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vendredi 9 mars 2018

On y croit !

    Je souris en moi-même. Une telle obsession de lire et de me former, pourquoi ? J'aurai beau lire, jamais je ne serai capable de posséder des connaissances économiques et sociologiques qui me permettent d'analyser sans l'aide de techniciens une situation, un pays ou un moment historique. C'est bien joli de dire, comme le font les intellectuels ouvriéristes, que "les ouvriers savent ce qu'ils veulent", que "leur université est l'usine, et leur savoir l'expérience de l'exploitation", etc. La vérité est que notre ignorance est grande et qu'on peut facilement nous tromper ; que notre dénuement extrême nous pousse à faire confiance à celui qui se déclare notre ami ; que nous attendons beaucoup d'une aide extérieure à la classe. Toute notre vie à exécuter des ordres, à faire un travail où le moindre geste est déjà prévu... notre sens de l'initiative est émoussé ; notre capacité d'organisation ne dépasse pas le cadre familial, à condition que la femme tienne les comptes et s'occupe des enfants. Cela nous coûte de déchiffrer un texte, rédiger un tract est un travail ardu, exprimer notre pensée un martyre. Penser, même, nous est difficile, les idées nous échappent comme des poissons glissants qui ne se laissent pas prendre. Il est certain que nous avons toujours été culturellement aliénés et nous avons cependant été capables de faire des révolutions triomphantes. Mais la capacité de mystification qu'a aujourd'hui la société capitaliste est beaucoup plus grande que par le passé. Nous sommes à l'ère technique, et, comme le dit Debray, la révolution révolutionne plus rapidement les bourgeois que les révolutionnaires. L'armée comporte actuellement des groupes spécialisés dans la lutte antiguérilla, alors qu'il n'existe pas un seul guérillero. La police utilise l'électronique pour contrôler les téléphones, les conversations et les personnes. L’État utilise les techniques modernes de propagande pour dissuader, convaincre, endormir. Le capitalisme s'organise au niveau international.


   Et nous, pendant ce temps, nous continuons à nous donner rendez-vous à 6 heures au bistrot du coin, en arrivant en retard, avec le paquet de propagande sous le bras, parfois imprimée avec un rouleau de photographe, comme Lucha Obrera. Dès que nous sommes six dans un même groupe, nous sommes prêts à organiser une fraction. Sur le plan de l'organisation et de l'idéologie, on n'a pas avancé depuis 1936 ; au contraire, il ne reste que les critères d'organisation et d'idéologie les moins révolutionnaires. C'est peut-être pour cela qu'ils subsistent.

   Malgré notre indigence individuelle et de classe, nous sommes convaincus que la victoire sera à nous, les militants, parce que nous luttons dans le sens de l'histoire, et l'histoire conduit nécessairement vers le socialisme. Si nous la poussons, elle ira plus vite ; sinon, elle ira plus lentement ; mais de toute façon, personne ne peut arrêter la marche de l'histoire. Ceux qui n'avaient pas cette foi abandonnaient rapidement, car les difficultés semblent insurmontables. Pour être authentique, pour ne pas être une foi aveugle, elle doit se nourrir aux sources de l'analyse marxiste du développement historique, à la lumière des rapports de production qui se succèdent au long des siècles. Ce qui est mauvais, c'est que le schéma du "sens de l'histoire", avec celui de la "classe ouvrière, seule classe révolutionnaire", se transforme en phrases stéréotypées, acceptées comme elles viennent, comme auparavant on acceptait "Dieu unique en trois personnes" ou la "présence réelle sous les espèces du pain et du vin". Combien de militants aujourd'hui sont capables d'expliquer leur foi à la lumière de l'évolution de la société capitaliste et des classes qui la composent ?


   Le militant, qui est plus activiste que révolutionnaire, s'écroule quand l'action vient à lui manquer. C'est pourquoi on insistera jamais assez sur la formation pour nourrir ce "nous luttons dans le sens de l'histoire". Seule cette foi, réfléchie et assimilée, gardera vivante la petite flamme révolutionnaire dans les moments de découragement, lorsque tous les horizons semblent bouchés.

   Je me réconciliai avec la théorie et la nécessité de la formation.


Extrait de Barcelone : l'espoir clandestin, de Julio Sanz Oller, en promo chez CQFD, courez-y vite si vous voulez vous former !

mercredi 20 décembre 2017

La dose de Wrobly : frimaire 2017 EC


   Thierry Jonquet.- La Folle aventure des bleus.- Gallimard, 2005.
   Ça aurait pu être la folle histoire de Smet, à quelques années près : de la force de destruction matérielle, physique, culturelle, morale, intellectuelle, sensible... du prolétariat par la bourgeoisie et sa religion médiatique. Prémunissons-nous toujours plus compagnons, serrons-les rangs et continuons de déféquer sur leurs idoles, même à un contre mille !

   André Sfer.- French cancan.- Fasquelle, 1955.
   Nous vous avons déjà copié quelques extraits de cette adaptation du film de Jean Renoir sur Montmartre en 1888 et l'entertainment triomphant qui y sévit dix-sept ans après le massacre de la Commune et trois ans avant celui de Fourmies. Et nous avons encore prévu de vous en copier encore. Paradoxalement ce livre (et donc ce film, j'imagine, je ne l'ai pas vu), ne parle par du cabaret du Chat noir, situé pourtant, à la même époque, dans le même coinstot. Trop subversif ? Trop avant-gardiste ?... Trop intello ?...

   Béatrice Didier.- Littérature française: Le XVIIIe siècle. 1778-1820.- Arthaud, 1976.
   Un pavé, mais un bonheur pour qui, comme moi, se passionne pour la Révolution française, l'Histoire et la littérature, tout en ayant de grandes lacunes à leurs sujets, auto-didactat oblige. Tout est ratissé de 1778 à l'assassinat du duc de Berry (1820, ben ouais, tu savais pas ? l'autre !), de Rousseau à Chateaubriand. Des noms connus, aimés, des moins connus, moins aimés, détestés, des inconnus, bref, la comédie humaine de cet apocalypse messianique qui, des philosophes aux romantiques, en passant par les philosophes romantiques et les romantiques philosophant, les orateurs, idéologues, mystiques catholiques, protestants ou occultistes, athées, déistes ou païens, scientifiques, musiciens, peintres, anges de la guillotine persécutés eux-mêmes, enragés, communistes en herbe, réprimés par les jacobins, Thermidor, le directoire, l'empereur ou éternels baiseurs de mules impériale ou  bourbonne... cet apocalypse messianique qui, malheureusement, a accouché de générations de macrons.


    Georges Théotokas.- Le Démon.- Stock, 1946.
   Un roman mélancolique et nostalgique, entre le Grand Meaulnes et l'Abbé Jules, sur une petite île de la mer Egée. Me demandez pas où j'ai trouvé ça, je ne le sais pas moi-même.

   Michel Bakounine.- Aux compagnons de l'Association Internationale des Travailleurs du Locle et de la Chaux-de-Fonds.- Stock, 1972.
   On ne présente plus le grand russe familier de ces pages. Un petit jeu : de qui parle-t-il ici, avec le sens de la formule qui le caractérise ? : "Aujourd'hui, descendue au triste rôle d'une vieille intrigante radoteuse, elle est nulle, inutile, quelquefois malfaisante et toujours ridicule, tandis qu’avant 1830 et avant 1793 surtout, ayant réuni en son sein, à très peu d'exceptions près, tous les esprits d'élite, les cœurs les plus ardents, les volontés les plus fières, les caractères les plus audacieux, elle avait constitué une organisation active, puissante et réellement bienfaisante."

   Julio Sanz Oller.- Barcelone, l'espoir clandestin : les Commissions Ouvrières de Barcelone.- Le Chien rouge, 2008.
   D'actualité, comme vous le savez. Hein ? Mais non, rien à voir avec les nationalistes catalans, je parle de CQFD , ce sont eux qui ont édité ce bouquin il y a déjà un bail, et ils on besoin de blé. C'est un des deux ou trois seuls journaux que j'ai le temps de lire intégralement à chaque parution, alors merci pour eux. Surtout qu'à la qualité habituelle du canard s'est vu greffé le panache et l'énergie des forces vives du défunt Article 11 depuis à peu près un an (peut-être plus, le temps passe si vite), ce qui n'est pas peu dire !

mardi 4 juillet 2017

A mes amis

   Vous faites, mes amis, comme moi partie de ceux qui tentent péniblement de franchir le cap des 25 % (merci au blog Entre les oreilles), et c’est un point d’honneur qui, malheureusement, reste souvent un point de suspension, malgré les espoirs de rééquilibrer la balance, espoirs souvent si prégnants qu'aisément ils glissent vers le déroutant déni. Pour ma part, l’attitude tellement impudente de petit roi du foyer, si sûr de lui, tellement en sécurité et bien dans son slip acheté, lavé, séché par sa compagne, du petit trou du cul de la bande dessinée, me hérisse et et énerve ma tendance à l'amer mépris. Pourtant, inconsciemment, je ne dirais pas dans mes gênes, mais dans un atavisme certain que la plus énergique révolte ne parvient pas à réduire tant que cela, je lui ressemble.

   Mais parlons du positif. Pour certaines tâches, c’est moi qui m’y colle, et il n’est pas question que quelqu’une de plus rapide, de plus efficace que moi, me les reprenne. Je ne vais pas en faire la liste ici, mais je souhaite vous entretenir de celle particulièrement ardue, du changement de housse de couette.

   Pour commencer, moi, quand j’étais célibataire, je changeais la housse une fois par mois, et je me jugeais un parfait gestionnaire domestique. La couette avait au bout de ces quatre semaines une bonne odeur de sueur rance qui ne me donnait pas l’impression de bosser pour rien, de m'agiter dans un zèle un peu maniaque (même si je suis un grand maniaque par ailleurs). Depuis que je vis en association d’égoïstes, c’est toutes les semaines, il faut parfois savoir faire des concessions.

   Au temps de mon célibat j’avais une vulgaire couette deux personnes. Aujourd’hui c’est une couette géante qui irait tout à fait à trois personnes, ce qui est d’ailleurs le cas puisque mon fils à huit ans s’endort toujours entre ses deux géniteurs si vous connaissez des psychologues qui peuvent me fournir un tuyau à ce sujet… Pour manipuler ce truc lourd et encombrant sans devenir véner grave, il faut avoir les grands bras, la force et l’ingéniosité de ma compagne, ce qui n’est pas mon cas. C'est David contre Goliath. Mais je m’en tirais jusqu’à présent tant bien que mal. Tout exsangue, suffocant et blême, épuisé au moment de partir au turbin, et trempé de sueur, mais je m'en tirais.

   Cependant aujourd’hui tout a changé. J’ai un nouveau truc.

   Afin d’encourager le partage des tâches je souhaite donc le diffuser aujourd’hui. Cette nouvelle méthode que m’a transmise ma collègue Yamina (le prénom a été changé) est non seulement très pratique, mais elle est amusante et donne même l’impression de réaliser un tour de prestidigitation. Voici donc le petit tutoriel qui vous permettra de maintenir plus aisément au-dessus des 25 % votre taux de tâches domestiques prises en charge.

Ici la démonstration se fait sur le lit de Rosa et Mireille, les deux cochons d'Inde de la famille. Taille ridicule.

Là encore, le lit n'est pas très grand, le mien fait au moins trois fois ça, mais regardez bien comment elles font mes amis.

   Dans un prochain post, je vous donnerai ma recette de liquide vaisselle, qui ne me donne toutefois par complète satisfaction, surtout quand c'est très gras. Si, mes amis, vous avez vous aussi des tuyaux, des manières de faire telle ou telle tâche ménagère, pratique et, pourquoi pas, ludique, n'hésitez pas à contacter La Plèbe, qui se veut une plate-forme de coopération et de partage pour l'adoption de nouveaux comportements moins beaufs machos ravis du fauteuil (d'ailleurs chez moi, c'est simple, il n'y a plus de fauteuil ; il a rendu l'âme et on ne l'a pas remplacé, comme ça je suis tranquille, et ma fissure anale - voir posts précédents sur ce sujet - ne s'en porte que mieux, sans compter le gain de temps quand je passe l'aspi : plus de déplacement de meuble ou de contournement par les côtés ou par le bas, pratique !).

mercredi 3 mai 2017

Du nouveau sur Zola

      La revue scientifique américaine New Reader vient de publier des manuscrits inédits du Germinal de Zola, que celui-ci aurait écartés de l'ouvrage définitif. C'est l'arrière petit fils d'une soubrette de l'illustre écrivain et humaniste, dont le grand père avait émigré en Amérique pour y trouver un emploi chez un marchand de vin de Boston, qui a retrouvé ce précieux document, au milieu de chaudes lettres d'amour dont nous tairons la teneur, dans une grande caisse du grenier du siège social de la grande entreprise d'importation de Bourgueil distillé par radiations que dirige aujourd'hui le descendant du pionnier.

      Nous savons que le jeune journaliste Zola, arriviste avant tout, répandit sur les charniers de la Commune son flot d'ignominies, vomit son eau forte sur les insurgés vaincus et assassinés. Certes, il se rattrapa par un courageux humanisme lors de l'Affaire que tout le monde connait, quelques trente ans après. Pour cela, pour ce vaillant combat qu'il mena sur sa vieillesse contre nationalistes, jésuites, antisémites, militaristes et autres ganaches galonnées, tel un frère Jean des Entommeures déchaîné contre les hordes picrocholines, on peut lui savoir gré, peut-être lui pardonner. Mais il reste malgré cela un écrivain qui, sous des dehors progressistes, a toujours dépeint la classe ouvrière comme un amas de brutes avinées, malpropres et violentes. Le roman Germinal en est un exemple.

      Ces manuscrits perdus et retrouvés, montrent un paroxysme dans le préjugé anti-ouvrier de l'écrivain bourgeois : nous y voyons des mineurs querelleurs, envieux, puérils, grossiers, de mauvaise foi, et, pour couronner le tout, d'une culture plutôt au ras des paquerettes. Peut-être est-ce cette charge par trop exagérée qui poussa le grand gazé à faire don de cette esquisse, modeste brouillon pour lui, mais si précieux souvenir pour elle, à son ancillaire maîtresse.

      Je vous les livre en exclusivité ici, une traduction par mes soins en français d'une traduction du français en anglais, vous excuserez les quelques erreurs possiblement éparses au fil du texte.  Comme il s'agit d'un premier jet que le grand homme envoya à sa femme de chambre pour qu'elle lui dise ce qu'elle en pensait, le texte est resté sous forme de dialogue, non encore rédigé narrativement.

Malgré son ridicule appendice pileux de hipster, Emile a consacré son oeuvre au paupérisme, et une partie cachée de sa vie à honorer la dignité des gens de condition servile, pour qui il ressentait une réelle tendresse.

      Littérature.

     Mineur 1 : Me parle point sur ce ton, salaud de menteur !
     Lantier : Sale porc, t'as vraiment rien à foutre dans cette mine.
     Mineur 1 : Gros con de snobinard ! Tu te crois si malin !
     Contremaître : Vous vlà encore en train de vous battre, putain ! Arrêtez donc ou je vous carre cette pioche dans la gueule ! Qu'est-ce qui s'est passé ?
     Mineur 1 : C'est lui qui a commencé.
     Contremaître : J'm'en contrefous, de qui a commencé. C'est à quel propos ?
     Lantier : Ben, il prétend que le putain de traité d'Utrecht c'était en 1713.
     Mineur 1 : Et j'ai foutrement raison !
     Lantier : Foutrement tort ! Il a été ratifié en février 1714.
     Mineur 1 : Il bluffe. Il te manque une case, Lantier. Tu dis n'importe quoi.
     Contremaître : Il a raison, Lantier,. Le traité a été ratifié en septembre 1713. Toute cette foutue mine sait ça. Relis ton Trevelyan, page 468.
     Mineur 2 : Il pendait au putain de traité de Westphalie.
     Lantier : T'es en train d'insinuer que je fais pas la différence entre la putain de guerre de Succession d'Espagne et la putain de guerre de Trente Ans ?
     Mineur 2 : Tu ferais même pas la différence entre la bataille de Borodino et le cul d'un tigre.
     (Ils commencent à se battre)
     Contremaître : Arrêtez ça ! Arrêtez ça ! J'en ai ras le casque de vos putains de bagarres ! Quand c'est pas le foutu traité d'Utrecht, c'est le foutu théorème binomial ! On n'est pas dans la salle des doyens du Collège de France, ici putain ! On est à la mine !
     Mineur 3 : Hé, contremaître, tu peux régler queuquechose ? Maheu dit qu'on trouve l'abaque entre les triglyphes des frises de l'entablement des temples doriques classiques.
    Contremaître : Espèce de gros abruti, Maheu, ça c'est la métope. L'abaque, l'est entre l'architrave et l'échine dans le Capitole.
     Maheu : Putain de menteur !
 
     Nous espérons que cette précieuse découverte fera faire un bond aux études zoliennes.

mercredi 25 mars 2015

Jésus ressuscité des morts

Vous allez peut-être dire qu'en vieillissant je deviens d'une sensiblerie gâteuse, mais cette fois j'ai versé une vraie larme qui a coulé, et j'ai eu plusieurs sanglots. Faut dire que je suis un peu déprimé par la défaite d'une grève des bas salaires de mon lieu de perruque blogueuse, les collègues à bout de souffle se faisant déféquer dessus par une direction desserrant enfin les fesses en constatant l'essoufflement du mouvement.

James Ensor : Alimentation doctrinaire

Mais c'est le lot actuel du pot de terre, patience, ça branle dans le manche, et revenons à ce documentaire qui m'a fait pleurer sans que je m'y attende le moins du monde le bougre. C'est l'histoire d'un prolo, bâtiment, restauration, jardins, déchets... superstar sans le savoir. Avec une musique d'une grande beauté, et des paroles que je vais approfondir, il a sorti deux disques dans les 70's, auprès desquels Bob Dylan fait figure de gentille anecdote, selon ses producteurs. Mais c'est le flop absolu, et Rodriguez se suicide sur scène (balle dans la tête ou immolation par le feu, ce n'est pas clair)...
Et puis...

Entre Vertigo et le Comte de Monte-Cristo. Magnifique.


C'est ma dernière actu ciné.