lundi 15 avril 2019

Sayonara !

  Bon, eh bien je vous laisse quelques temps. Je vais aller offrir une bouteille de Champagne duty free au Doshu (gardien de la voie), Ueshiba Moriteru dirigeant de l'Aïkikai et petit fils du fondateur.

Dans la famille Ueshiba, le petit fils, actuel Doshu.

Le grand-père, Morihei, fondateur, mort en 1969, année de ma naissance.

Le père, Kishomaru. Il systématisa et codifia l'aïkido moderne.

  L'Aikikai Foundation (財団法人合気会, zaidanhôjin aikikai) est une organisation créée en 1940 par Kisshomaru Ueshiba (troisième fils de Morihei Ueshiba) avec l'appui de son père pour promouvoir le développement de l'aïkido. Le dojo central de l'Aikikai est l'Aikikai Hombu Dojo (合気会本部道場), un bâtiment en béton de quatre étages construit en 1967 pour remplacer la structure originale en bois du Kobukan (皇武館) qui datait de 1931. Le dojo est situé au cœur de l'arrondissement de Shinjuku (l'arrondissement  chaud selon certains guides) à Tokyo, dans le quartier de Wakamatsu-cho. Une équipe d'une trentaine d'instructeurs s'y relaie pour assurer les différents cours chaque jour.


  J'offrirai aussi une boutanche à Yasuno sensei, mon préféré à ce jour.


  Je vous promets d'essayer de ne pas trop me faire casser la gueule et de vous ramener des belles photos, et je vous dis : "mata raigetsu !".

  Et pour terminer je voudrais vous partager ma dernière actu ciné : Vivre dans la peur de Kurosawa Akira (生きものの記録, Ikimono no kiroku), 1955. Avec un Mifune Toshiro méconnaissable et Shimura Takashi, c'est l'histoire d'un patron d'usine vieillissant, atteint d'une phobie des attaques nucléaires, dans les années 50. Il en vient donc à vouloir échanger son usine contre une ferme au Brésil où il emmènerait sa famille officielle femme et enfants adultes, ainsi que ses trois maitresses et ses enfants dits illégitimes. La famille légale se rebiffe.

  La peur de l'atome donc. Et moi qui vais passer deux jours dans la magnifique ville de Nikko qui n'est qu'à 208 km de la centrale nucléaire de Fukushima Daichii... Remarquez nous ici on en a 50 réparties sur le territoire, sans compter la poubelle qui se prépare dans la répression. Irresponsabilité et crime du pouvoir et des profiteurs d'atome, héroïsme matraqué des activistes, inertie engluante du quotidien, "maintien de la confiance" et chantage au mode de vie paralysants. De quoi flipper, oui, je suis bien d'accord !


vendredi 12 avril 2019

Un cap en plus

  J'avais passé le cap des 27 ans, celui des 31, et des 46. Je viens de franchir, le 29 mars dernier, la frontière du demi siècle.

  Comme je l'avais évoqué ici, le trompettiste Roy Hargrove n'a pas eu cette belle longévité, qui est mort à 49 ans. Les reins.

  Dans un autre genre, mais appréciable aussi quand on est plutôt éclectique comme bibi, j'ai appris la disparition discrète de Keith Flint, membre danseur et parfois chanteur du groupe de musique électronique The Prodigy. Il avait mon âge également, l'année érotique, mais n'a pas eu le temps de devenir quinqua. C'est la corde qui l'a eu le 4 mars dernier.

On le voit là plus porté par le public, avec des vigiles au cul quand même, que dansant sur scène.

Rest in peace Keith !

  Bon, ben voilà voilà, on s'accroche, on survit, on va essayer de tenir encore un peu. Mais déjà là, c'est pas mal, quand on voit tous les amis fauchés à la fleur de l'âge.


  Dernière minute : Je viens d'apprendre ici la mort de Jimmy Gladiator. C'est encore un peu de ma jeunesse qui pâlit. Je le fréquentais à sa période fin Hôtel Ouistiti début Au libre olibrius, deux de ses fanzines anarcho-surréalistes. J'étais dans ma période bien imbibée mais je tenais encore debout, c'était pas la fin du processus. On se rencontrait avec sa petite cour (ce n'est pas méchant) dans un bar en face du Gibus, à République, pour causer des fanzines, de tout, de rien, et déconner à bloc. Je me souviens d'un scandale à la mode surréaliste que nous fîmes avec lui, à Beaubourg, quand nous avons piqueniqué au beau milieu d'une conférence de surréalistes établis, encroûtés, fétichisés dans l'industrie culturelle (je ne pourrai pas vous donner plus de précisions sur ces querelles, j'allais participer au charivari sans trop me renseigner, je faisais confiance au bon (mauvais ?) esprit de Jimmy et de ses potes !). J'ai rencontré de belles personnes dans son entourage, comme le peintre anarchiste et grand compagnon de biture Jacques Metz, disparu depuis quelques années déjà, et l'auteur du livre Finir la révolution, très sympathique copain de l'époque retrouvé il y a peu par hasard dans la défunte librairie de notre ami George. J'ai fréquenté aussi une japonaise d'Osaka, rencontrée lors de ces réunions, Yaeko, guide touristique en France, perdue de vue depuis longtemps, mais qui a participé à mon lien involontaire et discret mais présent depuis l'enfance et jamais démenti, avec le Japon. Je me souviens croiser Jimmy en fin de manif en 95, en retard que nous étions sur le cortège en bons amateurs de bières, lui en franc jouisseur, moi en obsessionnel compulsif. De bons moments de camaraderie. En revanche, j'ai une petite tristesse en repensant aux propos hostiles et sarcastiques qu'avait écrits un rédacteur du petit et artisanal canard anar l'Arbre est dans la graine, auquel je participais alors (c'était l'époque du légendaire Mordicus, et du bar La Bonne descente). Je participais mais je n'ai pas eu le courage ni l'énergie ni la sobriété tout simplement de dire à ce rédacteur que Jimmy était un pote et que ça me dérangeait, ces propos. J'ai cru voir dans son regard, après la parution et qu'il ait dû prendre connaissance de l'article, lui qui nous lisait et nous considérait comme des amis, un sentiment blessé, de trahison. Je n'ai jamais su si j'avais rêvé, surinterprété avec ma culpabilité... J'ai fait comme de rien n'était, à jeun j'étais du genre muet dans ma jeunesse, et le temps a passé, je l'ai perdu de vue, j'avais mon fond à toucher et un bon coup de talons à redonner tout au fond, avec les années de remontée consécutives. Je regrette aujourd'hui de ne pas l'avoir revu, juste pour lui faire amende honorable.

  Salut l'olibrius !

lundi 8 avril 2019

Sabre nu, festin nu et piment doux

- Paprika (パプリカ, Papurika) de Kon Satoshi, 2006.
  J'ai pensé à l'Age d'or et au Chien andalou de Bunuel, à moins que ce ne soit à Alice au pays des merveilles... Les dialogues sont contaminés par l'écriture automatique ou les cadavres exquis. Il nous souvient aussi bien sûr de Miyazaki, du Voyage particulièrement. Twin Peaks refait surface un peu également... On ne comprend pas tout, mais ce n'est pas grave, on rêve et on cauchemarde, par procuration.


  Le rapprochement avec le surréalisme, je ne suis pas le seul à l'avoir fait. Il faut dire que c'est patent :


  La bande son participe à l'effet de parade carnavalesque grouillante, survoltée, dysharmonique, onirique, hypnotique, obsessionnelle.


- Sanjuro (椿三十郎, Tsubaki Sanjūrō) de Kurosawa Akira, 1962.
  Mifune Toshiro, Shimura Takashi et geyser de sang. Les neuf samouraïs et le ronin crado. Simple, drôle et trépidant, on kiffe.

Attention ! gaucher contrariant.

- Le Garde du corps (用心棒, Yōjinbō) de Kurosawa Akira, 1961.
  Mifune Toshiro, Shimura Takashi et méchant passage à tabac du héros. Premier épisode avec le ronin crado trentenaire, il n'y en a eu que deux à ma connaissance. J'ai vu le I après le II. Celui-là, qui sent fort sa série B, est moins léché que celui-ci. Mais je n'ai pu m'empêcher de penser aux westerns spaghettis de Sergio Leone avec le Républicain, là, j'ai un trou, celui qui creuse, ce qui est quand même une analogie positive.


- Le Festin nu (Naked Lunch) de David Cronenberg, 1991.
  Bon, ça reste du Cronenberg, avec des êtres et des choses qui se métamorphosent en choses et êtres visqueux, gluants, rouges, roses ou blancs cadavre, tumescents et turgescents (je ne connais pas la différence mais j'aime bien les deux mots, le deuxième rajoutant encore à l'impression de bébête malhounnête), sécrétant, suintant, exsudant voir franchement éjaculant par les orifices et muqueuses les plus divers. Ici, on a droit à des cafards géants qui parlent à l'aide d'un gros cerveau-anus sur le dos, des centipèdes (insectes semi-aquatiques du Brésil) et leur viande, et des espèces d'allien humanoïdes blancs et glabres, nus (ce sont peut-être eux, le festin...), dotés de multiples appendices sur la tête d'où gicle parfois du sperme que les protagonistes du film consomment comme drogue avec délectation, désespoir et épouvante. On ne s'ennuie pas parce que c'est assez rigolo, toutes ces hallucinations, d'autant qu'elles viennent de la beat generation qui avait une défonce plutôt créative (ce qui n'empêche pas le héros de vivre un cauchemar d'angoisse).

  Deux remarques :

  - Le personnage principal, qui représente, malgré la fiction, un peu beaucoup l'auteur du roman, William Burroughs, disons-le, soyons littéraires ; ce personnage, donc, William « Bill » Lee, est joué par... Peter Weller, incroyable ! Un acteur dont j'ignorais jusqu'au nom et qui m'instruis en me distrayant deux fois en deux semaines, puisque c'est aussi ce Peter Weller qui incarne Robocop, que j'évoquais ici même. Les deux rôles n'ont rien à voir, si ce n'est le thème de la métamorphose. Cronenberg y a-t-il pensé en choisissant cet acteur ?...

  - La musique est du... légendaire et libre jazzman Ornette Coleman ! Rien que pour ça j'étais heureux de téter du spectacle en contemplant ce film ! Il fait partie de mon panthéon ! Son sax free accompagne, des States à l'Afrique du Nord, tous les délires de ces personnages qui, après s'être shootés à la poudre anti-cafards, se tapent des fix de viande noire de centipède en poudre, avant de finir par tailler des pipes aux appendices crâniens des mugwumps dont le sperme défonce bien comme il faut !


Écoutons Ornette ! On a même la BO intégrale ici.


  Ma dernière actu ciné.

vendredi 5 avril 2019

Polichinelle

  J'ai un peu écouté Stravinsky car je suis jaloux des oreilles bien exercées qui parviennent à trouver ineffable la musique contemporaine du XXème siècle, française, russe, ou même roumaine. Et un des morceaux que j'ai vraiment trouvé magnifique, enthousiasmant, est Pulcinella.


  Las ! Pour les musiciens initiés, je ne dirai pas snobs, car ce n'est pas parce que je suis limité que je dois critiquer ceux qui sont supérieurs à moi en compréhension et en aptitude à ressentir ; pour les grands initiés, donc, ce Pulcinella est un ballet néo-classique ! Oui, vous avez bien lu, néo-classique, c'est-à-dire que c'est la honte ! Les musicos avant-gardistes de son époque, comme Schönberg, le chambraient et le critiquaient vertement justement parce qu'il avait osé composer des pièces aux belles mélodies, qu'un Jojo en gilet jaune pourrait aimer facilement. Pour comprendre ce sentiment de trahison des amateurs de musique plus coriace, il faut rappeler que Stravinsky était des leurs. Il raconte dans une interview que, quand il composait le Sacre du printemps en Suisse dans les années 10, un jeune garçon qui jouait dans la cour s'était mis à crier : "C'est faux, ! c'est faux !". "Pour lui, c'était faux", rigole Igor, "mais pas pour moi !". Et il a bien raison ! Mais à mon niveau, je suis bien content qu'il ait aussi fait du néo-classique.

  Je vous copie ci-dessous un texte que m'a envoyé l'Orchestre de Paris, c'est toujours intéressant. Ce texte parle du ballet Petrouchka. Petrouchka, a priori, signifie, si j'ai bien tout compris, Polichinelle en russe, de même que Pulcinella en italien. Mais ce second Polichinelle est en revanche bien dans le style plus ardu et rugueux à l'oreille du Stravisnsky du Sacre (dont la création au théâtre des Champs-Élysées à Paris, le 29 mai 1913 provoqua, rappelons le, un scandale artistique comparable à la non moins célèbre bataille d'Hernani en 1830). C'est pourquoi il nécessite, pour moi en tout cas, de multiples écoutes pour en découvrir les joyaux et finir par le kiffer un jour.

Poupées russes

Créé en 1911 au Théâtre du Châtelet par les Ballets russes, Petrouchka de Stravinski est construit autour d’un personnage fort. De l’Italie à la Russie, en passant par la France, ses racines sont multiples… Explorons son "arbre généalogique" !

Les cousins éloignés

Premier cousin : Arlequin, dont l’origine, discutée, remonterait aux pièces latines. Les comédiens masqués de la Commedia dell'arte – le théâtre populaire italien du XVIe siècle - le révèlent : originaire de Bergame en Lombardie, il est paresseux, fourbe, séducteur et change rapidement d’opinion. Par la suite, à ses talents de mime s’ajouteront ceux d’acrobate. Agile aussi, physiquement tout comme dans ses relations, Polichinelle (Pulcinella en italien), représentant au départ les Napolitains, est également bon vivant et coureur de jupons. Demi-masque noir, nez crochu et costume blanc sont ses attributs ! La version française est une marionnette bossue à gros sabots et à la voix stridente, qu’on retrouve dans le théâtre de Guignol. La version anglaise de Polichinelle s’appelle Punch ; en Russie, on l’appelle… Petrouchka.


Le Polichinelle russe

Dans le ballet de Stravinski, Petrouchka évolue au sein d’une fête populaire russe. D’abord simple pantin sans vie aux côté de deux autres - la Poupée et le Maure -, il se met à danser grâce au pouvoir d’un inquiétant magicien. Il s’éprend de la Poupée, qui lui préfère le Maure, les deux pantins masculins se battent et Petrouchka meurt. Son esprit finira par hanter le magicien. Pierrot, qui emprunte son costume blanc à Polichinelle, est en quelque sorte l’équivalent français de Petrouchka. Ils sont tous deux mis à l’écart de la société, parce qu’ils sont idiots, laids, solitaires ou maladroits et sont chacun au cœur d’un trio amoureux (Colombine et Arlequin pour Pierrot). L’incarnation de Petrouchka par le célèbre danseur Nijinsky devient un marqueur pour d’autres artistes à la fois tristes et drôles du XXe siècle comme Jerry Lewis ou Charlie Chaplin.


Une plus large palette

Dans la Commedia dell'arte, faire rire était central, notamment par l’imitation ou des gestes grotesques. Au XXe siècle, les clowns et mimes gagnent en profondeur et expriment par le seul moyen du corps, des situations, des émotions. C’est le cas du mime Marceau (1923 – 2007) dont le jeu est empreint de poésie et de sensibilité. Avec son "Charlot" émouvant et malicieux, Charlie Chaplin (1889 – 1977) est également un héritier de ces personnages : dans Charlot garçon de café ou Charlot vagabond, il est soumis aux injustices de la société et adresse à la caméra des regards tantôt emplis de tristesse, tantôt moqueurs.

mardi 2 avril 2019

Sacqueboute XLVI : Watt

   J'avais évoqué ici ma rencontre enthousiaste avec un écrivain qui ne m'attirait pas tellement avant, Samuel Beckett, via ma lecture jubilante et parfois hilare de son roman Watt. Et bien Hosannah mes frères ! Soyons en sûrs, comme de longs échos qui de loin se confondent, dans une ténébreuse et profonde unité, vaste comme la nuit et comme la clarté, les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
   Ainsi, le compositeur français Pascal Dusapin écrit, en 1994, un concerto pour trombone intitulé Watt, inspiré du roman de Beckett. En tête de l'ouvrage, une citation du roman fait référence au caractère indicible, innommable des choses du monde, et des états dans lesquels se trouve le narrateur. Le musicologue Harry Halbreich parle, à propos de ce concerto, d'un « voyage autistique destiné à s'achever dans le désespoir complet ».


   Saperlipopette ! Le temps que je poste cet articule, la vidéo a disparu ! Et plus rien sur ce concerto sur YT ! Ce Mr Watt reste décidément très mystérieux... Mais je vous jure que le concerto existe !

   En lot de consolation, voici un solo de trombone du même compositeur.



Priviouslillonne Sacqueboute :
Curtis Hasselbring
Steve Turre
Les trois trombonistes de Marc Ducret
Yves Robert
Daniel Casimir
Gary Valente
Chicago
Moon Hooch
Raymond Katarzynski
Albert Mangelsdorff
Christiane Bopp
Honoré Dutrey
Viscosity
Fred Wesley
Dave Lambert
Roswell Rudd
Curtis Fowlkes
Melba Liston
La Flûte aux trombones
La Femme tronc
Journal intime
Gunhild Carling
Nils Wogram et Root 70
Carl Fontana
Animaux
Trombone Shorty
Cinéma
Feu
Le Canadian Brass
Local Brass Quintet
Buddy Morrow
Bones Apart
J.J. Johnson
Lawrence Brown
Vinko Globokar
Les funérailles de Beethoven
Treme
Craig Harris
Mona Lisa Klaxon
Juan Tizol
Bob Brookmeyer
Daniel Zimmerman
Frank Rosolino
Rico Rodriguez
Kid Ory