- Rêves (夢, Yume), d'Akira Kurosawa, 1990. Magnifique film rassemblant plusieurs courts métrages restituant des rêves. On passe de l'imaginaire enfantin et des légendes, à des visions plus désespérées mettant en scène la destruction humaine de la nature, les catastrophes atomiques (Kurosawa a été visionnaire, on a là déjà une centrale qui pète au Japon), la guerre et ses massacres ; mais aussi plus lumineuses avec la vie simple et proche de la nature d'une communauté villageoise, décroissante pourrait-on dire aujourd'hui, ou la beauté et la compulsion créatrice, puisqu'on y rencontre, non pas Kirk Douglas ni Jacques Dutronc, mais Vincent Van Gogh quand même, à l'oeuvre. Les images d'une beauté ébaubissante et les messages courts comme des haïkus nous laissent tout suspendus. Quelle chance j'ai de pouvoir découvrir ces trésors à l'âge mûrissant qui est le mien !
- Les Bas-Fonds (どん底, Donzoko) d'Akira Kurosawa, 1957. D'après Maxime Gorki. Magnifique également. Dans le genre beauté du laid, sublimation de l'enfer, détournement par les protagonistes de la misère par l'ivresse, le jeu et la danse dionysiaque. L'interprétation dramatique de chaque actrice et de chaque acteur est ciselée comme du diamant, du grand art. Pas du tout envie de voir la version de Jean Renoir après ça.
Mais ça m'a rappelé de mauvais souvenirs finalement. Quand j'ai squatté deux ou trois ans au début des 90's. Moi mes héros, c'étaient les Avengers autonomes. Mais mes tendances m'ont vite amené à finir avec les défoncés, branleurs et vrais sans logis. Point de valeureux et généreux vols individuels ou organisés et d'activités intellectuelles et manuelles intenses pour équiper un lieu de résistance et d'activités révolutionnaires et fournir des moyens de subsistance largement suffisants à ses habitants, mais de minables combines, des rapines peu reluisantes, le salaire de petits boulots ou les recettes des aides sociales, du caritatif ou de la manche. Le tout afin de, pas H24 mais pas loin, boire 8.6, bières de chez ED ou plus costaud quand nous étions en fonds, fumer du shit quand c'était la richesse et la fête, et, après que j'aie fréquenté un psychiatre pour me faire réformer du régiment, s'enfiler les Xanax que je ramenais, par pincées. C'était moins esthétique que dans le film, mais parfois on pouvait retrouver ces orgasmes collectifs et ces acmés de franche rigolade. L'ensemble sur fond noir : crasse, incendie pour cause de feu à même le taudis pour se réchauffer, promiscuité écœurante, rixes, mort de maladie sans soin...
Bon, allez, pour nous remonter le moral de cette misère (je ne parle pas de la maladie de la dépendance, qu'on retrouve évidemment chez les bourgeois, mais de conditions de survie contraignant a minima à dormir en compagnie de rats et de cafards, et à connaître de manière non anecdotique les sensations de froid, de faim, de peur que ça dure, etc., on pourrait aujourd'hui penser aux roms, ou aux campeurs des périphériques, entre autres), cette misère qui illustre une réalité qu'on ne voit pas à la télé si ce n'est par transparence dans les rictus crispés de tous les macrons du monde, pour nous remonter le moral donc, je découvre en même temps que vous ce groupe qui reprend un répertoire de chansons populaires vieux de plusieurs siècles, le Min'ho, en salsa, reggae et jazz éthiopien : Minyo crusaders.
Les deux films ci-dessus évoqués sont ma dernière actu ciné.
C'est dans les Bas-Fonds qu'il y a un mec qui se prend pour une locomotive : -do-dèss-caden', -do-dèss-caden',-do-dèss-caden',-do-dèss-caden', ?!
RépondreSupprimerÀ côté, le Renoir semble sorti du Couvent des Oiseaux. Mais il y a quand même Louis Jouvet qui sauve un peu tout ça.
RépondreSupprimerSalut les amis, désolé pour le retard. Pour l'homme loco, il ne me semble pas l'avoir vu dans le film (je n'ai pas encore lu le livre), mais ça pourrait tout à fait, il y a bien ce genre de personnes bien barrées. Il y en a un qui saute partout en attrapant tout ce qu'il trouve sur son passage.
RépondreSupprimerJe suis quand même curieux de voir la version de Renoir (et surtout bien sûr celle de Gorki). Il est vrai que Jouvet a toujours le don d'insuffler une atmosphère bizarre qui vous gratouille à tous ses rôles.