mercredi 21 juillet 2021

D'un patriarcat l'autre

   - Printemps tardif (晩春, Banshun) de Yasujirō Ozu, 1949.
   Un film sentimental sur le deuil, la séparation d'un père de sa fille. Ce dernier se fait violence pour la pousser à se marier et ainsi à le quitter. Celle-ci va vers sa nouvelle vie avec appréhension et une immense tristesse de devoir abandonner son père vieillissant. Avec Tetsuko Hara, magnifique. Rappelons qu'une femme n'étant pas mariée après 30 ans au Japon, encore aujourd'hui même si la jeunesse à tendance à se rebeller un peu et que la charmante expression ne s'emploie plus, est appelée "makeinu", c'est à dire "chienne perdante", "loseuse".
   - Les Musiciens de Gion (祇園囃子, Gion bayashi) de Kenji Mizoguchi, 1953.
   Plus violent et plus glauque. Encore un film féministe de Mizoguchi, sur le thème récurrent chez lui de la prostitution. Deux geisha, une jeune débutante et une moins jeune, expérimentée et jouant le rôle de grande soeur et de formatrice, sont contraintes de constater qu'elles devront coucher pour survivre. (! stop alerte divulgâchage !) Mais l'une des deux se sacrifiera pour préserver l'autre.


   - Herbes flottantes (浮草, Ukigusa) de Yasujirō Ozu, 1959.
   Une troupe de théâtre arrive dans un petit port du sud du Japon. L'acteur principal, Komajuro, a connu une aventure des années auparavant avec une femme de l'endroit, avec laquelle il a eu un fils, Kiyoshi. La maîtresse de Komajuro découvre son secret et envoie une actrice de la troupe, Kayo, séduire le jeune homme. Komajuro frappera la jeune actrice et sa maîtresse, laquelle, en scène finale (! stop alerte divulgâchage !) s'affairera à lui servir le saké avec dévotion... et nécessité, le tout sous l'oeil ironique du réalisateur.

mercredi 14 juillet 2021

Enfin l'été !

     Sea, sex and sun, voilà la sainte trinité de l'été ! Et c'est le moment de lui faire nos dévotions ! Mais auprès de ce tiercé dans l'ordre il y a un outsider, comme la sainte vierge dans la fameuse mythologie dont les écoliers ayant suivi avec sérieux leur cours d'histoire ont entendu parler. En effet, qu'invoquer quand les trois premières divinités de la belle saison nous ont apporté qui une escherichia coli carabinée, qui une chaude-pisse des familles, et qui un joli mélanome ? Vous avez déjà la réponse : les jeux de l'été !

     Voici donc quelques jeux que vous propose La Plèbe pour vos vacances. A faire en famille, un mojito à la main ! Merci qui ?

Jeu 1 :

     Un ouvrier plante des piquets pour faire une palissade. Il les enfonce à une distance telle les uns des autres que le seau de goudron dans lequel il trempe l’extrémité inférieure jusqu’à une hauteur de 30 centimètres se trouve vide au bout de 3 heures. Étant donné que la quantité de goudron qui reste au piquet égale 10 centimètres cubes, que le seau est un cylindre de 0,15 mètre de rayon à la base et de 0,75 mètre de hauteur, plein aux trois quarts, que l’ouvrier trempe 40 piquets par heure et se repose 8 minutes environ dans le même temps, quel est le nombre de piquets et quelle est la surface de la propriété qui a la forme d’un carré parfait ?

Jeu 2 :

     Dire également quel serait le nombre de piquets nécessaires si on les plantait distants de 10 centimètres de plus.

Jeu 3 :

     Dire aussi le prix de revient de cette opération dans les deux cas, si les piquets valent 3 francs le cent et si l’ouvrier est payé 50 centimes de l’heure.

Jeu 4 :

     L’ouvrier est-il heureux en ménage ?

Jeu 5 :

     Quel serait le résultat si les ouvriers se divisaient en deux escouades dont l’une dépense un tiers de force de plus que l’autre, tandis que l’autre, en revanche, travaille deux heures de plus !

Jeu 6 :

     Combien une couturière use d'aiguilles en vingt-cinq ans quand elle se sert d’aiguilles à cinquante centimes le paquet pendant onze ans, et d’aiguilles à soixante-quinze centimes pendant le reste du temps, mais que celles de soixante-quinze sont creuses ?

Jeu 7 :

     A quelle heure arrivent respectivement deux locomotives dont les vitesses et les heures de départ se compliquent inversement proportionnellement à l’état de santé de leurs chauffeurs ?

Jeu 8 :

     Ces derniers sont-ils syndiqués et si oui, à quel(s) syndicat(s) ?

Question subsidiaire (la plus sérieuse) pour départager les ex aequo :

     De quel texte Wroblewski s'est-il inspiré pour vous offrir cette amusante bouffonnerie ?

jeudi 1 juillet 2021

La Dose de Wrobly : messidor 2021 EC

Rémunéré, le poète est plus à l'aise pour pleurer.
Blaise Lesire.- Opuscule navrant.
Je connais gens de toutes sortes
Ils n’égalent pas leurs destins
Indécis comme feuilles mortes
Leurs yeux sont des feux mal éteints
Leurs cœurs bougent comme leurs portes
Guillaume Apollinaire.- Marizibill.- Dans Alcools.

   - François Sureau. Ma vie avec Apollinaire.
   Bon, si Apollinaire me fait vibrer, chanter, ressentir et m'émouvoir, soyons honnête notamment par le truchement des musiques de Ferré, je n'ai pas grand chose à voir avec l'auteur de cet essai autobiographico-biographique. Je ne suis pas du même monde, de la même classe que cet énarque académicien, homme d'affaire, avocat au conseil d'Etat et à la cour de cassation, premier rédacteur des statuts d'En Marche, de Macron. On croit comprendre aussi à la lecture du livre qu'il est homme de foi catholique. A sa décharge depuis 2014 il s’engage en faveur des libertés publiques, contre l’état d’urgence et, plus généralement, contre des dispositions législatives qu'il considère comme répressives. Le 4 février 2019, il publie dans Le Monde une tribune contre la proposition de loi visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations, dite « loi anti-casseurs ».
   Je me sens certes plus proche de Joseph Ponthus qui, dans son À la ligne, en 2019, cite abondamment le poète trépané mort de la grippe espagnole en 1918, même si je n'ai personnellement pas tâté de l'usine. Malheureusement c'est le premier bouquin qu'on m'a prêté.
   Mais ça ne fait rien, ça parle d'Apollinaire et c'est tout ce qui compte. Il n'est pas un révolutionnaire, il s'est engagé en 1914 (né sujet polonais de l'empire russe, il avait à cœur d'être reconnu comme français à part entière, ce qui peut expliquer ce patriotisme), et évoque la guerre dans ses poèmes comme source de beauté. Le jeune Breton lui reprochera son manque d'amertume face à la grande boucherie mondiale, et le non moins branlotin d'alors Aragon écrit : "Il y a de belles ordures dans Calligrammes". Mais ses poèmes font écho à ma sensibilité, en exprimant l'intimité d'une vie ratée, d'amours splendides non trouvées, d'illusions perdues, le tout sans ressentiment, ou en esquissant des tableaux historiques pittoresques, des scènes campagnardes tendres, ou des déambulations parisiennes nostalgiques... ; sans oublier des formules métaphysiques que je ne comprends pas forcément complètement intellectuellement, mais qui éveillent en moi comme l’intuition du caractère mélancolique, tragique, absurde, que peut revêtir notre vie d'êtres humains en ce monde (voir exergue). Un poète que j'aime beaucoup, qui me parait fraternel en tant que personne (contrairement à l'acariâtre, colérique et haineux Baudelaire, de 59 ans son aîné), que j'ai lu, entendu et que je désire relire et réentendre, ce qui ne saurait tarder, nonobstant les réminiscences de ses poèmes baignant mon quotidien. Le livre de François Sureau a le mérite de parler de lui, de mieux me faire connaître sa biographie, même si c'est en relation avec la sienne propre, dont je n'ai cure. C'est toujours ça de pris.

   C'est tout. Vous vous direz, Wroblewski ne lit plus. Mais je n'ai pas listé les livres commencés, déjà évoqués dans de précédentes Doses, dont je poursuis la lecture, passant de l'un à l'autre en véritable maniaque : le livre de correspondance Georges Bataille / Eric Weil à propos de la revue Critique, le tome 2 de la correspondance de Baudelaire, et la somme sur l'art japonais, un pavé de 480 pages auquel j'espère mettre un bon coup cet été... Conséquemment, pas de polars, pas de SF, pas de fiction... Vous me direz, pas très sexy pour agrémenter les summer vibes. Mais ne présumons pas des surprises que peut nos réserver la vie. Ainsi, hier soir, alors que je raccompagnais une collègue cornettiste après une répétition, nous en vinmes à parler de George Orwell en observant les rats fôlatrant dans les rues vespérales de Saint-Denis, puis notre conversation méandra jusqu'à Jack London et Romain Gary. Et bien vous savez quoi ? Ma co-voiturière à l'intention de me prêter Martin Eden et La Vie devant soi, deux livre qui font partie de mes projets, mais que je ne possède ni n'ai encore eu l'occasion d'appréhender, parmi mes fétiches les plus convoités ! La vie demeure aventure, malgré tout les algorythmes qui nous gouvernent !