A l'heure de l'anniversaire de la mort de Rémi Fraisse, et des dix ans de celles de Zyed et Bouna, nous avons encore pu constater que la presse fait son travail, elle nous informe en toute liberté d'expression de tout, sans trop insister cependant sur ces bandes armées qui tuent ou mutilent en toute liberté et impunité pauvres, résistants ou métèques, et sans non plus lourdement la ramener sur les nombreuses initiatives que les cibles de ces bandes mènent pour que cesse le massacre.
Mais connaissons-nous vraiment cette aimable corporation (celle des journalistes) ? Pour tester tes connaissances, voici deux textes traçant chacun le portrait d'un journaliste.
Un de ces textes est réaliste, frappé au coin d'études sociologiques poussées, d'analyses psychologiques d'une grande précision et d'observations empiriques d'une rare honnêteté.
L'autre relève davantage de l'utopie, de l'image d'Epinal, du rêve d'enfant quand il veut "être journaliste plus tard".
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As-toi de jouer, ami plébéien !
Jack Mackenzie s’entendait très bien avec les flics parce qu’ils le prenaient tous pour un Irlandais. En fait, il était d’origine écossaise, mais aucun supplice n’aurait pu lui extorquer ce secret honteux.
Chargé des reportages auprès de la police pour une importante chaîne de télévision métropolitaine, Mackenzie avait intérêt à être copain avec les hommes en bleu, sans quoi il n’aurait pu garder longtemps son emploi. Mais les flics savaient que ce brave Jack n’écorcherait par leurs noms, qu’il se débrouillerait pour les mettre dans le champ de la caméra si c’était possible, qu’il n’émettrait jamais le moindre doute quand ils expliqueraient comment le suspect était tombé du toit, et qu’il ne prendrait jamais prétexte de leurs échecs exceptionnels et inévitables pour leur chercher des poux dans la tête. Voilà pourquoi, quand l’inspecteur-chef Francis Xavier Maloney décida de porter devant le public l’affaire du Brasier de Byzance, il réserva l’exclusivité de l’interview à Jack Mackenzie, le faux Irlandais jovial, bon buveur, aux cheveux roux et à la figure parsemée de taches de rousseur.
Chargé des reportages auprès de la police pour une importante chaîne de télévision métropolitaine, Mackenzie avait intérêt à être copain avec les hommes en bleu, sans quoi il n’aurait pu garder longtemps son emploi. Mais les flics savaient que ce brave Jack n’écorcherait par leurs noms, qu’il se débrouillerait pour les mettre dans le champ de la caméra si c’était possible, qu’il n’émettrait jamais le moindre doute quand ils expliqueraient comment le suspect était tombé du toit, et qu’il ne prendrait jamais prétexte de leurs échecs exceptionnels et inévitables pour leur chercher des poux dans la tête. Voilà pourquoi, quand l’inspecteur-chef Francis Xavier Maloney décida de porter devant le public l’affaire du Brasier de Byzance, il réserva l’exclusivité de l’interview à Jack Mackenzie, le faux Irlandais jovial, bon buveur, aux cheveux roux et à la figure parsemée de taches de rousseur.
Donald Westlake.- Pourquoi moi ?
Et le deuxième texte :
Tout le monde sait que Richie Colgan et moi sommes amis. C’est en partie la raison pour laquelle les gens sont un peu plus méfiants envers moi qu’auparavant. […] Maintenant Richie est le plus grand chroniqueur du Trib, et c’est un vrai teigneux s’il pense que vous participez d’un des trois grands maux : élitisme, sectarisme ou hypocrisie. Comme Mulkern est une incarnation des trois réunis, Richie se le paie une ou deux fois par semaine.
Tout le monde adorait Richie Colgan – jusqu’au jour où ils ont publié sa photo sous sa signature. Un nom bien irlandais. Un bon garçon irlandais. Qui traquait les gros manitous corrompus à la mairie et à la Chambre. Et puis ils ont publié sa photo, et tout le monde a pu voir que sa peau était aussi noire que le cœur de Kurz*, et soudain c’était devenu un « provocateur ». Mais il fait vendre de la copie, et sa cible de prédilection a toujours été Sterling Mulkern. Parmi les surnoms qu’il a donnés au sénateur figurent le « Mauvais Double du père Noël », « Sterling le Détourneur », « Mulkern le Magouilleur » et « Hippopo l’Hypocrite ». Boston n’est pas une ville pour politiciens sensibles.
Tout le monde adorait Richie Colgan – jusqu’au jour où ils ont publié sa photo sous sa signature. Un nom bien irlandais. Un bon garçon irlandais. Qui traquait les gros manitous corrompus à la mairie et à la Chambre. Et puis ils ont publié sa photo, et tout le monde a pu voir que sa peau était aussi noire que le cœur de Kurz*, et soudain c’était devenu un « provocateur ». Mais il fait vendre de la copie, et sa cible de prédilection a toujours été Sterling Mulkern. Parmi les surnoms qu’il a donnés au sénateur figurent le « Mauvais Double du père Noël », « Sterling le Détourneur », « Mulkern le Magouilleur » et « Hippopo l’Hypocrite ». Boston n’est pas une ville pour politiciens sensibles.
Dennis Lehane.- Un dernier verre avant la guerre.
* Allusion au personnage du roman de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres, repris par Francis Ford Coppola dans Apocalypse Now où il est interprété par Marlon Brando.
Pour finir, contrairement à ce qu'aurait pu nous faire croire un déferlement de haine sur Tweeter (Salamark : "La marche pour la dignité, une marche contre la France, une marche raciste et antisémite" ; Filani : "Pas contents ? Qu'ils partent !" ; Alan FK : "Marche de la dignité = marche de la pleurniche"... etc., etc., ad nauseam), il ne s'est rien passé ce 31 octobre 2015, comme nous l'a confirmé le JT de 20 heures de France 2. Heureusement qu'il reste des journalistes, s'il fallait croire le fourre tout qu'on trouve sur les réseaux !
Cette marche de 10 000 personnes n'a jamais existé.
- Les voisins avaient anticipé cette année, ils avaient fait les stocks de bonbons !
- Rhô oui ! Et t'as vu les mômes, y en avaient avec des déguisements vraiment chouettes !
Il faut dire que de l'extrême droite à l'extrême gauche et chez des libertaires (un texte de cette dernière obédience tourne, connectez-vous sur votre site fasciste préféré, il y a été fraternellement reproduit), on les en avait un peu dissuadés, pas assez matures, pleins de préjugés et de croyances archaïques (je vous parle même pas de leurs fringues), et en plus ils n'ont assimilé ni Onfray, ni la philosophie allemande. Ca choque le bon goût et fait pouffer dans les milieux distingués. Ils peuvent nous être reconnaissants.
C'est pas clair, mon cher.
RépondreSupprimerA part que vous nous gâtez avec Westlake et Lehane, ,y'aurait un faux parmi ces dex extraits ?
El tonto del pueblo
Non, non, aucun des ces textes n'est apocryphe. Mais l'un est réaliste, l'autre non. Plus un clin d'oeil qu'un réel jeu, mais d'après toi lequel est conforme à la réalité, le journaliste porte parole de la police ou le redresseur de tort attaquant les puissants ?
SupprimerOu alors c'est l'ironie employée qui finit par rendre l'ensemble du message confus ?...
La réponse est évidente.
RépondreSupprimerMême ce cher Albert Londres s'est laissé aller à rapporter de la version policière dans son reportage sur les "Comitadji".
Ah ben ça ! J'avais justement pensé à lui, dont je connaissais un peu le travail sur le bagne et les prostituées surtout, en cherchant une exception ! Mais j'ignorais cet épisode.
RépondreSupprimerNobody's perfect !
RépondreSupprimerConcernant le passage final sur "la marche de la dignité contre le racisme" je crains de ne pas comprendre dans tous les sens du terme !?
RépondreSupprimerS'agit-il de cette réaction : http://horslesclous.blogspot.fr/2015/10/pir-to-pire_31.html
de cette autre réaction : http://lemoinebleu.blogspot.fr/2015/10/ca-devrait-marcher.html
ou bien de celle-ci : http://www.non-fides.fr/?Lettre-ouverte-a-ceux-qui-pensent
???
N'étant pas francilien et étant passablement réfractaire aux déplacements "excessifs" ou plutôt étant soucieux d'économiser le peu d'énergie qui me reste, je ne me suis pas senti trop concerné. Toutefois, j'ai toujours pensé que les ennemis de nos ennemis n'étaient pas nécessairement nos alliés.
Blaireau 58
Je ne désirerai pas pour autant me retrouver dans l'accoutrement d'un islamophobe (cette assimilation étant par trop répandue !) ni même d'un indigènophobe, bien que ce soit plus tentant car plus rare. Et puis les indigènes locaux sont bien les Français "de souche", les "souchiens" pour lesquels il peut m'arriver, dans mes phases aigues de misanthropie sénile d'avoir plus d'aversion que pour toutes catégories sociales ("raciales" !!!) à la mormoil.
RépondreSupprimerDésolé de polluer votre si beau site par ma vespérale crise d'hémorroïdes.
Blaireau 58
Salut Blaireau 58. Tu ne pollues rien du tout, merci pour tes commentaires, ça me fait plaisir de te relire. Le texte que j'avais lu est celui qu'on retrouve sur Non fides, par exemple. Il y a du vrai dedans, mais il m'est arrivé de manifester le 1er mai (chut !) alors qu'il y avait des staliniens, des trostskystes, des maoïstes dans la manif, (peut-être même des socio-démocrates, mais là ne l'ébruite pas s'il te plait) et ils n'étaient pas deux pelés. De même, j'ai du manifester pour les sans-papiers ou sans logis avec peut-être un curé. Mais là, on va chercher la moindre virgule de travers, et on en déduit, avec Fourest entre autres, à une manif anti-sémite... Le PIR, qui semble le grand danger actuel pour la France, mainstream et radicale, ils avaient même pas assez de monde pour tenir leur banderole. Par contre, y avait tout un tas de potes (bon, d'accord, le mot est connoté défavorablement, à juste titre), et surtout de potesses, dont les frères, les fils, les pères se font torturer et tuer (une quinzaine par an, phase finale de toute une partie de l'iceberg de discriminations et de mépris), et c'est tout, pas d'unité nationale, pas de manif géante, pas de mobilisation des médias digne des JO ou de la coupe du monde de football : le silence. Et l'arrogance. Et les tueurs continuent, eux, leurs petites vies peinardes de flics. Quand les victimes s'organisent pour réclamer l'égalité et la justice, pour ne plus rester victimes mais devenir résistants, je trouve plutôt que c'est à soutenir, même de manière critique...
RépondreSupprimerA bientôt !