les plus compétents pour tel ou tel article, etc. Un grand nombre des livres d'envergure édités à l'époque concernant la philosophie, l'histoire, la science, l'actualité, la politique... y passent (un exemple parmi cent : L'Etrange défaite de Marc Bloch), ainsi qu'une flopée d'intellectuels pressentis défilant dans ces lettres. Avec parfois de petits couacs et de légères polémiques, en essayant de passer entre les gouttes gaullistes et staliniennes. Les deux hommes n'ont pas grand chose en commun : "Les pensées de Weil et de Bataille s'opposent en effet comme le système à la dispersion, l'affirmation du caractère systématique de la philosophie au mélange constant et délibéré des plans, à l'hybridation des connaissances et des modes d'intelligibilité. On peut aussi opposer les thèmes qui structurent la philosophie de Weil : raison, violence, discours, opposition de la violence et du discours, action, éducation, dialogue, ..., et ceux qui traversent sensiblement l'oeuvre de Bataille (en tout cas celle de l'après-guerre) : dépense, utilité, sacrifice, violence, érotisme, destruction, mort, souveraineté, communication..." (préface). Weil est un marxiste plutôt non stalinien, très à cheval sur la dialectique historique et le matérialisme scientifique de ses mentors Marx et Hegel. Quant à Bataille, révolutionnaire d'extrême gauche, je ne saurais trop définir précisément ce qu'il est politiquement...
Toutes ces discussions techniques autour de la constitution d'une revue m'intéressent. Je suis un journaliste raté, même si je n'ai rien fait pour le devenir professionnellement, ça me paraissait trop élevé pour moi. J'ai tâté un peu d'un journal anarchiste artisnal et ultra-confidentiel étant jeune, et puis plus rien jusqu'à cet ersatz individuel de journal appelé "blog". En revanche j'ai toujours lu des journaux, en papier. Surtout des hebdomadaires et des mensuels (les quotidiens, franchement, autant lire le Journal Officiel). Aujourd'hui je lis encore intégralement au moins trois mensuels par mois, et des bricoles.
Le livre me fait penser évidemment à la correspondance de Baudelaire que je lis par petits bouts depuis un an ou deux. Quand celui-ci dialogue par lettres avec son éditeur Poulet-Malassis (j'adore ce nom !) ou les directeurs des périodique auxquels il participe, on retrouve le même ton, les mêmes préoccupations, ces mêmes histoires d'épreuves à corriger, recorriger, ces mêmes fureurs contre les imprimeurs laissant passer les coquilles !
Sans y avoir jamais vraiment participé, je suis un peu dans mon univers...
- Michel Bakounine.- Michel Bakounine et l'Italie,1871-1872.
L'anti-houbiste par excellence : il n'a cessé de s'agiter sur toutes les barricades d'Europe, a fait le tour du monde en passant pendant 8 ans par la case "prison" et 4 ans par celle "Sibérie", pour se replonger finalement dans le militantisme européen tous azimuts. Pourtant c'est un de mes meilleurs copains. Peut-être parce que le monde dont il était plein avec tous ses compagnons internationalistes anti-autoritaires est un monde ou le droit à la paresse aurait certainement été élevé au rang des beaux arts, à côté d'activités passionnelles énergisantes, et de quelques corvées de subsistance librement et égalitairement partagées. Il est vrai aussi que, quand la passion et la foi m'habitent, je peux oublier la sieste... enfin... c'est quand même rare.
Citations en phase avec les commémorations actuelles :
Hier, sous nos yeux, où se sont trouvés les matérialistes, les athées ? Dans la Commune de Paris. Et les idéalistes, les croyeurs en Dieu ? Dans l’Assemblée nationale de Versailles. Qu’ont voulu les hommes de Paris ? Par l’émancipation du travail, l’émancipation définitive de l’humanité. Et que veut maintenant l’Assemblée triomphante de Versailles ? Sa dégradation finale sous le double joug du pouvoir spirituel et temporel. Les matérialistes, pleins de foi et méprisant les souffrances, les dangers et la mort, veulent marcher en avant, parce qu’ils voient briller devant eux le triomphe de l’humanité ; et les idéalistes, hors d’haleine, ne voyant plus rien que des spectres rouges, veulent à toute force la repousser dans la fange d’où elle a tant de peine à sortir. Qu’on compare et qu’on juge !
[...]
Au moment même où la population héroïque de Paris, plus sublime que jamais, se faisait massacrer par dizaines de milliers, avec femmes et enfants, en défendant la cause la plus humaine, la plus juste, la plus grandiose qui se soit jamais produite dans l’histoire, la cause de l’émancipation des travailleurs du monde entier ; au moment où l’affreuse coalition de toutes les réactions immondes qui célèbrent aujourd’hui leur orgie triomphante à Versailles, non contente de massacrer et d’emprisonner en masse nos frères et nos sœurs de la Commune de Paris, déverse sur eux toutes les calomnies qu’une turpitude sans bornes peut seule imaginer, Mazzini, le grand, le pur démocrate Mazzini, tournant le dos à la cause du prolétariat et ne se rappelant que sa mission de prophète et de prêtre, lance également contre eux ses injures ! Il ose renier non-seulement la justice de leur cause, mais encore leur dévouement héroïque et sublime, les représentant, eux qui se sont sacrifiés pour la délivrance de tout le monde, comme un tas d’êtres grossiers, ignorants de toute loi morale et n’obéissant qu’à des impulsions égoïstes et sauvages.
[...]
Mais tout en rendant justice à sa sincérité incontestable, nous devons constater qu’en joignant ses invectives à celles de tous les réactionnaires de l’Europe contre nos malheureux frères, les héroïques défenseurs et martyrs de la Commune de Paris, et ses excommunications à celles de l’Assemblée nationale et du pape contre les revendications légitimes et contre l’organisation internationale des travailleurs du monde entier, Mazzini a définitivement rompu avec la révolution, et a pris place dans l’internationale réaction.
Ami Wroblewski, après une telle recension, l'amoureux de l'édredon, des coups de pieds fouettés et des filles complexes ne peut que se réjouir en mourant heureux.
RépondreSupprimerSoyez-en remercié - et convoqué pour bon thé sur tatami.
Osu !
Ça a été un plaisir Marquis, de vous lire et de vous recenser, avec les moyens du bord... On attend impatiemment le tome 2 !
RépondreSupprimerHeu. C'est pas pour dire mais, avec tout ce qui précède, vous me semblez plus proche de Paul Lafargue que de Bakounine.
RépondreSupprimerEnfin, j'écris ça, j'écris rien...
Oui, c'est vrai Jules, pour la personnalité. Mais je lis les œuvres de notre chère barbe russe comme un roman d'aventure, que je vis ainsi par procuration de mon plumard, comme je vibre aux aventures du docteur Barberousse de Kurosawa, ou du capitaine Barbe rouge de Charlier. Je ne dis pas que je ne peux rien apporter à l'univers (par exemple j'ai de très bons tuyaux pour bien faire son lit à transmettre), mais pas avec la même énergie que ces modèles rêvés.
RépondreSupprimerCependant vous me faites penser que je n'ai toujours pas lu le Lafargue. Peut-être suis-je un peu prévenu par sa proximité avec Barbe dictature du prolétariat... Mais c'est un peu bête et il est dans ma liste. J'espère que ce sera aussi bon que Gala de gaffes à gogo ou Gare aux gaffes du gars gonflé !
On ne va pas ici chipoter sur le sens des mots du barbu de Londres mais Paulo le hamac est tout à fait délicieux et anarcho compatible.
SupprimerPar contre, le Barbe Rouge de Charlier et Hubinon m'a toujours laissé froid.
Quant à Franquin, c'est un grand, que dis-je, un immense. Enfin, c'était.
Merci Jules, vous m'encouragez à m'y attaquer. J'ai déjà lu de lui d'ailleurs (il y a fort longtemps) son pamphlet contre Victor Hugo.
RépondreSupprimerNon, vous avez raison, on ne va pas chipoter. On pourrait à la rigueur concevoir une dictature anti-étatique DU prolétariat, mais faut quand même tirer avec pas mal de bonne volonté les intentions du gus... Et puis s'il n'y avait que ses mots... Il y a aussi ses pratiques.
Pour Barbe rouge on en avait déjà parlé dans les commentaires de je ne sais plus quel blog, quand j'avais répondu au Tenancier, qui tenait les mêmes propos que vous (vous étiez là), qu'évidemment je ne pouvais qu’acquiescer au fait que le ringard père adoptif du demeuré Eric était beaucoup moins hype que Blueberry. Et je précisai que mes sentiments pour lui étaient purement personnels : mon papa à moi avait tous ses albums, et ils sentaient bon la goldo rance.
Et puis il fallait bien filer la métonymie de la barbe...
Damned ! Hell et Cornes de bouc ! J'avais oublié cet échange.
RépondreSupprimerLà-dessus vais m'envoyer une vieille des 4 Barbus repris par ZZ Top.
J.
Lu Lafargue et Bakounine (les oeuvres éponymes) il y a bien des décennies, et lire aujourd'hui le marquis, puis votre beau billet, doit sans doute être une suite logique (à considérer que la logique existe).
RépondreSupprimerBonne sieste également, de bon matin.
Merci pour ces deux derniers messages, dont je n'avais hélas pas été informé ! Le machin du blog ne veut plus m'envoyer de mail... pratique lorsqu'on a à cœur comme moi de ne pas laisser un message amical sans réponse...
RépondreSupprimer